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Cela aurait pu être une bonne nouvelle pour tous les nouveaux parents… Des scientifiques ont trouvé un moyen de mettre automatiquement en sommeil des créatures, dès que la température s’élève. Ces créatures ne sont que des mouches drosophiles, mais elles pourraient nous en apprendre beaucoup sur : pourquoi dort-on ?

Chaque animal, ou au moins tous ceux avec un cerveau ont besoin de dormir, mais on ne sait pas encore, très clairement, pourquoi.

La seule raison réellement solide, pour laquelle nous avons besoin de dormir, c’est parce que nous avons sommeil. Le sommeil est peut-être le seul comportement majeur, toujours à la recherche d’une fonction.

Traditionnellement, les scientifiques ont tenté de déduire le rôle du sommeil, en observant le comportement des animaux qui n’en reçoivent pas assez. Mais la privation de sommeil entraine de nombreux troubles sur le corps et c’est un instrument émoussé, pour comprendre la fonction du sommeil. Jeffrey Donlea de l’Université de Washington a adopté une approche plus raffinée. Il a “crée” à des mouches drosophiles, qui peuvent être envoyées au lit, à la demande et il les a utilisées, pour montrer comment le sommeil stimule notre capacité à former des souvenirs durables.

Donlea a travaillé avec des protéines qui font office de “portes” appelées canaux sodiques et les a arrangées, afin qu’elles restent toujours ouvertes. Quand il a implanté ces portes dans les neurones des mouches, elles ont commencé à être hyperactives et Donlea remarqua que certaines des mouches s’endormaient beaucoup plus longtemps que leurs pairs. En étudiant le cerveau de ces grosses dormeuses, il vit que ces “portes ouvertes” s’étaient groupées autour d’un petit groupe de neurones, dans une zone appelée la dorsale en forme d’éventail. Elle semblait être un centre de contrôle pour le sommeil.

Donlea a ensuite utilisé un canal sodique légèrement différent, qui s’ouvre seulement à une température fixe de 31 °C. Il a implanté, ces portes sensibles à la chaleur, dans la dorsale en forme d’éventail et quand il a augmenté la température, ses mouches sont allées se coucher (Tube droit, dans la vidéo ci-dessous). Elles ont arrêté de se déplacer et elles étaient insensibles. Elles ne pouvaient être réveillées que par des impulsions lumineuses ou en les secouant fermement. De plus, elles mettaient plus de temps à s’endormir, si elles avaient eu une dose de caféine.

La dorsale en forme d’éventail est impliquée dans le mouvement et la mémoire, de sorte que Donlea a voulu voir s’il pouvait améliorer les souvenirs de ses mouches, en les envoyant se coucher, après des périodes d’apprentissage. Comme des mouches (ou humains) passent la journée éveillées, leurs neurones répondent à de nouvelles expériences en créant des connexions (synapses) entre elles. Voilà comment elles (et nous) mémorisent/apprenons.

Une étude que j’ai relatée, traitant de ce sujet : Le sommeil protège des fuites… de mémoires.

Mais il y a des limites. Chaque nouvelle synapse prend plus de place et plus d’énergie. Il arrive un moment où le bagage d’expériences sature la capacité du cerveau à créer de nouvelles synapses. La mouche ne peut tout simplement ne plus mémoriser. Par exemple, Donlea a montré que des environnements socialement riches, comme d’être coincé dans un groupe de 90 mouches, peuvent faire saturer le cerveau plus rapidement que d’être dans l’isolement.

Mais il y a une façon, pour les mouches, de faire face à ce plafond de l’apprentissage – sommeil. Selon certaines hypothèses populaires, le sommeil donne du temps au cerveau pour rejouer les évènements de la veille, en intégrant de nouvelles pièces d’informations avec les anciennes, afin de produire de la mémoire à long terme, de bonne valeur. Le cerveau endormi a également une chance d’écarter toute nouvelle synapse , pour ne garder que celles qui sont les plus utiles. Le cerveau construit des dizaines de synapses lorsque nous sommes éveillés et ensuite les réduits, quand nous sommes endormis.

Cela signifie que plus un animal apprend, plus il a besoin de dormir et plus grands seront les avantages quand il se réveille. Certains scientifiques en ont autant appris, en étudiant des mouches traditionnelles. Indira Ganguly-Fitzgerald a constaté que la quantité de temps que les mouches passent endormit, augmente avec la quantité d’expérience qu’elles acquièrent pendant l’éveil. Elles dorment deux fois plus longtemps, que celles placées en isolement et elles apprennent de plus amples informations.

Aujourd’hui, Donlea a confirmé ces résultats avec son “endormisseur sur demande” pour mouches. Il a exposé des mouches mâles à d’autres mâles, qui avaient été modifiés pour avoir l’odeur des femelles. Les mâles ont eu envie de s’accoupler avec les imposteurs, mais après quelques refus, elles ont vite appris à ne pas les déranger. Si Donlea remettait ses mouches dans la même posture délicate, après les avoir placés dans un groupe de 90 mouches, il constatait qu’elles avaient oublié leurs leçons. Cependant, s’ils les faisaient dormir pendant quelques heures après leur formation, elles se souvenaient ce qu’elles avaient appris.

Ce n’est que le début. En permettant aux scientifiques de contrôler le calendrier et la durée du sommeil, les mouches de Donlea, devraient ouvrir la voie à toutes sortes de nouvelles expériences fascinante.

L’étude à été publiée ici : Inducing Sleep by Remote Control Facilitates Memory Consolidation in Drosophila.

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