Comment les humains ont changé la structure du cerveau des chiens au cours des siècles
Les humains et les chiens ont une relation spéciale. Pour le meilleur ou pour le pire, les chiens sont devenus entièrement dépendants de leurs maîtres humains, qui ont non seulement façonné l’espèce canine, mais aussi d’innombrables races. Une nouvelle étude montre à quel point le cerveau du meilleur ami de l’homme peut être très différent d’une race à l’autre.
Image d’entête de l’AFAD (Amicale Française des Amateurs de Dalmatien)
Si vous aimez les chiens, vous savez peut-être que les labradors sont amicaux, que les Dalmatiens sont hyperactifs et que les bergers australiens sont intelligents. Ce ne sont pas des accidents. Ces caractéristiques, ou phénotypes, ont été sélectionnés par les éleveurs de chiens au fil des siècles, ou sont le résultat involontaire de la volonté d’obtenir une autre caractéristique particulière.
Par exemple, à l’origine, les Dalmatiens étaient destinés à servir les humains comme “chien de coche” en raison de leur aisance avec les chevaux (sa fonction première était d’ouvrir la voie au coche et autre diligence transportant le courrier). Avec le temps, les Dalmatiens sont devenus une race connue pour son endurance, pouvant courir pendant des jours. Cependant, dans une maison moderne, l’excès d’énergie d’un Dalmatien peut conduire à des comportements moins désirables, tels que mâcher des chaussures et détruire le mobilier.
Erin Hecht et ses collègues du Centre de cognition canine de l’université d’Arizona ont voulu étudier quels étaient les effets de cette pression sélective sur le cerveau des chiens. C’est dans cet esprit qu’ils ont réalisé des scanners d’imagerie par résonance magnétique sur 33 races de chiens.
Les résultats suggèrent qu’il existe une grande variation dans la structure du cerveau qui ne peut pas être expliquée simplement par la taille du corps ou la forme de la tête.
A partir de l’étude, quelques-unes des différences subtiles dans l’anatomie du cerveau repérées par Hecht et son équipe.
(Hecht et col./ (JNeurosci)
Certaines régions du cerveau présentaient des variations plus marquées d’une race à l’autre. Les chercheurs ont pu produire les cartes de six réseaux cérébraux dont les fonctions vont du lien social au mouvement. Chaque réseau était associé à au moins une caractéristique comportementale.
Selon l’American Kennel Club (plus importante fédération canine des États-Unis):
L’anatomie du cerveau varie d’une race de chien à l’autre, et il semble qu’au moins une partie de cette variation soit due à l’élevage sélectif pour des comportements particuliers comme la chasse, l’élevage et la garde.
En d’autres termes, non seulement les formes et les tailles des cerveaux canins varient selon la race, mais les structures de ces cerveaux sont également différentes. Cette découverte aide à expliquer ce qui fait qu’un Maltais agit comme un Maltais, ou un boxer comme un boxer.
Mais cela soulève une autre question intrigante. La plupart des chiens d’aujourd’hui ne remplissent pas les rôles pour lesquels leur race a été créée.
En fait, les 63 chiens de l’étude étaient tous des animaux domestiques et non des chiens affectés à une tâche. Donc, même s’ils sont les descendants de grands éleveurs ou chasseurs, ils n’accomplissent probablement pas ces tâches avec sérieux. Cela pourrait faire une grande différence.
Selon Hecht :
Ce n’est pas comme si ton cerveau avait un nouveau pli à chaque fois que tu apprends quelque chose. Mais il y a eu beaucoup d’études qui montrent que votre cerveau change à mesure que vous apprenez une nouvelle langue ou une nouvelle habileté motrice.
Il est donc tout à fait possible qu’un labrador retriever qui fait le travail pour lequel il a été élevé, récupérer les oiseaux abattus par des chasseurs, ait un cerveau différent d’un labrador qui récupère le pop-corn coincé entre les coussins du canapé.
Daniel Horschler, étudiant au doctorat au Centre de cognition canine de l’université d’Arizona, a déclaré que la variation observée entre les races de chiens pourrait s’avérer un modèle important pour comprendre comment fonctionne le cerveau en général.
De précédentes études ont étudié les différences neurologiques entre les espèces, mais ces animaux selon Horschler » ont évidemment beaucoup plus de différences en termes d’écologie, de comportement et d’environnement, il est donc très intéressant de pouvoir le faire sur une seule espèce « .
Hecht explique que son équipe essaie de mieux comprendre pourquoi et dans quelle mesure les variations au sein d’une race se produisent ou, comme elle le précise, les différences entre les « artistes hautement qualifiés et ceux qui le sont moins ».
Par exemple, les Border Collie qui gagnent des concours de troupeaux dans le monde réel et les frères et sœurs de ces chiens qui, pour une raison ou une autre, préfèrent rester assis sur le canapé.
Mme Hecht espère également être en mesure de tirer parti des résultats de l’étude en étudiant d’autres facettes du cerveau d’un chien. Par exemple, la forme et la taille du crâne peuvent également avoir un impact sur l’anatomie des ventricules, les espaces qui contiennent le liquide céphalorachidien, ce qui est essentiel à la santé du cerveau. Un jour, cette approche de recherche pourrait même permettre d’adapter un traitement vétérinaire aux différentes races.
Une étude a déjà montré que les border collies et les huskies de Sibérie réagissent différemment lorsqu’on leur administre l’hormone ocytocine, ce qui signifie qu’il y a des raisons de croire que les races canines pourraient aussi avoir des réactions différentes aux médicaments, à l’anesthésie ou à d’autres interventions.
Ces variations neuroanatomiques sont fascinantes et offrent un aperçu unique de la relation évolutive entre la structure du cerveau et le comportement animal.
L’étude publiée dans The Journal of Neuroscience : Significant neuroanatomical variation among domestic dog breeds et présentée dans Science : Dog breeds really do have distinct personalities—and they’re rooted in DNA.