Un nouvel implant cérébral permet à une patiente paralysée de communiquer par l’intermédiaire d’un avatar numérique
Malgré tous les progrès réalisés dans la technologie des interfaces cérébrales, les appareils qui aident les patients gravement paralysés à communiquer sont encore extrêmement lents. Cela pourrait changer. Deux équipes de chercheurs californiens, comme le montrent deux nouvelles études, affirment avoir mis au point un dispositif qui devrait révolutionner ce domaine.
GIF d’entête, à partir de la vidéo plus bas : le fonctionnement du système d’implant cérébral avec traduction par algorithme d’IA et représentation de l’interprétation par un avatar numérique. (Université de Californie à San Francisco)
En substance, l’appareil intercepte les ondes cérébrales d’un patient, les interprète en paroles et en expressions faciales, et les extériorise sous la forme d’un avatar numérique de lui-même.
Max Dougherty, coordinateur de la recherche clinique, relie les électrodes placées sur le cerveau d’une patiente participant à l’étude à l’ordinateur qui traduit ses tentatives de parole en mots prononcés et en mouvements faciaux d’un avatar. (Noah Berger/ Université de Californie à San Francisco)
Selon Edward Chang, président du département de chirurgie neurologique de l’Université de Californie à San Francisco (UCSF) et coauteur de l’étude :
Notre objectif est de rétablir un mode de communication complet et incarné, qui est la façon la plus naturelle pour nous de parler avec les autres. Ces avancées nous rapprochent d’une véritable solution pour les patients.
Les résultats sont déjà impressionnants. L’équipe de Chang a montré que son implant cérébral peut permettre aux patients de « parler » jusqu’à 80 mots par minute, et en moyenne entre 60 et 70, simplement en pensant. Bien que ce ne soit pas aussi rapide que la parole humaine naturelle, qui peut débiter 160 mots par minute, c’est tout de même plus de trois fois le précédent record.
Une participante à l’étude du Dr Chang tente de prononcer silencieusement une phrase. Les signaux de son cerveau sont traduits en paroles synthétisées et en mouvements faciaux de l’avatar. (Noah Berger/ MIT)
L’implant repose sur un outil permettant de convertir les signaux cérébraux en texte. Pour ce faire, les chercheurs ont formé un algorithme d’intelligence artificielle sur les signaux électriques du cerveau de leur patient qui se répétait une sélection de phrases. L’algorithme a été conçu pour rechercher non pas des mots, mais des unités sonores distinctes appelées phonèmes.
Alexander Silva, coauteur de l’étude de l’UCSF, l’explique ainsi :
Si vous produisez un son P ou un son B, vous devez rapprocher vos lèvres. Cela activerait donc une certaine proportion des électrodes qui sont impliquées dans le contrôle des lèvres.
Cette étape du dispositif est également assez précise, avec un taux d’erreur de 9 %, soit trois fois moins que le taux record le plus bas. Une mise en garde s’impose : ce taux d’erreur de 9 % ne concernait qu’un vocabulaire de 50 mots. Lorsqu’ils sont parvenus à un vocabulaire de 125 000 mots, le taux d’erreur avoisinait les 24 %, ce qui reste impressionnant, mais serait sans aucun doute frustrant à utiliser.
Pour parvenir à un résultat proche de la réalité, les chercheurs ont poussé l’implant un peu plus loin en équipant un logiciel d’animation d’une IA personnalisée capable d’utiliser les signaux verbaux du patient pour simuler des expressions faciales. Associée à une reconstruction de la voix, la parole du patient peut être incarnée par un sosie numérique sur un écran voisin.
Les chercheurs ont prouvé que ce type d’appareil est du domaine du possible, du moins pour le patient spécifique pour lequel ils l’ont conçu. Les futures versions devront faire leurs preuves sur des patients atteints de toutes sortes de paralysies et, espérons-le, réduire le nombre d’erreurs, mais pour l’instant, les résultats sont prometteurs.
Les deux études publiées dans Nature :
… et présentée sur le site de l’Université de Californie à San Francisco : How Artificial Intelligence Gave a Paralyzed Woman Her Voice Back et du MIT : Brain implants helped create a digital avatar of a stroke survivor’s face.