Une nouvelle couche musculaire vient d’être découverte dans la mâchoire des humains
Les manuels et les études affirment catégoriquement que le muscle masséter de la mâchoire (muscles de la mastication) est constitué de deux couches : une partie superficielle et une partie profonde. Cette vieille conviction est aujourd’hui battue en brèche par la découverte d’une autre couche située directement sous la partie profonde de cette musculature.
L’université de Bâle en Suisse a réalisé une dissection approfondie de spécimens humains afin d’identifier la « troisième » couche du muscle masséter, qui relie la mandibule (mâchoire inférieure) au crâne et joue un rôle essentiel dans la mastication. L’étude (lien plus bas) propose de donner à cette structure le nom de « Musculus masseter pars coronidea ou section coronoïde du masséter », car elle est attachée au processus coronoïde de la mâchoire inférieure, une protubérance osseuse qui facilite la mastication.
Image d’entête : la couche musculaire découverte récemment (rouge) s’étend de l’arrière de la pommette au processus musculaire antérieur de la mâchoire inférieure. Le muscle masséter ne se compose donc pas seulement d’une partie superficielle (S) et d’une partie profonde (D), mais possède également une couche plus profonde (C = coronoïde), décrite pour la première fois. (Jens C. Türp/ Université de Bâle)
Le Dr Szilvia Mezey, auteur principal de l’étude à l’Université de Bâle, explique que « cette section profonde du muscle masséter se distingue clairement des deux autres couches en termes de trajet et de fonction ». Elle ajoute que la disposition des fibres musculaires suggère que cette couche est impliquée dans la stabilisation de la mâchoire inférieure et semble être la seule partie du masséter capable de la ramener vers l’oreille.
Le masséter est un muscle important de la mastication qui se tend lorsque l’on serre les dents, dont la structure a déjà suscité des interrogations. Par exemple, certains classiques de l’anatomie humaine décrivent ce muscle comme ayant trois couches, bien que les études référencées aient utilisé des espèces non humaines. Néanmoins, ces essais sur des animaux évalués par des pairs étaient suffisamment robustes pour susciter de nombreuses spéculations.
Pour mettre fin à cette incertitude, l’équipe a entamé une enquête anatomique complexe. Tout d’abord, le groupe a disséqué 12 têtes de cadavres humains conservées dans du formol. Ensuite, ils ont utilisé la tomographie informatisée pour produire des images internes très détaillées de 16 cadavres frais, chaque image représentant une lame de seulement 0,6 mm d’épaisseur. Enfin, les scientifiques ont comparé ces fines tranches avec l’imagerie par résonance magnétique (IRM) d’une personne vivante, qui a produit une image détaillée du muscle masséter et des tissus conjonctifs pour donner une vue d’ensemble de la nouvelle couche.
Ces examens ont révélé une troisième couche anatomiquement distincte du muscle masséter. La première description complète de ce muscle implique une couche possédant une alimentation nerveuse et sanguine distincte qui commence au niveau du processus zygomatique, une protubérance osseuse qui fait partie des pommettes. L’étude décrit ensuite une forme étroite, allongée et rectangulaire qui descend jusqu’à l’apophyse coronoïde, une saillie triangulaire sur la mandibule.
En raison de la direction de ses fibres et de la position de ses attaches, l’équipe suggère que cette couche assure une stabilisation supplémentaire de la mâchoire inférieure, ce qui en fait une partie essentielle du muscle masséter.
Le Dr Jens Christoph Türp, professeur au Centre universitaire de médecine dentaire de Bâle, conclut :
Bien qu’il soit généralement admis que la recherche anatomique des 100 dernières années n’a rien laissé au hasard, notre découverte est un peu comme si les zoologistes découvraient une nouvelle espèce de vertébré.
Outre une meilleure connaissance du corps humain, l’équipe note que ces nouvelles données pourraient être utiles à court terme, en contribuant à améliorer les traitements des affections impliquant la mâchoire.
L’étude publiée dans Annals of Anatomy : The human masseter muscle revisited: First description of its coronoid part et présentée sur le site de l’Université de Bâle : New muscle layer discovered on the jaw.