Et sans odeur… : une main robotisée aux doigts souples qui suent pour se refroidir
Une main robotique expérimentale au corps mou maintient sa température en libérant de l’eau par ses minuscules pores.
Bien qu’il s’agisse encore que d’une preuve de concept/ faisabilité, cette approche inspirée du vivant pourrait donner naissance à une nouvelle catégorie de robots capables de fonctionner pendant de longues périodes sans surchauffe.
Les robots et les machines mécaniques, en général, sont confrontés à des défis importants en matière de thermorégulation, soit parce que leurs composants surchauffent, soit parce qu’ils fonctionnent dans des environnements chauds ou à l’extérieur un jour d’été. Le refroidissement consomme beaucoup d’énergie, ce qui augmente les coûts, tandis qu’une mauvaise gestion de la chaleur peut avoir un impact important sur la durabilité et les performances des machines.
Les chercheurs de l’université Cornell (Etats-Unis), du Facebook Reality Labs et du Centre de micro-bio-robotique (Micro-BioRobotics) de Pise ont relevé ce défi en se tournant vers la nature pour trouver une solution : le pouvoir rafraîchissant de la transpiration s’est naturellement imposé.
Selon Robert Shepherd, de l’université Cornell et coauteur de la recherche :
Nous pensons que c’est un élément de base d’un robot polyvalent, adaptable et durable.
Lorsque notre corps se réchauffe, nos millions de glandes cutanées/ sudoripares produisent de la sueur, principalement de l’eau avec un peu de potassium, du sel et quelques autres minéraux. Les humains ont le système de transpiration le plus efficace que nous connaissions, nous sommes plutôt une exception dans la mesure où nous comptons sur la sécrétion d’eau sur notre peau pour nous rafraichir. La plupart des mammifères à fourrure régulent leur température corporelle en haletant, tandis que d’autres animaux comme les ectothermes (lézards, amphibiens et insectes) ont développé d’autres comportements qui les aident à rester au frais.
La transpiration a permis aux humains de marcher toute la journée, même pendant les chaudes journées d’été où la plupart des prédateurs sont à l’ombre pour se rafraîchir. Ainsi, à bien des égards, la transpiration fut une évolution qui nous a permis de survivre et de prospérer dans le monde entier, sous de nombreux climats différents.
Il est logique de concevoir certaines de nos machines d’après ce mécanisme biologique.
Selon Thomas Wallin, ingénieur aux Facebook Reality Labs et coauteur de la nouvelle étude :
Il s’avère que la capacité à transpirer est l’une des caractéristiques les plus remarquables de I’ humain. Nous ne sommes pas les animaux les plus rapides, mais les premiers humains ont connu le succès en tant que chasseurs persistants. La combinaison de la transpiration, d’une relative absence de poils et d’une démarche bipède droite nous a permis d’épuiser physiquement nos proies lors de chasses prolongées.
Wallin et ses collègues ont conçu un robot en forme de ballon muni de pores qui permettent à l’eau de s’écouler lentement, mais seulement lorsque la température du « corps » atteint un certain seuil. Pour que le robot en forme de main réagisse à la température, les chercheurs ont utilisé un hydrogel appelé poly-N-isopropylacrylamide (PNIPAm). Ce matériau réagit à la température de manière passive, sans qu’il soit nécessaire de recourir à des capteurs ou à des composants électroniques supplémentaires.
A partir de l’étude : Actionneur imprimé en 3D avec une surface élevée et une conception à plusieurs matériaux. (C1) Actionneur avec design des pores, texture et couche de limitation de la contrainte. (C2) Modèle animé montrant la transpiration. (C3) Actionneur imprimé en 3D qui ressemble au modèle animé. (Mishra et Coll./ Sci Robot)
À 30°C, les micropores de la couche supérieure du robot souple restent fermés. Au-delà de cette température, les pores se dilatent, ce qui permet au fluide sous pression de s’échapper, le robot transpire.
A partir de l’étude, lorsque la température dépasse 30°C, l’eau est pressée pour s’évaporer à la surface et refroidir l’actionneur en forme de doigt. (Mishra et Coll./ Sci Robot)
Des expériences au cours desquelles le robot a été exposé au souffle d’un ventilateur ont montré que la vitesse de refroidissement était 6 fois supérieure à celle des machines qui ne transpirent pas. En fait, la performance thermorégulatrice était même meilleure que celle des humains et des chevaux (l’autre animal qui transpire, bien que de manière très différente des humains, les chevaux comptent encore principalement sur l’halètement pour se rafraîchir).
Ces robots souples ne sont toutefois pas adaptés à tous les types d’applications. La solution qui s’égoutte rend les actionneurs mous et glissants, ce qui complique la préhension/ saisis. Le robot finit également par manquer d’eau et un réservoir rechargeable n’est pas toujours une option.
C’est toujours une preuve de concept très intéressante qui montre que vous n’avez pas besoin d’énormes dissipateurs thermiques et de ventilateurs de refroidissement pour maintenir la température d’un robot à des niveaux optimaux.
L’étude publiée dans Science Robotics : Autonomic perspiration in 3D-printed hydrogel actuators et présentée sur le site de l’université Cornell : Researchers create 3D-printed, sweating robot muscle.