Des astronomes pensent avoir été témoins de la naissance d’un trou noir
Un astronome amateur, un bon timing et une étoile accompagnatrice se sont unis pour apporter la preuve directe qu’une supernova peut forme un objet semblable à un trou noir ou à une étoile à neutrons.
Image d’entête : représentation artistique d’un objet compact et de l’étoile bouffie qui l’accompagne. (ESO/L. Calçada)
Il s’agit d’un événement majeur pour la communauté astronomique, car c’est la première fois que des chercheurs ont pu observer ce processus en temps réel.
Selon Ping Chen, chercheur à l’Institut Weizmann des sciences en Israël et auteur principal de l’étude (lien plus bas) :
Nos recherches s’apparentent à la résolution d’un puzzle en rassemblant toutes les preuves possibles. Toutes les pièces qui s’alignent mènent à la vérité.
L’histoire commence par la découverte d’un nouvel objet brillant par un astronome amateur sud-africain, Berto Monard. Il a trouvé cet objet, désigné SN 2022jli, dans le bras spiral d’une galaxie appelée NGC 157, située à environ 76 millions d’années-lumière.
L’apparition d’un nouvel objet brillant dans le ciel suggère la présence d’une supernova. Les astronomes se sont donc empressés de braquer leurs télescopes sur cet objet, en s’appuyant sur d’autres études pour confirmer sa position et d’autres informations. Les supernovas sont difficiles à étudier, car elles sont impossibles à prévoir et disparaissent rapidement.
Une supernova est l’explosion violente d’une étoile à sa mort. Elles s’effondrent sous l’effet de leur propre gravité et l’explosion qui en résulte peut parfois être aussi brillante que des galaxies entières, jusqu’à ce qu’elle s’estompe à nouveau. Les trous noirs et les étoiles à neutrons, deux objets très denses produits par l’effondrement d’étoiles, sont les éléments dont les scientifiques sont presque certains qu’ils se produisent ensuite. Mais bien que nous ayons déjà vu des supernovas, cette étape (de la supernova à l’objet compact) n’a jamais été directement associée.
Représentation artistique d’une étoile d’un système binaire survivant à la supernova de l’étoile qui l’accompagne. (ESO/L. Calçada)
SN 2022jli n’a pas respecté les règles spatiales habituelles. Elle a commencé par être brillante, puis a lentement commencé à s’assombrir, avant de s’éclaircir à nouveau un mois après sa découverte, puis de créer d’étranges fluctuations tous les 12 jours environ pendant les 200 jours qui ont suivi.
Selon Thomas Moore, de l’université Queen’s de Belfast, dont l’étude de la supernova a été publiée l’année dernière :
Dans les données de SN 2022jli, nous observons une séquence répétitive d’éclaircissement et d’affaiblissement. C’est la première fois que des oscillations périodiques répétées, sur plusieurs cycles, ont été détectées dans la courbe de lumière d’une supernova.
Les deux équipes pensent qu’une deuxième étoile, qui a survécu à l’explosion de la supernova, est la coupable, et c’est ce qui leur a permis de « voir » l’objet compact. Les équipes supposent que le trou noir ou l’étoile à neutrons volerait de l’hydrogène à l’atmosphère « gonflée » de cette étoile, et qu’il s’agirait d’un « trou noir » ou d’une étoile à neutrons. Ce vol, ou accrétion, libère beaucoup d’énergie sous forme d’ondes, qui constituent les oscillations captées par les chercheurs.
Représentation artistique du processus qui a conduit à SN 2022jli, et de son étrange évolution. (ESO/L. Calçada)
Selon les chercheurs dans leur étude :
Les propriétés sans précédent de SN 2022jli indiquent que tout ce qui se passe dans le système devrait être un phénomène rare, ce qui pourrait s’expliquer par la rareté d’un système binaire lié survivant à l’explosion d’une supernova. SN 2022jli établit un lien direct entre l’explosion d’une supernova et la formation d’un objet compact.
L’étude publiée dans Nature : A 12.4-day periodicity in a close binary system after a supernova et présentée sur le site de l’Observatoire Européen Austral : Le chaînon manquant est découvert : les supernovae donnent naissance à des trous noirs ou à des étoiles à neutrons.