Des scientifiques ont injecté des nanoparticules dans les yeux de souris pour leur offrir une vision infrarouge
Des chercheurs ont injecté une solution de nanoparticules dans les yeux de souris, leur donnant la possibilité de voir dans l’infrarouge. Normalement, les yeux des rongeurs, ou de l’humain, ne peuvent percevoir le rayonnement électromagnétique infrarouge, bien qu’ils puissent le sentir sous forme de chaleur.
La plupart des mammifères, y compris les humains, ne peuvent voir que dans une plage étroite du spectre électromagnétique, appelée lumière visible. Le spectre visible s’étend de 380 nanomètres à 740 nanomètres, ce qui est en dehors du spectre infrarouge dont les longueurs d’onde s’étendent de 800 nanomètres à un millimètre.
Selon Gang Han de la faculté de médecine de l’université du Massachusetts :
Lorsque la lumière pénètre dans l’œil et frappe la rétine, les bâtonnets et les cônes, ou cellules photoréceptrices, absorbent les photons avec des longueurs d’onde de lumière visible et envoient les signaux électriques correspondants au cerveau. Parce que les longueurs d’ondes infrarouges sont trop longues pour être absorbées par les photorécepteurs, nous ne sommes pas capables de les percevoir.
Les caméras infrarouges ou thermiques sont équipées de détecteurs qui peuvent traduire le rayonnement infrarouge en assignant à chaque température une nuance d’une couleur. Les températures plus froides se voient souvent attribuer une nuance de bleu, de violet ou de vert, tandis que les températures plus chaudes peuvent se voir attribuer une nuance de rouge, d’orange ou de jaune.
Nous ne savons pas exactement comment les souris de cette expérience ont perçu l’infrarouge à travers leur vision, mais ce qui semble probable, c’est qu’elles le pouvaient.
Des chercheurs de l’université des sciences et de la technologie de Chine et de la faculté de médecine de l’université du Massachusetts ont mis au point des nanoparticules qui se lient aux structures existantes de l’œil. Une fois ancrées aux cellules photoréceptrices, les nanoparticules agissent comme de minuscules transducteurs de lumière infrarouge. Lorsque la lumière infrarouge frappe la rétine, les longueurs d’onde infrarouges les plus longues sont réémises dans des longueurs d’onde plus courtes à l’intérieur de la plage de lumière visible. Donc, techniquement, les souris ne voient pas vraiment l’infrarouge, elles voient l’information infrarouge sous une forme perceptible, ce qui est exactement la façon dont fonctionne une caméra de vision thermique.
Selon Jin Bao de l’Université de sciences et technologie de Chine :
Dans notre expérience, les nanoparticules ont absorbé la lumière infrarouge à une longueur d’onde d’environ 980 nm et l’ont convertie en lumière dont le pic était à 535 nm, ce qui a fait apparaître la lumière infrarouge comme une couleur verte.
Les nanoparticules (blanches) se lient aux bâtonnets et aux cônes de la rétine des souris, ce qui permet aux rongeurs de détecter l’infrarouge. (Yuqian Ma et coll./ Cell)
Les souris qui ont reçu les nanoparticules par injection ont montré divers signes indiquant qu’elles étaient capables de détecter les infrarouges, tels que la constriction des pupilles. Au cours d’une expérience, les souris ont été capables de s’orienter dans une série de labyrinthes, ce qu’elles ne pouvaient pas faire en vision normale, montrant qu’elles pouvaient détecter simultanément la lumière infrarouge et la lumière visible.
Une seule injection de nanoparticules dans les yeux de la souris permettait une vision infrarouge jusqu’à 10 semaines. Bien qu’il y ait eu un seul effet secondaire mineur (une cornée troublée), il a disparu en moins d’une semaine. Les tests n’ont révélé aucun dommage à la structure de la rétine, ce qui suggère que l’intervention est sans risque.
Selon Xue :
Dans notre étude, nous avons montré que les bâtonnets et les cônes lient ces nanoparticules et qu’elles sont activées par la lumière infrarouge proche. Nous pensons donc que cette technologie fonctionnera aussi pour les yeux humains, non seulement pour générer une super vision, mais aussi pour des solutions thérapeutiques dans les déficits de la vision des couleurs rouges.
À l’avenir, nous pensons qu’il est possible d’améliorer la technologie avec une nouvelle version de nanoparticules organiques, fabriquées à partir de composés approuvés par la FDA (Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux), qui semblent donner une vision infrarouge encore plus claire.
Les chercheurs prévoient d’ajuster leurs nanoparticules pour qu’elles conviennent mieux aux yeux humains, qui ont davantage de cônes et de bâtonnets que les souris.
C’est un sujet passionnant parce que la technologie que nous avons rendue possible ici pourrait éventuellement permettre aux êtres humains de voir au-delà de nos capacités naturelles.
L’étude publiée dans Cell : Mammalian Near-Infrared Image Vision through Injectable and Self-Powered Retinal Nanoantennae et annoncée sur le site de l’université des sciences et de la technologie de Chine : Nanotechnology Makes It Possible for Mice to See in Infrared.