Sélectionner une page

5852007496_9657d063eb_o

Pour de nombreuses personnes, le simple fait de penser à des problèmes mathématiques est horrible et même douloureux. Une étude menée par les psychologues, Ian Lyon et Sian Beilock, a démontré que ce n’est pas une hyperbole : certaines personnes n’aiment pas pratiquer les maths parce que l’idée même de travailler avec des chiffres est vécue d’une manière semblable à la douleur physique. Pour les personnes ayant des niveaux élevés d’anxiété envers les mathématiques (HMA pour “high levels of mathematics-anxiety”), les mathématiques font mal.

Le Guru remplacera les termes anglais cités dans l’étude – HMAs : “High levels of Mathematics-Anxiety” par GAM : “Grande Anxiété pour les Mathématiques” et LMAs : “Low Anxiety about Mathematics” par FAM : “Faible Anxiété face aux Mathématiques”.

Lyon et Beilock, respectivement de l’Université de Chicago et de l’Université Western Ontario (Canada), ont été intrigués par d’autres études qui ont démontré que certaines personnes ressentent le rejet social d’une manière comparable à une réelle douleur physique et qu’elle semble être ressentie en fonction du taux d’anxiété. Les Maths, apparemment, génèrent également de l’anxiété chez certaines personnes et comme les scientifiques l’écrivent :

Les mathématiques… l’anxiété est un banc d’essai idéal pour élargir notre compréhension sur la façon, dont physiquement, des situations anodines peuvent susciter une réponse neurale reflétant une réelle douleur physique.

L’hypothèse était que le fait de s’attendre à avoir à faire des mathématiques générait de l’anxiété, ce qui à son tour entrainerait la douleur. Ils ont demandé à des participants de répondre aux questions d’une enquête sur la façon dont des problèmes mathématiques les angoisses, en procédant par élimination à partir de deux groupes chacun de 14 personnes : un groupe de GAM (Grande Anxiété pour les Mathématiques), et un groupe de FAM (Faible Anxiété face aux mathématiques). Les critères permettant de quantifier l’anxiété étaient fondés sur la courte échelle d’évaluation de l’angoisse des mathématiques (Short Math Anxiety Rating-Scale – SMARS), une échelle spécialement conçue en 1972 pour mesurer l’anxiété produite par l’idée de faire des maths.

Les 28 personnes ont répondu à une série de mots et de puzzles numériques tandis que leurs cerveaux étaient scannés avec une IRM. Alors qu’ils étaient allongés à l’intérieur de la machine, une lumière colorée clignotait avant chaque série de questions pour indiquer si elles porteraient sur le langage ou sur des problèmes mathématiques et de quelle difficulté (facile ou difficile), elles seraient. Ce fut la clé pour tester l’hypothèse que c’est l’attente qui déclenche des sensations désagréables et non les problèmes (mathématiques) eux-mêmes.

Lorsque cela concernait des mathématiques faciles et des questions de langage, il n’y avait pas de différence entre les deux groupes GAM et FAM. Pour les questions les plus difficiles, cependant, les GAM (grande anxiété pour les mathématiques) ont considérablement été moins performants que les FAM (Faible Anxiété face aux mathématiques). Ce qui a du sens : les personnes qui sont très anxieuses ont tendance à être beaucoup moins bonnes dans des tâches qui nécessitent beaucoup de réflexion.

En observant les différences de l’activité cérébrale entre les GAM et les FAM, lors du test sur les questions de maths compliquées, Lyon écrit :

les quatre régions, l’insula bilatérale dorsopostérieure, le cortex cingulaire antérieur et un segment dorsal du sillon central droit, ont montré une interaction significative, grâce à une relation positive entre le SMARS et l’activité mathématique et une relation négative entre le SMARS et l’activité portant sur le langage.

Pour les FAM, leur capacité à effectuer des problèmes mathématiques difficiles était davantage touchée plus leur score était élevé sur l’évaluation de l’échelle SMARS, il n’y avait aucune corrélation lorsqu’il s’agissait des tests sur des mots. Pour les GAM, leurs scores sur le SMARS eut un impact “significativement non-négatif" par rapport à leur capacité à résoudre l’un des problèmes de mathématiques.

L’insula postérieure et le cortex cingulaire antérieur sont les parties du cerveau associées à l’expérience de la douleur, les résultats ont montré que, lorsque les FAM ont vu la lumière qui correspond à un problème difficile en mathématiques, leur cerveau a anticipé les questions comme " une réaction corporelle d’aversion viscérale”.

Dans la conclusion, Lyon écrit :

Nous apportons la première preuve neuronale indiquant la nature de l’expérience subjective de l’angoisse des mathématiques. Des recherches antérieures sur le chevauchement entre traitements de la douleur et l’expérience psychologique du rejet social ont principalement porté sur l’expérience réelle d’être rejeté, mais nos données vont au-delà de ces résultats et suggèrent que même anticiper un évènement désagréable est associée à une activation des régions neuronales impliquées dans le traitement de la douleur.

Il y a également des implications pour la théorie selon laquelle ce genre d’expérience de la douleur est quelque chose d’inhérent à l’homme grâce à l’évolution. Lyon estime qu’il est “peu probable qu’un mécanisme purement évolutionnaire ait conduit une réponse à la douleur nerveuse provoquée par la perspective de faire des mathématiques (comme les mathématiques sont une invention culturelle récente )”. Cela signifie que les voies de la douleur dans le cerveau peuvent être activées par des choses qui n’ont aucun rapport avec les expériences douloureuses, ce qui pourrait faire la lumière sur d’autres phénomènes psychologiques comme les phobies.

Puisque c’est l’anticipation des mathématiques qui semble influencer le plus les gens, plutôt que les opérations elles-mêmes, il peut être utile de savoir s’il y a une autre façon d’enseigner les mathématiques dans les écoles. Cela pourrait également signifier prendre le temps de simplifier le processus pour renvoyer une déclaration d’impôt, par exemple. Souvent, les gouvernements s’inquiètent du nombre d’adulte ne maitrisant pas les maths après avoir quitté l’école, mais peut-être que ce n’est pas leur faute, ils ne pouvaient pas se concentrer en classe, envahie par l’angoisse des chiffres.

Le Guru a le vague pressentiment que certains vont présenter cette étude comme une justification de leur voluptueuse procrastination face aux mathématiques… Pour les autres, détendez- vous en regardant d’adorables images d’animaux, par exemple.

L’étude publiée sur PlosOne : When Math Hurts: Math Anxiety Predicts Pain Network Activation in Anticipation of Doing Math.

Pin It on Pinterest

Share This