Un implant électronique traduit directement en mots et en phrases l’activité cérébrale d’un homme paralysé
À la suite d’un terrible accident de voiture, un jeune homme de 20 ans a été victime d’une attaque du tronc cérébral qui l’a paralysé et privé de la parole. Dix-huit ans après son accident, l’homme est désormais capable de communiquer avec le monde extérieur grâce à un implant médical qui convertit les ondes cérébrales en phrases sur un ordinateur. Bien qu’il ne s’agisse que d’une preuve de concept/ faisabilité, ces travaux de recherche sont extrêmement prometteurs et laissent penser qu’il sera peut-être possible un jour de redonner des capacités sophistiquées de communication aux personnes qui ont perdu la parole à la suite de leur accident.
Image d’entête : la personne handicapée réalisant les tests d’écriture par la pensée avec l’implant cérébral. (Université de Californie à San Francisco)
Selon le Dr Edward Chang, neurochirurgien à l’université de Californie à San Francisco :
La plupart d’entre nous considèrent comme acquise la facilité avec laquelle nous communiquons par la parole. C’est excitant de penser que nous sommes au tout début d’un nouveau chapitre, d’un nouveau domaine.
Les personnes paralysées et souffrant d’un trouble de la parole ont des options très limitées pour communiquer. Le patient mentionné dans cette nouvelle recherche, par exemple, communiquerait à l’aide d’un pointeur attaché à une casquette de baseball dans un mouvement de pointage sur un écran tactile pour taper des mots ou des lettres. D’autres patients, qui ne peuvent même pas se servir de leur cou, utilisent des appareils qui suivent les mouvements des yeux et les traduisent en un mouvement de curseur pour sélectionner des mots ou des lettres sur un écran d’ordinateur.
Si ces options permettent aux patients paralysés d’avoir un semblant de connexion avec le monde extérieur, elles sont terriblement lentes. C’est là qu’interviennent les interfaces cerveau-ordinateur. Leur capacité à transformer l’activité neuronale en un potentiel d’action est pour le moins impressionnante.
Ces interfaces comprennent des implants qui transforment les pensées d’un patient imaginant qu’il écrit une phrase à la main avec un stylo en une phrase réelle sur un écran d’ordinateur. Les interfaces cerveau-ordinateur peuvent également être utilisées par des patients paralysés pour contrôler des bras mécaniques, des exosquelettes et même des drones. Ces interfaces peuvent également faciliter un échange d’informations de type télépathique entre deux personnes.
Plutôt que de fabriquer une prothèse contrôlée par la pensée, les travaux de Chang et de ses collègues portent sur une neuroprothèse de la parole. Ce dispositif convertit les ondes cérébrales qui contrôlent normalement les mouvements subtils des lèvres, de la mâchoire, de la langue et du larynx pour transformer les sons en mots ou en phrases complètes sur un écran d’ordinateur.
Les électrodes de la neuroprothèse qui a été implantée dans la boite crânienne du jeune homme paralysé. (Université de Californie à San Francisco)
Après avoir implanté des électrodes à la surface de la zone du cerveau du patient responsable du contrôle de la parole, l’algorithme de l’ordinateur a été entraîné à l’aide de modèles neuronaux lorsque l’homme a tenté de prononcer des mots courants tels que « eau » ou « bien ». L’entraînement s’est déroulé au cours de 50 sessions espacées sur près de deux ans.
L’algorithme a ainsi appris à associer des schémas d’ondes cérébrales spécifiques à 50 mots pouvant être utilisés pour former plus de 1 000 phrases. Auparavant, le laboratoire de Chen avait passé des années à cartographier les zones du cerveau responsables de la parole, il avait donc une grande expérience.
Par exemple, lorsqu’on lui a posé des questions telles que « Comment allez-vous aujourd’hui ? » ou « Avez-vous soif ? », l’homme a répondu « Je vais très bien » ou « Non, je n’ai pas soif » en utilisant la communication textuelle permise par l’appareil qui lisait ses pensées.
Il faut 3 à 4 secondes pour que les mots pensés par le patient apparaissent sur l’écran de l’ordinateur. Ce n’est pas aussi rapide que de parler, mais beaucoup plus rapide que de tapoter une réponse, expliquent les chercheurs dans leur étude (lien plus bas).
Le prototype pourrait être perfectionné et transformé en un appareil destiné à aider les personnes souffrant de blessures, d’accidents vasculaires cérébraux ou de maladies telles que la sclérose latérale amyotrophique, qui interfère avec la transmission des messages du cerveau au tractus vocal.
Les chercheurs prévoient d’améliorer la vitesse, la précision et la taille du vocabulaire de leur algorithme. L’objectif est de disposer d’un appareil qui génère de la voix plutôt que du texte sur un écran.
L’étude publiée dans la revue New England Journal of Medicine : Neuroprosthesis for Decoding Speech in a Paralyzed Person with Anarthria et présentée sur le site de l’Université de Californie à San Francisco : “Neuroprosthesis” Restores Words to Man with Paralysis.