La première plume de dinosaure découverte a perdu son propriétaire
Le mystère d’une plume vieille de 150 millions d’années a enfin été résolu… du moins en partie : elle n’appartenait pas à l’Archaeopteryx, mais son propriétaire reste insaisissable.
La découverte du premier fossile d’Archéoptéryx, en 1860, fut un moment charnière pour la biologie et la géologie. Il a révélé une créature en transition, un lien entre le dinosaure et les oiseaux, confirmant ce que de nombreux scientifiques commençaient déjà à soutenir : que les oiseaux ont évolué à partir de lézards.
Représentation de ce à quoi aurait pu ressembler l’Archaeopteryx. (Nobu Tamura)
Cette créature de 150 millions d’années s’intègre comme un charme dans ces théories et reste cruciale pour notre compréhension de l’évolution.
Mais juste avant la découverte de l’Archéoptéryx, une seule plume fossilisée, a été découverte. Aujourd’hui encore, c’est la plus vieille plume jamais découverte. On pensait qu’elle appartenait à un Archéoptéryx et on l’a même nommée, mais ce n’est pas du tout le cas.
La plume isolée d’Archéoptéryx est la première plume fossile découverte. Image du haut, la plume telle qu’elle apparaît aujourd’hui sous une lumière blanche. Image du bas, le dessin original de 1862 par Hermann von Meyer. (Université de Hong Kong)
Dès le début, il y a eu des doutes. Les premières descriptions du fossile mentionnent une plume assez longue visible sur le fossile, ce qui indiquerait qu’il s’agit d’une plume primaire (plume de contour). Cependant, la partie inférieure de la plume (tout à gauche dans la première image du fossile ci-dessus), c’est-à-dire la région dépourvue de barbes n’est plus visible aujourd’hui, et ne l’a plus été depuis longtemps. On a tenté à plusieurs reprises de la découvrir à l’aide de techniques d’imagerie, mais aucune ne trouva quoi que ce soit.
Les chercheurs ont maintenant utilisé une nouvelle technique d’imagerie appelée fluorescence induite par laser pour analyser le fossile. Elle a révélé la partie manquante de la plume (ou plutôt son halo restant), résolvant ainsi le vieux mystère.
Fluorescence stimulée par laser (LSF) montrant le halo de la plume manquante. La barre d’échelle est de 1cm. (Université de Hong Kong)
Selon Daniela Schwarz, coauteure de l’étude et conservatrice de la collection de reptiles fossiles et d’oiseaux du Museum für Naturkunde à Berlin :
Il est étonnant que cette nouvelle technique nous permette de résoudre ce mystère vieux de 150 ans.
Mais la méthode a aussi détrôné une idole : elle n’appartenait certainement pas à l’Archéoptéryx, a déclaré l’équipe. La nouvelle technique d’imagerie a permis une vue sans précédent sur la structure de la plume, révélant l’absence d’une ligne centrale distincte en forme de S, une caractéristique déterminante des plumes couvrantes. L’équipe a également exclu la possibilité qu’il s’agisse d’une plume primaire (de contour), secondaire ou de queue.
Alors, si elle n’appartenait pas à un Archéoptéryx, à qui appartenait-elle ?
Les chercheurs n’en sont pas vraiment sûrs, mais c’était probablement un autre dinosaure à plumes. Le fait qu’une telle créature existe suggère qu’il y avait beaucoup plus de diversité dans les dinosaures à plumes que nous le pensions au départ. L’Archéoptéryx reste un maillon clé dans l’évolution des dinosaures-oiseaux, mais il n’était peut-être pas si unique que ça et peut-être que plusieurs autres créatures présentaient des caractéristiques similaires.
Nous entendrons certainement parler davantage de la fluorescence induite par laser (CSF) à l’avenir, concluent les chercheurs.
Selon Tom Kaye, l’auteur principal de l’étude :
Le succès de la technique du CSF va certainement conduire à d’autres découvertes et applications dans d’autres domaines. Mais il faudra attendre de voir ce que nous trouverons ensuite.
L’Archéoptéryx vivait à la fin du Jurassique, il y a environ 150 millions d’années. Il avait plus en commun avec les dinosaures qu’avec les oiseaux (mâchoires aux dents pointues, trois doigts aux griffes, une longue queue osseuse, des seconds orteils hyperextensibles), mais il présente encore des caractéristiques semblables à celles des oiseaux, telles que ses ailes larges et à plumes.
L’étude publiée dans Scientific Reports : Detection of lost calamus challenges identity of isolated Archaeopteryx feather et présentée (PDf) sur le site de l’université de Hong Kong : HKU imaging technology shows first discovered fossil feather did not belong to iconic bird Archaeopteryx.