Les cornes des rhinocéros ont évolué pour devenir plus petites afin d’éviter d’être la cible des braconniers
Si certains animaux possèdent une caractéristique qui diminue leurs chances de survie, cette particularité a moins de chances d’être transmise à leur progéniture. C’est ce qui semble être le cas des rhinocéros chassés pour leurs grandes cornes, selon une analyse récente de photographies.
Image d’entête : une peinture d’un rhinocéros indien, en 1751, baptisée Clara, le rhinocéros hollandais, dans son stand près de Castelnuovo, Naples. (Rhino Resource Centre)
Rhinocéros indiens (une mère et son petit) au zoo de Whipsnade, Royaume-Uni. (Oscar Wilson/ Université de Cambridge)
Pour cette étude, des scientifiques de l’université britannique de Cambridge ont examiné 80 photos historiques de rhinocéros prises sur une période de 132 ans, entre 1886 et 2018. Les images faisaient partie du référentiel en ligne du Rhino Resource Centre, et représentaient les cinq espèces de rhinocéros : blanc, noir, indien, javanais et sumatranais, photographiées de profil.
Theodore Roosevelt photographié en 1911, debout au-dessus d’un rhinocéros noir qu’il vient de tuer. (Université de Cambridge)
Les chercheurs ont constaté que, pour toutes les espèces, la taille des cornes (par rapport à la taille du corps) diminuait progressivement au fil du temps. Les chercheurs pensent que cette tendance est due au fait que les rhinocéros à grandes cornes ont été les plus visés par les chasseurs, laissant les survivants à petites cornes se reproduire et transmettre leurs caractéristiques aux générations futures. Des tendances similaires ont été observées auparavant, chez d’autres populations animales menacées.
Rhinocéros de Sumatra au Port Lympne Safari Park, Royaume-Uni, photographié par Kees Rookmaaker en 1986. (Université de Cambridge)
Les cornes de rhinocéros sont principalement utilisées dans la médecine traditionnelle chinoise, bien qu’elles deviennent de plus en plus populaires comme objets d’exposition censés symboliser la richesse et la réussite de leur propriétaire. En raison de leur grande valeur, leur accès direct, même pour les scientifiques, a longtemps été très limité. C’est la principale raison pour laquelle l’équipe de Cambridge s’est limitée à l’examen de photos, et c’est aussi, semble-t-il, la raison pour laquelle une étude aussi longue sur la taille des cornes de rhinocéros n’avait jamais été menée auparavant.
Les scientifiques ont également analysé 3 158 dessins et photos de rhinocéros dans la base de données, datant de 1481 à 2021, pour voir comment la représentation de ces animaux a évolué au fil du temps. Comme on pouvait s’y attendre, les premières images avaient tendance à dépeindre les rhinocéros comme des créatures effrayantes et redoutables. À partir de 1950, cependant, ils ont été de plus en plus représentés comme des animaux menacés nécessitant une protection.
Rhinocéros noir chargeant un cheval, par William Cotton Oswell, 1900. L’image vise à faire passer les rhinocéros pour des animaux vicieux et agressifs. (Université de Cambridge)
Paradoxalement, si les grandes cornes ont pu désavantager les rhinocéros qui les possédaient, les cornes actuelles, généralement plus petites, présentent également de gros inconvénients.
Selon Oscar Wilson, premier auteur de l’étude :
Les rhinocéros ont développé leurs cornes pour une raison précise : les différentes espèces les utilisent de différentes manières, par exemple pour saisir la nourriture ou se défendre contre les prédateurs. Nous pensons donc que des cornes plus petites seront préjudiciables à leur survie.
L’étude publiée dans la revue People and Nature : Image-based analyses from an online repository provide rich information on long-term changes in morphology and human perceptions of rhinos et présentée sur le site de l’Université de Cambridge : Photos suggest rhino horns have shrunk over past century, likely due to hunting.