Les voyages dans l’espace altèrent le système immunitaire des astronautes en modifiant leurs gènes
Une nouvelle étude montre que les rigueurs des voyages dans l’espace modifient l’expression des gènes d’un astronaute, ce qui compromet son système immunitaire et le rend vulnérable aux infections, en particulier lors de son retour sur Terre.
Image d’entête : l’astronaute Thomas Pesquet insère des échantillons de sang pour le projet MARROW (étudié ici) dans le congélateur “Minus Eighty-Degree Laboratory” à bord de l’ISS. (NASA)
L’espace est l’environnement des extrêmes qui peut exposer les astronautes à toutes sortes de risques, y compris des risques sanitaires. Il est prouvé que les vols spatiaux de courte et de longue durée ont un effet négatif sur de nombreuses fonctions physiologiques, principalement en raison du passage d’un environnement de microgravité à un autre, ce qui entraîne un déplacement des fluides dans le corps.
Le tout dernier exemple en date :
De précédentes études ont examiné l’impact des vols spatiaux sur le système immunitaire de l’organisme. Même pendant les missions Apollo des années 1960 et 1970, il a été observé qu’un peu plus de la moitié des astronautes tombaient malades, souffrant de rhumes ou d’autres infections, dans la semaine qui suivait leur retour sur Terre. Les preuves suggérant que les voyages dans l’espace affaiblissent le système immunitaire, des chercheurs de l’université d’Ottawa, au Canada, ont cherché à comprendre les causes de cet affaiblissement par le biais d’une étude désignée MARROW.
Ils ont étudié l’expression génétique dans les globules blancs (leucocytes) de 14 astronautes ayant séjourné à bord de la Station spatiale internationale (ISS) pendant 4 mois et demi à 6 mois et demi entre 2015 et 2019. Des échantillons de sang ont été prélevés sur chaque astronaute à dix reprises : une fois avant le vol, quatre fois pendant le vol et cinq fois à leur retour sur Terre.
Le Dr David Saint-Jacques a subi une prise de sang à bord de la Station spatiale internationale dans le cadre du projet MARROW. (NASA/ Université d’Ottawa)
Les chercheurs ont trouvé 15 410 gènes différentiellement exprimés dans les leucocytes et, parmi ceux-ci, ils ont identifié deux groupes dont l’expression a changé au cours de la période. Les deux groupes de gènes étaient principalement constitués de gènes codant pour des protéines, mais ils présentaient des différences. La fonction du premier groupe de gènes était principalement liée à l’immunité, tandis que le second était lié aux structures et fonctions cellulaires.
Les chercheurs ont observé que l’expression du premier groupe de gènes était réduite lorsque les astronautes atteignaient l’espace et augmentait de nouveau lorsqu’ils étaient sur Terre, alors que l’inverse était observé pour le second groupe de gènes.
Selon Odette Laneuville, une des auteures de l’étude :
Nous montrons ici que l’expression de nombreux gènes liés aux fonctions immunitaires diminue rapidement lorsque les astronautes se rendent dans l’espace, alors que l’inverse se produit lorsqu’ils reviennent sur Terre après six mois à bord de l’ISS.
Selon les chercheurs, ces résultats indiquent que les voyages dans l’espace entraînent une diminution rapide de la puissance du système immunitaire.
Selon Guy Trudel, un autre coauteur de l’étude :
Une immunité affaiblie augmente le risque de maladies infectieuses, ce qui limite la capacité des astronautes à accomplir leurs missions exigeantes dans l’espace. Si une infection ou un trouble immunitaire devait évoluer vers un état grave nécessitant des soins médicaux, les astronautes n’auraient qu’un accès limité aux soins, aux médicaments ou à l’évacuation pendant leur séjour dans l’espace.
L’étude publiée dans la revue Frontiers in Immunology : The transcriptome response of astronaut leukocytes to long missions aboard the International Space Station reveals immune modulation et présentée sur le site de l’Université d’Ottawa : Space travel alters gene expression in white blood cells, weakening our immune system.