Les araignées de mer présentent une étonnante capacité à régénérer des parties presque complètes de leur corps
Des crabes aux lézards, certains animaux sont capables de faire repousser leurs tentacules, leurs queues ou leurs griffes amputées lors d’une attaque de prédateurs. Bien que ces capacités soient impressionnantes, les araignées de mer vont encore plus loin en étant capables de faire repousser certaines parties de leur corps après une amputation, ce qui pourrait inspirer de nouvelles recherches sur la régénération.
Image d’entête, à partir de l’étude : cette araignée de mer adulte (Pycnogonum litorale), au microscope, s’est complètement rétablie après avoir été amputée de la moitié arrière de son corps. (G. Brenneis et col./ PNAS)
Malgré leur présence dans tous les océans, les araignées de mer sont très peu étudiées. On en connaît environ 1 500 espèces, notamment dans les régions polaires. On les trouve dans les flaques de marée et sur le fond des océans. Ils ont surtout des pattes (généralement huit) et n’ont pas de poumons, s’approvisionnant en oxygène grâce à leur exosquelette.
Jusqu’à présent, rien qui sorte de l’ordinaire. Mais c’est là que les choses commencent à changer.
Des chercheurs allemands de l’université de Greifswald et de l’université Humboldt de Berlin ont découvert que ces créatures peuvent régénérer des parties complètes de leur moitié inférieure, comme les muscles, les organes reproducteurs et l’anus, ou vivre sans.
L’araignée de mer Pycnogonum litorale. (Wikimedia)
Dans leur étude, l’équipe de chercheurs a amputé différents membres postérieurs et parties postérieures d’un groupe de 23 araignées de mer immatures et adultes Pycnogonum litorale. Bien que les parties du corps des adultes ne se soient pas régénérées, certaines sont restées en vie deux ans plus tard. Pendant ce temps, les araignées juvéniles présentaient une régénération complète ou quasi-complète des parties du corps.
Cela comprenait les muscles, des parties des organes reproducteurs, l’intestin postérieur et l’anus. Les chercheurs ont constaté que plus de 90 % des araignées de mer ont survécu durablement et que 16 des jeunes araignées ont mué au moins une fois. Ils ont également observé une repousse du postérieur chez 14 des jeunes araignées de mer, alors qu’aucun des spécimens adultes n’a mué ou s’est régénéré.
A partir de l’étude : l’image A présente une araignée de mer juvénile après l’amputation du dernier quart de son corps, dont deux pattes et le tubercule anal. Le tubercule anal contient l’intestin postérieur de l’animal et son anus. L’image B présente le même animal qui a retrouvé tous ses membres après sa troisième mue. (G. Brenneis et col./ PNAS)
Les capacités de régénération varient dans le règne animal, de nombreuses créatures étant capables de régénérer entièrement au moins certains membres. Les vers plats, par exemple, ont la capacité de régénérer leur corps à partir de quelques cellules seulement. L’année dernière, des chercheurs ont pu faire repousser une patte perdue d’une grenouille africaine à griffes (lien ci-dessous), incapable de régénérer naturellement ses membres, en utilisant des médicaments.
Les vertébrés, y compris les humains, n’ont pratiquement aucune capacité de régénération, à quelques exceptions près. Les lézards peuvent faire repousser leur queue, par exemple. Les humains sont en mesure de reconstituer leur foie après l’avoir coupé en deux, et les enfants sont également en mesure de reconstituer l’extrémité de leurs doigts. En revanche, la perte d’un membre ne peut être restaurée naturellement chez aucun mammifère.
Les chercheurs ont déclaré que leurs résultats pourraient conduire à de nouvelles recherches dans ce domaine. Selon Scholtz, il existe de nombreuses espèces différentes qui peuvent être testées comme ils l’ont fait avec les araignées de mer. La prochaine étape pourrait selon lui consister à découvrir le mécanisme à l’origine de la repousse, en déterminant ce qui se passe au niveau cellulaire et moléculaire.
Selon Scholtz :
Peut-être qu’il y a des cellules souches impliquées qui sont des cellules indifférenciées qui peuvent assumer une nouvelle forme et un nouveau destin ?. Au final, peut-être que les mécanismes que nous détectons chez les arthropodes pourront contribuer aux traitements médicaux de la perte d’un membre ou d’un doigt et ainsi de suite chez les humains. C’est toujours l’espoir.
L’étude publiée dans PNAS : The sea spider Pycnogonum litorale overturns the paradigm of the absence of axial regeneration in molting animals.