Les Incas étaient vraiment très bons à percer des trous dans le crâne de leurs congénères
Aussi surprenant que cela puisse paraître, les individus de la Civilisation Inca (13e au début du 16e siècle) étaient meilleurs que leurs confrères médecins du 19e siècle à un type de chirurgie très particulier : la trépanation.
Image d’entête : d’anciens crânes trouvés au Pérou et portant des traces de trépanation. (Université de Miami)
La trépanation existe depuis plus de 5 000 ans. A en juger par les découvertes archéologiques, aucune autre civilisation n’a davantage pratiqué la trépanation que les Incas.
Ils étaient apparemment des experts de la trépanation, pratiquant même la très risquée « trépanation multiple ». Au fil des années, les chercheurs ont trouvé plus de 100 sujets de trépanation de l’Empire inca. Dans une nouvelle étude, David Kushner, neurologue à l’université de Miami en Floride, s’est associé à John Verano, bioarchéologue à l’université Tulane de la Nouvelle-Orléans, en Louisiane, pour étudier systématiquement le taux de réussite de la trépanation chez les Incas, et de le comparer avec le taux de réussite d’autres personnes tout au long de l’histoire.
Comme vous pouvez l’imaginer, la trépanation était une procédure très dangereuse, et le patient n’y survivait pas toujours. L’équipe a examiné 59 crânes de la côte sud du Pérou datés entre 400 avant Jésus-Christ et 200 av. J.-C., 421 des hauts-plateaux centraux du Pérou datés de 1000 à 1400 avant Jésus-Christ*, et 160 des hauts-plateaux autour de Cusco, capitale de l’Empire inca, du début du 14e siècle avant Jésus-Christ jusqu’au milieu du 15e siècle avant Jésus-Christ. Il était assez facile de voir si le patient avait survécu à l’intervention, son crâne portait des marques de guérison autour de la plaie, dans le cas contraire, c’était une longue agonie.
*Le guru à oublier de préciser qu’avant la civilisation inca, c’est leurs ancêtres péruviens qui avait commencé à expérimenter la trépanation. Les Incas ont donc profité d’un savoir accumulé sur des centaines d’années.
Les chercheurs ont donc constaté que les Incas se sont progressivement améliorés, atteignant au fil du temps une assez remarquable maitrise de la technique.
Selon David Kushner, les résultats ont été étonnants et :
Seulement 40% du premier groupe a survécu aux opérations. Toutefois, 53% du groupe suivant a survécu, suivi de 75% à 83% pendant la période inca. (Une proportion étonnante de 91 % des patients a survécu dans un échantillon supplémentaire de seulement 9 crânes provenant des hautes terres du nord entre 1000 et 1300 de l’E.C.).
Les trous eux-mêmes sont devenus plus propres et précis.
Étonnamment, les « médecins » Incas étaient encore meilleurs que leurs homologues des siècles plus tard. Selon les registres médicaux de la guerre civile américaine (Guerre de Sécession) , lorsque la pratique était encore assez répandue, environ 46 à 56 % des patients ayant subi une chirurgie crânienne ne survivaient pas à l’intervention, alors qu’à l’époque inca, ce chiffre n’était que de 17 à 25 %.
Cependant, cela ne signifie pas nécessairement que les médecins de la guerre de Sécession étaient moins doués. Cela pourrait dépendre fortement du type de blessure que la trépanation était censée traiter.
Les trépanations sont probablement apparues comme un moyen de soigner les traumatismes crâniens. Après une blessure traumatique, le cerveau gonfle et accumule du liquide. La trépanation nettoierait ces fractures et réduirait la pression, ce qui aurait pu être bénéfique dans de nombreux cas. En effet, pendant la guerre civile, les blessures étaient souvent causées par des boulets de canon ou des coups de feu et traitées dans de très mauvaises conditions sanitaires. Cela aurait considérablement augmenté le risque d’infection et réduit le taux de survie. Les Incas ont probablement été beaucoup plus prudents avec cette procédure, avec un accès bien moindre à une technologie médicale.
Cependant, cela ne réduit en rien le mérite des Incas. Pour Emanuela Binello, neurochirurgienne à l’université de Boston qui a étudié la trépanation en Chine ancienne, le taux de survie des trépanations au Pérou est « étonnant ». « C’est le mérite de ce que ces anciennes cultures faisaient », selon elle.
L’étude publiée dans World Neurosurgery : Trepanation Procedures/Outcomes: Comparison of Prehistoric Peru with Other Ancient, Medieval, and American Civil War Cranial Surgery et présentée sur le site de l’université de Miami : Holes in the Head.