Les premières sociétés andines ont basculé dans la violence sous l’effet du changement climatique
L‘augmentation des températures s’accompagne d’une augmentation de la violence. C’est du moins la conclusion à laquelle sont parvenus des chercheurs en étudiant la manière dont les anciennes cultures du centre-sud de la cordillère des Andes ont réagi au changement climatique il y a environ 1 000 ans. Il pourrait également s’agir d’une importante mise en garde.
Image d’entête : à leur apogée, les Wari (civilisation du Ve siècle des Andes du sud du Pérou actuel) honoraient leurs morts avec des enveloppes en tissu et des masques funéraires. (AP Photo/ Karel Navarro)
Hausse du niveau des mers, une troposphère en expansion, une augmentation de la propagation des moustiques porteurs de maladies, des saisons d’allergie encore plus rudes et des rythmes de sommeil perturbés. Comme si nous n’avions pas déjà assez à craindre du changement climatique, une nouvelle étude de l’Université de Californie à Davis (UC Davis/ États-Unis) indique que lorsque le climat s’est modifié entre l’an 470 et l’an 1500, la violence a augmenté parmi les populations du centre-sud des Andes. Si les mêmes tendances se confirment aujourd’hui, alors que le monde connaît des changements climatiques spectaculaires, des affrontements brutaux pourraient avoir lieu, à l’instar du film dystopique « Mad Max », sorti en 1979…
La cordillère des Andes à 35 000 pieds (10 600 m) d’altitude. (Wikimedia)
Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs de l’UC Davis ont étudié les données issues de l’examen de 2 753 fractures de crânes provenant de restes humains récoltés sur 58 sites archéologiques. Ils ont ensuite utilisé les archives de l’état de la glace de la calotte glaciaire de Quelccaya, situé dans les actuels Chili, Pérou et Bolivie, pour cartographier le climat. Ils ont constaté que pour chaque diminution de 10 cm de l’accumulation annuelle de glace causée par l’augmentation des températures de ce que l’on appelle l’optimum climatique médiéval, le niveau de violence entre les personnes a plus que doublé. Ils ont conclu cela en se basant sur le nombre de blessures à la tête trouvées dans les archives fossiles, une mesure fréquemment utilisée par les archéologues pour étudier la violence culturelle.
Les Andes centrales du sud et les sites inclus dans cette étude. Les courbes de niveau sont présentes à 500 m d’altitude et à 3000 m d’altitude, définissant les échantillons côtiers, de moyenne altitude et de haute montagne (U.S. Geological Survey / Université de Californie à Davis)
Il est intéressant de noter que l’augmentation de la violence, qui pourrait avoir été causée non seulement par l’augmentation des températures, mais aussi par une diminution des précipitations due à la modification des conditions météorologiques, n’a été observée que dans les communautés vivant sur les hauts plateaux andins. La même tendance n’a pas été observée dans les communautés vivant à moyenne altitude et dans les zones côtières, ce qui a conduit les chercheurs à émettre l’hypothèse que les conditions de sécheresse n’affectaient que les zones les plus élevées ou que les communautés vivant plus bas dans les montagnes avaient trouvé des solutions pacifiques au changement climatique.
Selon les chercheurs :
Cette disparité résulte probablement de stratégies économiques et sociopolitiques variables selon l’altitude. L’échec de l’agriculture pluviale pendant les périodes de sécheresse et la dissolution concomitante des politiques d’organisation ont probablement prédisposé les populations des hautes terres au stress socio-économique et à la concurrence violente pour des ressources limitées. À l’inverse, la diversité des économies des basses et moyennes terres a pu atténuer les effets de la sécheresse.
L’étude publiée dans la revue Quaternary Research : Climate change intensified violence in the south-central Andean highlands from 1.5 to 0.5 ka et présentée sur le site de l’Université de Californie à Davis : Climate Change Likely Led to Violence in Early Andean Populations.