Nous avons encore sous-estimé la vitesse à laquelle nos océans s’élèvent
Des données satellitaires montrent que le taux d’élévation globale du niveau de la mer a augmenté de 50% entre 1993 et 2014 et que l’on a sous-estimé l’effet de la fonte des glaces tout en surestimant un peu d’autres facteurs, comme la dilatation de l’eau.
La couche de glace fondante du Groenland apporte une contribution beaucoup plus importante à l’élévation du niveau global de la mer que ce qui avait été estimé, selon une nouvelle analyse s’appuyant notamment sur des données satellitaires qui permettent le calcule du taux d’élévation du niveau de la mer qui a donc grimpé (le taux) de 50% en deux décennies.
Selon l’analyse, rédigée par des scientifiques du Center for Southern Hemisphere Oceans (CSIRO), une collaboration de recherche Chino-Australienne basée à Hobart, en Tasmanie :
Cette accélération souligne l’importance et l’urgence d’atténuer les changements climatiques et la formulation de plans d’adaptation côtière pour atténuer les effets de l’élévation continue du niveau de la mer.
Les résultats, basés sur les deux premières décennies d’enregistrements de données d’altimétrie par satellite, indiquent des différences notables dans les facteurs qui contribuent à l’élévation du niveau de la mer au cours des dernières décennies par rapport aux projections du Cinquième Rapport d’évaluation (5AR) du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC).
L’élévation du niveau de la mer peut résulter de l’expansion thermique de l’océan (dilatation de l’eau sous l’effet de la chaleur), de la perte de masse des glaciers, de la calotte polaire du Groenland et de l’Antarctique et des changements dans le stockage de l’eau terrestre en raison de la variabilité du climat et des effets anthropiques (activités humaine).
Le 5AR prévoit que l’expansion thermique de l’océan sera le facteur dominant à l’élévation future du niveau de la mer (entre 30% et 55%). Cette nouvelle analyse suggère que l’expansion thermique a diminué entre 1993 et 2014, contribuant à environ la moitié de l’augmentation annuelle du niveau global de la mer au début de cette période, mais inférieure d’un tiers à la fin.
Ceci, selon le document, pourrait être dû à l’éruption volcanique du mont Pinatubo en 1991. Les simulations de modèles climatiques montrent des chutes de température de l’océan suite à de telles éruptions, les retenant/ inhibant depuis plus de 15 ans.
Selon les chercheurs :
Ainsi, l’accélération sous-jacente de l’expansion thermique en réponse au “forçage” anthropique peut émerger au cours de la décennie à venir, ce qui entraîne une accélération supplémentaire du taux de celui rapporté ici et des estimations récentes.
Cela dit, le taux d’expansion thermique de l’océan n’a pas beaucoup changé. Ce qui a vraiment affecté l’élévation globale du niveau de la mer, c’est la contribution croissante issue de la fonte des glaces, des glaciers et des calottes polaires de l’Antarctique et du Groenland. L’apport en eau à partir de la couche de glace du Groenland, au niveau mondial, a été particulièrement marquant, passant de 5% en 1993 à 25% en 2014.
L’élévation du niveau global de la mer en fonction des différents facteurs, de 1993 à 2013. (Chen et Col./ Nature Climate Change)
Selon le coauteur de l’étude, Xuebin Zhang, un chercheur au CSIRO, en Australie :
Notre estimation de l’expansion thermique est conforme à l’observation récente des flotteurs Argo disponible depuis 2006. Les modèles climatiques ont fait un travail raisonnable pour représenter l’impact de l’expansion thermique, comme l’indique l’AR5 du GIEC. La plus grande incertitude, quant à une augmentation supplémentaire du niveau de la mer, ne provient pas de l’expansion thermique, mais de la fonte des couches de glace.
Une autre augmentation faible, mais significative, provient des sources de stockage d’eau terrestre, qui comprend des changements associés aux activités humaines telles que l’extraction des eaux souterraines, l’irrigation, les barrages, le drainage des zones humides et la déforestation.
Pour évaluer les données satellitaires et d’autres ensembles de données, les chercheurs ont utilisé ce qu’on appelle “l’Ensemble empirical mode decomposition” (EEMD), une méthode utilisée pour analyser les signaux naturels « non linéaires » et « non stationnaires », et qui a été récemment appliquée à l’estimation de la tendance de l’élévation du niveau de la mer. Cette méthode, selon les chercheurs, “peut séparer les oscillations non stationnaires (telles que les variations naturelles à différentes échelles de temps) de la tendance sur le long terme, et la tendance se trouve empiriquement sans aucune hypothèse quant à sa forme ».
L’étude en confirme une autre sur la réévaluation des données d’altimétrie satellitaire. Cette précédente étude expliquait l’apparente diminution du taux d’élévation du niveau de la mer, de 3,2 mm par an au cours de la première décennie à 2,8 mm par an dans la seconde, en raison d’une erreur systématique de dérive dans les enregistrements des altimètres, affectant particulièrement les six premieres années, gonflant la tendance d’environ 0,9 à 1,5 mm par an entre 1993 et 1996.
L’analyse de cette nouvelle étude rapporte des résultats en “concordance approximative” avec les observations satellitaires ajustées depuis, avec l’augmentation de la somme de toutes les contributions observées au niveau mondial pour la mer, en moyenne de 2,2 ± 0,3 mm par an en 1993, en hausse de 3,3 ± 0,3 mm par an en 2014.
L’étude publiée dans Nature Climate Change : The increasing rate of global mean sea-level rise during 1993–2014.