Seulement 3 % des terres de la planète peuvent encore être qualifiées d’écologiquement intactes
Selon de nouvelles recherches, seulement entre 2 et 3 % des terres de la planète peuvent encore être qualifiées “d’écologiquement intactes », avec des habitats non perturbés et des populations saines de leurs espèces animales d’origine.
Image d’entête : la chaîne de montagnes Brooks s’étend à travers le nord de l’Alaska. Les forêts boréales d’Amérique du Nord sont parmi les plus grandes zones où l’impact humain est relativement faible. (Jason Riggio/ UC Davis)
C’est un tableau bien plus sombre que celui dressé par les précédentes analyses, qui évaluaient ce pourcentage bien plus haut, estimant que 20 à 40 % des terres étaient encore intactes. Mais ces analyses, axées spécifiquement sur l’intégrité de l’habitat, étaient principalement basées sur l’imagerie satellitaire, qui fournit peu de détails sur ce qui se passe au sol.
Le travail de terrain effectué par de nombreuses personnes montre clairement que certaines espèces ont disparu de ces zones d’habitats intacts, notamment les carnivores de grande et moyenne taille et les herbivores de grande et moyenne taille. Certaines ont été perdues ou réduites en nombre à cause de la chasse, d’autres à cause de l’introduction d’espèces invasives, comme les chats et les chiens, et d’autres encore à cause de maladies, selon les chercheurs.
Au lieu de se contenter d’examiner des images aériennes pour l’étude publiée cette semaine (lien plus bas), Andrew J Plumptre, premier auteur de l’étude à l’université de Cambridge et son équipe ont également superposé des cartes de la destruction des écosystèmes par l’humain avec des cartes indiquant les endroits où les espèces animales sont soit trop peu nombreuses pour maintenir un écosystème sain, soit ont complètement disparu de leurs aires de répartition d’origine.
Pour évaluer le niveau d’intégrité (du caractère intact), les auteurs ont utilisé trois critères. Comme les études précédentes, ils ont examiné l’intégrité de l’habitat, une mesure de l’influence de l’humain sur ces derniers. Ils ont également examiné l’intégrité de la faune, qui est un indicateur du nombre d’espèces originelles d’une terre qui ont disparu depuis longtemps (plus précisément depuis 1500 de notre ère). Enfin, ils ont évalué l’intégrité fonctionnelle, qui détermine où les espèces sont abondantes et capables de remplir leurs rôles écologiques de prédateurs supérieurs, de disperseurs de graines ou d’autres fonctions. Selon ces deux dernières mesures, les écosystèmes terrestres ne se portent pas très bien.
Selon Plumptre :
L’intégrité faunistique représentait 2,9 % de la surface terrestre et l’intégrité fonctionnelle 2,8 %. Cela signifie qu’environ 97 % des terres ont été bouleversées par l’industrie, la chasse, l’introduction d’espèces envahissantes ou d’autres impacts anthropiques.
Les écosystèmes intacts que l’équipe a identifiés se trouvent au Congo, en Tanzanie, dans la forêt amazonienne, en Sibérie et dans le sud du Chili.
Plus troublant encore, l’équipe a constaté que seulement 11 % des terres écologiquement intactes qu’elle a identifiées sont protégées par les lois de conservation des pays. Une proportion encore plus faible, à savoir 4 %, est couverte par des zones essentielles à la biodiversité, c’est-à-dire des zones où, selon l’Union internationale pour la conservation de la nature, il est particulièrement important de préserver la vie sauvage.
Tout n’est pas perdu, cependant. Les chercheurs ont constaté que la disparition de certaines espèces clés, en particulier les grands mammifères, est un élément essentiel qui manque à de vastes zones de terres par ailleurs intactes. Certains de ces grands mammifères se sont complètement éteints, mais d’autres survivent encore ailleurs. Dans ces cas-là, les auteurs affirment que la réintroduction d’un petit nombre (entre une et cinq) d’espèces jouant un rôle crucial dans certaines zones pourrait permettre à 20 % des terres de la planète de retrouver leur intégrité écologique.
Les auteurs identifient six endroits importants dans le monde où cette méthode pourrait porter ses fruits : la Russie orientale, le nord du Canada, l’Alaska, la forêt amazonienne, le désert du Sahara et la forêt tropicale du Congo. Dans ces régions, bien que les populations d’espèces aient diminué, il reste encore beaucoup de feuillage et d’habitat d’origine pour accueillir les animaux s’ils sont réintroduits.
L’étude soutient que nous avons besoin de changer notre façon de penser en matière de santé écologique. À l’heure actuelle, selon les chercheurs, la restauration est principalement axée sur la remise en état des habitats dégradés. C’est important, mais ce n’est pas suffisant.
Selon Plumptre :
Nous devrions également penser à restaurer les espèces pour retrouver l’intégrité écologique sur une plus grande partie de la planète.
L’étude publiée dans Frontiers in Forests and Global Change : Where Might We Find Ecologically Intact Communities? et présentée dans la revue Frontiers : 97% of Earth’s land area may no longer be ecologically intact.