Des scientifiques inventent une caméra qui permet de voir comment les animaux perçoivent les couleurs
Vous êtes-vous déjà demandé à quoi ressemble le monde pour un animal ? Un nouvel appareil photo a été mis au point pour reproduire en temps réel les couleurs perçues par différents animaux.
Image d’entête, à partir de l’étude : coloration UV pigmentaire et structurelle sur un spécimen de papillon Phoebis philea en fausses couleurs. Le plus petit spécimen en haut à droite montre ce qu’un humain verrait (V. Vasas et col./ PLOS Biology)
Les animaux voient différentes gammes de couleurs. Tout dépend des cellules coniques de la rétine de l’animal qui détectent les couleurs. Les humains ont trois cônes pour percevoir les longueurs d’onde de la lumière rouge, verte et bleue. La combinaison de ces longueurs d’onde produit la pléthore de belles teintes que nous pouvons apprécier. Bien entendu, tous les êtres humains n’ont pas des cônes parfaitement fonctionnels, ce qui entraîne un daltonisme ou une déficience de la vision des couleurs.
Certains animaux voient moins bien les couleurs que les humains. Les chiens, par exemple, voient beaucoup mieux les bleus et les jaunes que les violets, les verts, les rouges et les oranges. Les chats ont deux cônes de détection des couleurs pour voir les longueurs d’onde de la lumière bleu-violet et jaune-vert, mais pas le rouge-orange. Certains animaux peuvent voir au-delà du « spectre visible » de la gamme des couleurs humaines. Les colibris et les abeilles, par exemple, peuvent voir dans la partie ultraviolette du spectre, ce qui les aide à trouver du nectar.
Comme nous ne pouvons pas voir la lumière ultraviolette (UV), nous ne pouvons même pas imaginer les couleurs que ces animaux peuvent voir. On peut affirmer cela en examinant les cônes de la rétine d’un animal. Mais c’est autre chose que de voir le monde tel que le perçoivent ces cônes et c’est ce qu’une nouvelle caméra se propose de faire.
A partir de l’étude : le nouveau système de caméra de l’équipe a été utilisé pour représenter la vision des couleurs d’un oiseau sensible aux UV de trois papillons Coliades de la luzerne (Colias eurytheme) dans leur environnement naturel. L’encadré intérieur montre ce qu’une personne normale verrait. (Daniel Hanley/ V. Vasas et col./ PLOS Biology)
Les méthodes traditionnelles de production d’images en « fausses couleurs » pour montrer le monde comme le perçoivent les animaux prennent souvent beaucoup de temps. Cette nouvelle caméra peut capturer des vidéos d’objets en mouvement vus par les animaux sous un éclairage naturel.Elle est décrite en détail dans une étude publiée cette semaine (lien plus bas).
Selon l’auteur principal, Daniel Hanley, professeur adjoint de biologie à l’université George Mason, aux États-Unis :
Nous sommes depuis longtemps fascinés par la façon dont les animaux voient le monde. Les techniques modernes d’écologie sensorielle nous permettent de déduire comment des scènes statiques peuvent apparaître à un animal ; cependant, les animaux prennent souvent des décisions cruciales sur des cibles en mouvement (par exemple, détection de nourriture, évaluation de la présentation d’un partenaire potentiel, etc.) .
La caméra enregistre la vidéo dans 4 canaux de couleur différents : bleu, vert, rouge et UV. Les données sont traitées puis retraitées sur la base des connaissances existantes sur les photorécepteurs des yeux de l’animal, créant ainsi une représentation précise de la vision de l’animal.
Un exemple, à partir de l’étude : un arc-en-ciel à travers les yeux de 4 animaux différents. Arc-en-ciel en fausses couleurs (A) de souris, (B) d’abeilles et (C) d’oiseaux, à côté d’une vidéo (D) avec des couleurs standard (c’est-à-dire des couleurs humaines). (V. Vasas et col./ PLOS Biology)
En comparaison avec les méthodes spectrophotométriques traditionnelles, l’équipe a constaté que les images en temps réel qu’elle a capturées étaient précises à 92 %.
Selon les chercheurs :
Le système de caméra et le logiciel associé permettront aux écologistes d’étudier la façon dont les animaux utilisent les couleurs dans les manifestations comportementales dynamiques, la façon dont l’éclairage naturel modifie les couleurs perçues, et d’autres questions qui sont restées sans réponse jusqu’à présent en raison d’un manque d’outils appropriés. Enfin, il offre aux scientifiques et aux réalisateurs de films une nouvelle approche empirique pour dépeindre les mondes perceptifs des animaux non humains.
L’étude publiée dans PLOS Biology : Recording animal-view videos of the natural world using a novel camera system and software package.