Pour le climat, il vaudrait mieux laisser les arbres sur pied que de les utiliser dans des constructions
Le bois est un matériau de construction polyvalent qui pourrait être utilisé pour remplacer l’acier et le béton, des matériaux à forte teneur en carbone, mais les émissions qu’il génère pourraient avoir été sous-estimées.
Des chercheurs du World Resources Institute (WRI) ont constaté que la consommation de bois représente environ un dixième des émissions annuelles de gaz à effet de serre dans le monde. C’est moins que la production d’électricité et de chaleur, mais plus que les voitures particulières. Cette situation est d’autant plus préoccupante que la demande mondiale de bois augmentera de 54 % entre 2010 et 2050.
Selon les chercheurs :
Nous constatons que l’utilisation du bois pour remplacer le béton et l’acier pourrait réduire les émissions dans certaines conditions, mais celles-ci sont difficiles à atteindre. Et actuellement, les plantations à croissance rapide qui pourraient fournir du bois dans ces conditions sont déjà nécessaires pour répondre à d’autres demandes croissantes de bois.
Au cours de leur croissance, les arbres transforment le carbone de l’air en hydrates de carbone, le soustrayant ainsi de l’atmosphère et le stockant. Si un arbre entier était converti en bâtiment, le carbone resterait stocké pendant des décennies. Mais, comme l’indiquent les chercheurs, seule une petite partie d’un arbre est transférée dans une construction, un tiers restant dans la forêt sous forme de racines et de branches.
L’écorce, qui représente 10 à 15 % du bois extrait de la forêt, est généralement brûlée. De même, lorsque les grumes (troncs ou portions non équarries, généralement couvertes de son écorce) sont transformées en bois d’œuvre, une grande partie devient des copeaux ou de la sciure, qui sont brûlés. Ces processus industriels du secteur forestier émettent du dioxyde de carbone qui serait évité si les forêts étaient maintenues sur pied.
Les chercheurs ont étudié des publications affirmant que l’utilisation du bois est neutre en carbone tant qu’une forêt est exploitée de manière durable, c’est-à-dire que la quantité de bois prélevée au cours d’une année correspond à la croissance de la forêt au cours de cette période. Or, ce n’est pas le cas. La récolte augmente le carbone même si les forêts ne diminuent pas d’une année sur l’autre.
L’équipe, comparant cette situation à un compte d’épargne qu’on laisse fructifier et qu’on ne dépense pas :
Logiquement, si les forêts croissent et absorbent plus de carbone à condition que certaines parties ne soient pas récoltées pour le bois, alors la récolte et le maintien des stocks de carbone préexistants diminuent le carbone stocké par la forêt par rapport à un scénario sans récolte.
Dans l’étude, les chercheurs ont également constaté que l’utilisation du bois dans la construction augmentera probablement les émissions de carbone par rapport à l’utilisation du béton et de l’acier. Ils estiment que la demande de bois augmentera de 54 % d’ici le milieu du siècle, ce qui entraînerait le défrichement de 3 millions de kilomètres carrés de forêts, soit une superficie équivalente à celle de la partie continentale des États-Unis.
Les émissions qui en résulteraient se situeraient entre 3,5 et 4,2 milliards de tonnes de CO2 par an, ce qui correspond à peu près aux émissions causées par la déforestation pour l’agriculture.
Selon les chercheurs :
Nous prévoyons que le bois utilisé pour le bois d’œuvre, le papier et tous les usages autres que le carburant sera 90 % plus élevé en 2050 qu’en 2010.
Cependant, il y a encore du chemin à faire. Dans leur étude, ils suggèrent de limiter la quantité de bois exploitée et d’encourager des utilisations plus efficaces de celui-ci, en le brûlant moins pour le chauffage et la cuisine, par exemple. Ils nous invitent également à rechercher des solutions plus prometteuses pour le béton et l’acier dans le secteur de la construction, au lieu de penser uniquement au bois.
L’étude et sa présentation publiée sur le site du World Resources Institute : The Global Land Squeeze: Managing the Growing Competition for Land.