Mais où l’insère-t-il ? le mystère de l’accouplement des mille-pattes révélé par une remarquable étude basée sur l’imagerie
Chez les humains, c’est simple, leur sexe se trouve généralement entre leurs deux pattes… mais chez un mille-pattes ?
Une équipe de scientifiques américains vient de résoudre un vieux mystère biologique : comment les mille-pattes s’accouplent-ils exactement ? En utilisant une variété de nouvelles méthodes d’imagerie, y compris la photographie microscopique à l’ultraviolet et la micro-tomodensitométrie, la recherche a finalement compris comment ces minuscules créatures s’accouplent.
Image d’entête : un couple de mille-pattes du genre Pseudopolydesmus, sous une lumière UV pour que leurs structures anatomiques soient plus visibles. (Stephanie Ware/ Field Museum)
Selon Pétra Sierwald, du Field Museum de Chicago et l’une des auteurs de l’étude :
C’est la première fois que nous avons pu comprendre le mécanisme d’insertion de ces mille-pattes, la façon dont les organes mâles et femelles interagissent entre eux. Avant cela, nous n’avions aucune idée de la façon dont il allait réellement faire entrer le sperme en elle.
Les mille-pattes sont généralement un peu timides, et il n’a donc pas été facile de les amener à s’accoupler en laboratoire. La nouvelle étude s’est concentrée sur un type de petit mille-pattes brun d’Amérique du Nord appelé Pseudopolydesmus, connu pour être plus que disposé à s’accoupler, même dans les situations les plus exposées.
Un mille-pattes Pseudopolydesmus, sous une lumière ultraviolette. (Stephanie Ware/ Field Museum)
Toujours selon Sierwald :
Ils s’accoupleront même en laboratoire dans la boîte de Pétri, à la lumière.
En utilisant un certain nombre de techniques d’imagerie modernes, l’équipe de recherche a découvert des détails inattendus, et jusqu’alors inconnus, qui élucident le rituel d’accouplement des mille-pattes. Tout d’abord, les chercheurs devaient comprendre comment un mille-pattes mâle faisait entrer son sperme dans la femelle.
Les mille-pattes sont l’un des rares organismes qui utilisent des membres spécialisés appelés gonopodes pour transférer le sperme dans les femelles. Chez le Pseudopolydesmus, les gonopodes sont notamment assez éloignés de ses testicules. Les nouvelles recherches ont montré que le mille-pattes libère son sperme de ses testicules et se contorsionne ensuite pour recouvrir ses gonopodes de sperme, décrit comme un liquide bleuâtre.
Les gonopodes mâles pénètrent ensuite dans la vulve de la femelle à l’aide de petites griffes qui s’accrochent à des crêtes spécifiques de la vulve. C’est la première fois que des chercheurs décrivent ce type de relation de “verrouillage” chez le mille-pattes Pseudopolydesmus.
Une vulve de Pseudopolydesmus, sous lumière UV. (Stephanie Ware/ Field Museum)
Selon Sierwald :
Elle a deux ouvertures, une de chaque côté entre sa deuxième paire de pattes. Nous n’avions aucune idée pour tout ce groupe, quelle partie est insérée et où elle est insérée dans la femelle.
Un autre mystère résolu par la nouvelle étude est la source d’une étrange sécrétion qui scelle le sperme à l’intérieur de la vulve de la femelle. Ce processus a pour fonction de concentrer les spermatozoïdes jusqu’à ce que la femelle dépose ses ovules, puis de les enrober de spermatozoïdes lorsqu’ils quittent son corps.
Avant cette étude, nous n’avions aucune idée de l’origine réelle des sécrétions. J’ai toujours pensé qu’elles venaient du mâle, car je pensais que le mâle voulait isoler la femelle pour qu’elle ne puisse pas s’accoupler à nouveau. Mais maintenant, après avoir vu les glandes à l’intérieur des vulves de la femelle grâce au scanner, je pense que la plupart de ces sécrétions proviennent de la femelle. Je ne sais pas si c’est sa façon de protéger ses vulves ou de préserver le sperme. Ce sont des domaines intéressants pour des études plus approfondies.
Cette étude rigoureuse par imagerie met en lumière un mystère presque centenaire que la microscopie traditionnelle ne pouvait tout simplement pas résoudre. Selon Sierwald, cette recherche est non seulement importante pour mieux comprendre la relation entre les mille-pattes, mais elle permet également de comprendre comment différentes espèces de mille-pattes ont évolué. Et, bien sûr, elle répond à une question brûlante que de nombreux entomologistes se posent depuis des décennies : à quoi ressemble réellement la vulve d’un mille-pattes ?
Pour Sierwald :
Il existe 16 ordres de mille-pattes dans le monde, et pour la plupart d’entre eux, nous n’avons qu’une vague idée de ce à quoi ressemblent les vulves.
L’étude publiée dans la revue Arthropod Structure & Development : Genital morphology and the mechanics of copulation in the millipede genus Pseudopolydesmus (Diplopoda: Polydesmida: Polydesmidae) et présentée sur le site du Field Museum : Scientists finally figure out how millipedes actually do it.