Le tabagisme affecte le système immunitaire pendant des années après avoir arrêté
Une étude portant sur les réponses immunitaires de 1 000 personnes révèle que l’impact de la cigarette sur le système immunitaire persiste longtemps après la dernière taffe.
Cette analyse, publiée cette semaine (lien plus bas) s’inscrit dans le cadre d’un effort visant à déterminer pourquoi les réponses immunitaires varient autant d’une personne à l’autre. Outre le tabagisme, l’étude montre que le fait d’avoir un indice de masse corporelle plus élevé et d’avoir déjà été infecté par un virus typiquement bénin, le cytomégalovirus, a également une incidence sur la réponse immunitaire. Cela souligne l’importance de prendre en compte non seulement les effets immédiats, mais aussi les conséquences durables des choix de mode de vie sur la fonction immunitaire.
La COVID-19 a mis en évidence la diversité de réponses immunitaires, certaines personnes tombant gravement malades après une infection par le SRAS-CoV-2, alors que d’autres ne présentaient aucun symptôme. De précédentes études ont mis en évidence l’importance du sexe, de la génétique et de l’âge pour expliquer une partie de cette diversité des réponses immunitaires, mais le rôle d’autres facteurs n’a pas encore été entièrement défini.
Violaine Saint-André, biologiste informaticienne à l’Institut Pasteur de Paris, et ses collègues ont analysé des échantillons de sang et des questionnaires recueillis par le Milieu Intérieur Consortium* auprès de 1 000 personnes en bonne santé vivant en Bretagne, en France. Les chercheurs ont exposé les échantillons de sang à des molécules, des microbes et des virus connus pour activer le système immunitaire. Ils ont ensuite mesuré l’effet de chaque molécule sur la production de protéines appelées cytokines, qui régulent les réponses inflammatoires de l’organisme.
* Le projet Milieu Intérieur vise à analyser le système immunitaire humain en examinant les facteurs génétiques et environnementaux contribuant à la variabilité des réponses immunitaires.
Les auteurs ont combiné ces résultats avec des informations sur 136 caractéristiques personnelles tirées de données démographiques, environnementales et cliniques. Ils ont constaté que trois traits se distinguaient par des associations particulièrement fortes avec les réponses des cytokines : la consommation de cigarettes, l’indice de masse corporelle et une infection antérieure par le cytomégalovirus.
Les données relatives à la consommation de cigarettes furent particulièrement frappantes : l’effet du tabagisme sur les réponses cytokiniques était aussi important que les effets de l’âge, du sexe et de la génétique. Et ces effets persistaient des années après que les participants aient cessé de fumer. Mme Saint-André et son équipe ont découvert que ces facteurs étaient en corrélation avec les caractéristiques des marqueurs chimiques, appelés groupes méthyles, qui ont été ajoutés à l’ADN des cellules dans certaines régions. L’ajout de ces groupes méthyles peut modifier l’activité des gènes.
L’étude doit encore être répétée pour s’assurer que les résultats sont généralisables, précise les chercheurs. Et, à l’avenir, elle devrait inclure un groupe de participants plus diversifié sur le plan ethnique et racial. L’équipe a maintenant élargi son étude pour inclure des participants du Sénégal et de Hong Kong. Les chercheurs sont également retournés voir les participants initiaux afin de prélever des échantillons de sang sur 415 d’entre eux, dix ans après les prélèvements initiaux.
L’étude publiée dans Nature : Smoking changes adaptive immunity with persistent effects et présentée sur le site de l’Institut Pasteur: Le tabagisme a des effets à long terme sur le système immunitaire.