L’aileron déchiré d’un requin se régénère un an plus tard
Un requin soyeux (Carcharhinus falciformis) photographié avec une énorme déchirure de la nageoire dorsale est réapparu avec une étonnante métamorphose près d’un an plus tard.
Image d’entête : la nageoire dorsale arrachée du requin soyeux. (Josh Schellenberg)
Le requin a d’abord été repéré au large des côtes de Floride par un photographe sous-marin et un plongeur en juillet 2022. Il manquait un énorme morceau de sa nageoire dorsale, représentant environ 20 % de l’appendice. La déchirure se trouvait à l’endroit même où la créature avait été marquée par les scientifiques.
Il semble que quelqu’un ait attrapé ce requin soyeux, peut-être par erreur au cours d’une partie de pêche, et qu’il ait délibérément enlevé sa balise avec un objet pointu. Les raisons de ce geste restent inconnues. La nageoire dorsale du requin a tellement été mutilée qu’en voyant la photo, la chercheuse Chelsea Black, de l’université de Miami, a pensé que la créature éprouverait des difficultés à suffisamment nager pour se nourrir.
À sa grande surprise, cependant, le requin est réapparu 332 jours plus tard, remarquablement remis sur pied. Il avait récupéré environ 87 % de son aileron et nageait normalement. Le requin était apparemment en bonne santé.
Ne disposant que d’images de son anatomie brute, les chercheurs ne peuvent affirmer avec certitude si ce remarquable processus de guérison est dû à l’apparition de nouveaux tissus, à la croissance de tissus cicatriciels ou à la fusion des parties limitrophes de la blessure. Mais par rapport aux photos précédentes de ce requin soyeux, la nouvelle nageoire a une coloration légèrement différente.
Progression de la cicatrisation de la nageoire dorsale en 332 jours. (Chelsea Black/ photos de Josh Schellenberg et John Moore)
Black pense que la partie supérieure de l’aileron a fusionné avec la partie inférieure et qu’il a formé un nouveau tissu au milieu, qui semble plus clair que la peau environnante. On ne sait pas si ce nouveau tissu est cartilagineux comme le reste de la nageoire ou s’il s’agit simplement d’un tissu cicatriciel.
Selon Black :
Avant cette étude, il n’existait qu’un seul autre cas documenté de régénération de la nageoire dorsale, ce qui fait de cette étude le deuxième cas de régénération de la nageoire dorsale chez le requin à la connaissance de l’auteur.
Les requins et les raies ont une capacité apparemment surnaturelle à guérir leurs blessures. Pourtant, en raison de leur mode de vie insaisissable, les scientifiques en savent très peu sur ce processus remarquablement rapide.
En 1978, une première étude a révélé que la peau des requins-nourrices et des requins léopards pouvait se régénérer au bout de trois semaines seulement. En 2017, un grand requin blanc a été documenté avec une nageoire dorsale gravement déchirée au large des côtes du Massachusetts, aux États-Unis. Quelques années plus tard, l’aileron du requin semblait avoir été recousu chirurgicalement.
Si les taux de cicatrisation chez les requins ont déjà été étudiés, la régénération complète de la nageoire dorsale est officiellement uniquement documentée chez les requins-baleines, et maintenant chez les requins soyeux. En 2006, un jeune requin-baleine mâle a été aperçu avec une nageoire dorsale brutalement amputée sur le dessus. Cinq ans plus tard, l’individu a été repéré avec une nageoire dorsale qui avait complètement repoussé, probablement à partir d’une combinaison de tissu cicatriciel et de tissu régénéré.
Black pense qu’une amputation complète entraînerait la perte totale de la nageoire. Les restes d’une certaine circulation sanguine et de tissus semblent toutefois permettre la régénération.
Les récentes observations faites en Floride suggèrent que d’autres espèces, comme le requin soyeux, peuvent également réaliser des prouesses similaires, du moins dans certaines situations.
Toujours selon Black :
Bien que l’incident de la blessure reste décourageant, le résultat a fourni une occasion extraordinaire d’étudier les capacités de guérison et de régénération des requins soyeux à la suite de blessures naturelles ou provoquées par l’homme.
Elle espère apercevoir à nouveau le requin soyeux pour voir comment il s’en sort dans les années à venir.
L’étude publiée dans le Journal of Marine Sciences : Resilience in the Depths: First Example of Fin Regeneration in a Silky Shark (Carcharhinus falciformis) following Traumatic Injury.