Et si le Tyrannosaurus rex avait des petits bras pour éviter de se les faire dévorer lors d’un repas entre amis
Les minuscules bras du Tyrannosaurus rex ont été la cible de plaisanteries de la part de nombreux scientifiques et profanes. Diverses hypothèses ont été avancées : ses bras étaient peut-être de vicieuses armes tranchantes ou un moyen de s’agripper pendant les rapports sexuels, mais il est difficile de répondre à ce genre de questions sur l’évolution à partir d’un tas d’ossements vieux de 66 millions d’années.
Une nouvelle étude présente une hypothèse originale : ces dinosaures auraient développé des bras courts pour réduire le risque de morsures accidentelles par d’autres T. rex lors de frénésies alimentaires. En d’autres termes, avec des bras courts, on a moins de chances de se faire mordre par ses amis.
Selon Kevin Padian, biologiste spécialiste de la biologie intégrative à l’université de Californie à Berkeley et auteur de la nouvelle étude :
Et si plusieurs tyrannosaures adultes convergeaient vers une carcasse ? Vous avez un groupe de crânes massifs, avec des mâchoires et des dents incroyablement puissantes, qui déchirent et rongent la chair et les os juste à côté de vous. Et si votre ami là-bas pense que vous vous approchez un peu trop ? Il pourrait vous mettre en garde en vous coupant le bras. Donc, cela pourrait être un avantage de réduire les membres antérieurs, puisque vous ne les utilisez pas dans la prédation de toute façon.
Les paléontologues comprennent de mieux en mieux à quoi ressemblaient les dinosaures, grâce aux découvertes fossiles de peau et de plumes (ou d’excréments), et nous pouvons faire certaines hypothèses sur ce que faisaient les dinosaures en raison de la façon dont les os sont placés, ou des empreintes de pas qui fournissent davantage d’informations sur leurs habitudes.
(RJ Palmer)
Mais les questions complexes liées à l’évolution restent difficiles à déterminer, même pour les espèces dont nous pouvons observer les comportements, ou qui ont accès aux génomes de leurs ancêtres. Si l’on arrive à un animal ancien comme le T. rex, il est d’autant plus frustrant de trouver des réponses.
Si les bras du T. rex semblent ridiculement petits, proportionnellement parlant, ils sont encore plus ridicules si on les compare à ceux d’autres animaux. Imaginons un T. rex de 14 mètres de long. Il pourrait avoir un crâne de 1,5 mètre de long, mais ses bras ne feraient qu’un mètre de long. C’est l’équivalent d’un humain de 1,80 m avec des bras de 12 centimètres.
Pour essayer de déterminer si cette nouvelle hypothèse de « l’ami mordeur de bras », Padian a pris les mesures d’un spécimen fossile presque complet appelé MOR 555. Sur la base de ces mesures, il suggère que certaines des précédentes hypothèses, y compris celles de l’aide sexuelle et des bras tranchants, sont peu probables, car les bras du T. rex sont tout simplement trop petits et trop faibles pour être utiles.
Le squelette monté de Tyrannosaurus rex Osborn, 1905, dans l’atrium du Valley Life Sciences Building de l’Université de Californie, Berkeley, basé principalement sur le squelette relativement complet du Museum of the Rockies (MOR 555), prélevé dans la formation Hell Creek du Montana, aux États-Unis. (Université de Californie à Berkeley)
Il pense plutôt qu’il aurait pu être avantageux sur le plan de l’évolution d’avoir des bras minuscules, afin de les écarter du passage lors de l’alimentation en groupe.
Selon Padian dans son étude :
Des bras plus longs, surtout dans leur orientation naturelle, quelque peu étendue vers l’avant, les auraient fait entrer dans le champ d’action des mâchoires les plus meurtrières jamais recensées sur terre. Le risque de blessures, d’amputations, d’infections, de maladies et de mort finale aurait été une force sélective de réduction, indépendamment de la fonctionnalité résiduelle des membres.
Faisons donc l’hypothèse que la réduction de la taille des membres antérieurs était une fonction secondaire de la sélection pour autre chose. En tant que tel, nous ne devrions pas chercher la fonctionnalité de ces membres réduits, mais la façon dont cette réduction a servi un objectif plus large.
Bien sûr, comme les autres suggestions ci-dessus, il s’agit d’une hypothèse. Dans l’étude, Padian suggère quelques façons dont d’autres chercheurs pourraient la tester : par exemple, si nous trouvions relativement moins de marques de morsure sur les os de leurs bras que sur d’autres parties de leur corps.
Toujours selon Padian :
Ce que je voulais d’abord, c’était établir que les idées fonctionnelles dominantes ne fonctionnent tout simplement pas. Cela nous ramène à la case départ. Ensuite, nous pouvons adopter une approche intégrative, en pensant à l’organisation sociale, au comportement alimentaire et aux facteurs écologiques en dehors des considérations purement mécaniques.
L’étude publiée dans la revue Acta Palaeontologica Polonica : Why tyrannosaurid forelimbs were so short: An integrative hypothesis et présentée sur le site de à l’université de Californie à Berkeley : T. rex’s short arms may have lowered risk of bites during feeding frenzies.