Le télescope spatial Hubble a trouvé une étoile impliquée dans la mort de sa compagne
Une équipe internationale d’astronomes a utilisé les observations du télescope spatial Hubble pour confirmer l’existence d’une étoile accompagnant une supernova. Cette découverte lève un mystère sur la chimie des supernovas et aide les chercheurs à comprendre le fonctionnement des étoiles binaires géantes.
Image d’entête : représentation artistique de la supernova 2013ge et de son étoile associée. (NASA, ESA, Leah Hustak (STScI))
Les supernovæ sont de vastes explosions dans l’espace, créées à la fin de la vie d’une étoile. Elles transportent des couches d’éléments autour d’elles, avec de l’hydrogène gazeux à l’extrême limite. S’il n’y a pas d’hydrogène autour d’une supernova, comme c’est le cas pour la supernova 2013ge, quelque chose a dû l’extraire avant l’explosion.
Alors qu’est-ce qui pourrait siphonner l’hydrogène ? Les chercheurs pensent qu’il s’agit d’une étoile voisine qui était cachée par la luminosité de la supernova.
Selon Ori Fox, astronome au Space Telescope Science Institute de Baltimore, aux États-Unis, et auteur principal d’une étude décrivant cette recherche :
C’était le moment que nous attendions : voir enfin la preuve qu’un système binaire est à l’origine d’une supernova entièrement dépouillée.
Les chercheurs ont utilisé la caméra à large champ 3 de Hubble pour étudier la région de la supernova 2013ge en lumière ultraviolette, ainsi que pour examiner des images archivées de la supernova en train de s’éteindre, comme elle l’a fait de 2016 à 2020.
Les images Hubble de la galaxie NGC 3287 montrent la supernova 2013ge qui s’estompe au fil du temps, révélant la source constante de lumière ultraviolette que les astronomes ont identifiée comme étant son étoile binaire compagne. (Ori Fox (STScI)/ Joseph DePasquale (STScI))
Une source voisine de lumière ultraviolette est restée brillante alors que la supernova s’est estompée, ce qui a conduit les chercheurs à soupçonner la présence d’une deuxième étoile.
Selon la coauteure Maria Drout, chercheuse à l’Université de Toronto, au Canada :
Au cours des dernières années, de nombreuses pistes nous ont indiqué que les supernovae dépouillées sont probablement formées dans des binaires, mais nous n’avions pas encore vu la compagne.
L’étude des explosions cosmiques s’apparente à la science médico-légale : il s’agit de rechercher des indices et de voir quelles théories correspondent. Grâce à Hubble, nous sommes en mesure de voir cela directement.
Les chercheurs affirment que cela renforce la théorie croissante selon laquelle la plupart des étoiles massives se développent sous forme de systèmes binaires.
D’après les images de Hubble, l’étoile compagne a été « bousculée » mais pas autrement perturbée par la supernova de 2013ge. Elle est cependant tout aussi massive et se dirige probablement vers le même destin que sa partenaire. Un jour, elle explosera et formera sa propre supernova, avant de s’effondrer en étoile à neutrons ou en trou noir.
À partir de là, elle pourrait être projetée loin de sa partenaire, ce qui, selon les chercheurs, expliquerait pourquoi nous voyons parfois des supernovae solitaires. Elle pourrait aussi continuer à tourner autour de sa compagne morte, pour finalement fusionner et émettre des ondes gravitationnelles. Mais il faudra un peu de patience pour le découvrir.
L’évolution que les astronomes proposent pour la supernova 2013ge : deux étoiles commencent en orbite, l’une puis l’autre devient une supernova, ce qui donne deux étoiles à neutrons en orbite. (NASA, ESA, Leah Hustak (STScI))
Selon Fox :
Avec la partenaire survivante de SN 2013ge, nous pourrions potentiellement voir la préquelle d’un événement d’ondes gravitationnelles, bien qu’un tel événement soit encore dans un avenir d’environ un milliard d’années.
Les chercheurs vont essayer de trouver d’autres étoiles accompagnant des supernovas endeuillées avec l’aide du télescope spatial Hubble.
Il y a un grand potentiel au-delà de la simple compréhension de la supernova elle-même. Comme nous savons maintenant que la plupart des étoiles massives de l’univers se forment en paires binaires, il est nécessaire d’observer les étoiles compagnes survivantes pour mieux comprendre les détails de la formation binaire, de l’échange de matière et du développement co-évolutif.
L’étude publiée dans The Astrophysical Journal Letters : The Candidate Progenitor Companion Star of the Type Ib/c SN 2013ge et présentée sur le site de la NASA : Hubble Reveals Surviving Companion Star in Aftermath of Supernova.