Les premiers humains auraient appris à marcher alors qu’ils se trouvaient encore dans les arbres
On a longtemps cru que nos ancêtres préhistoriques ont commencé à marcher sur deux jambes lorsqu’ils sont passés des arbres à l’environnement plus ouvert de la savane africaine. Une nouvelle étude sur les chimpanzés suggère cependant que ce n’est peut-être pas le cas.
Image d’entête : un chimpanzé mâle adulte marche debout pour se déplacer sur des branches flexibles dans la canopée ouverte, caractéristique de l’habitat mosaïque de forêt-savane de la vallée d’Issa. (Rhianna C. Drummond-Clarke)
Connue sous le nom d’hypothèse de la savane, la théorie dominante suggère que lorsque les forêts tropicales ont commencé à reculer en raison du changement climatique naturel, les premiers hominidés qui vivaient dans les arbres de ces forêts ont commencé à s’aventurer dans la savane. Cette dernière étant constituée d’un mélange de forêts et de prairies, les singes se sont progressivement mis à marcher debout, afin de mieux traverser les espaces ouverts.
Cela dit, tout le monde n’adhère pas complètement à cette hypothèse. Parmi ceux qui la remettent aujourd’hui en question, on trouve des scientifiques de l’University College de Londres, de l’Université du Kent (Angleterre) et de l’Université Duke en Caroline du Nord (Etats-Unis), qui ont mené cette récente étude (lien plus bas).
Sur une période de 15 mois, les chercheurs ont observé un groupe de 13 chimpanzés adultes sauvages vivant dans la vallée d’Issa, dans l’ouest de la Tanzanie. Le paysage “mosaïque de forêt-savane” de cette région est très similaire à celui de nos premiers ancêtres, composé d’un mélange de terres sèches et ouvertes et de parcelles de forêt.
A partir de l’étude : la vallée d’Issa et d’autres sites d’étude des chimpanzés et leurs habitats. La zone d’étude d’Issa est un habitat mosaïque de forêt-savane avec une longue saison sèche qui est dominée par la forêt de miombo, représentée dans la carte de l’habitat en surbrillance et la vue du site. (R. Drummond-Clarke et col./ Science Advances)
Les chimpanzés étant les plus proches parents vivants de l’humanité, il semble probable qu’au fil des millénaires, la population d’Issa se soit adaptée à son paysage d’une manière similaire à celle des hominidés préhistoriques.
Réfutant l’hypothèse de la savane, on a découvert que les chimpanzés Issa passaient autant de temps dans les arbres que leurs homologues vivant dans des environnements de forêt dense, et qu’ils sortaient rarement dans les prairies. De plus, même lorsqu’ils se déplaçaient sur le sol, ils avaient tendance à ne pas marcher debout. En fait, plus de 85 % des cas de bipédie observés ont eu lieu lorsque les singes étaient dans les arbres.
A partir de l’étude : A) Pourcentage de bipédie sur les supports terrestres par rapport aux supports arboricoles, représenté par des barres gris clair derrière. Les barres colorées à l’avant représentent le pourcentage de bipédie sur chaque substrat, réparti selon le contexte comportemental dans lequel les chimpanzés utilisaient la bipédie, divisé entre la recherche de nourriture (orange) et les autres comportements (bleu), c’est-à-dire les déplacements, la surveillance et le jeu. La bipédie chez les chimpanzés Issa était principalement un comportement arboricole (86% ; arboricole contre terrestre) et de recherche de nourriture (73% ; recherche de nourriture contre autre comportement dans un contexte arboricole). (R. Drummond-Clarke et col./ Science Advances)
Selon le Dr Alex Piel, de l’University College de Londres, coauteur de cette étude :
Notre étude suggère que le recul des forêts à la fin du Miocène–Pliocène, il y a environ cinq millions d’années, et les habitats de savane plus ouverts n’ont en fait pas été un catalyseur de l’évolution de la bipédie. Au lieu de cela, les arbres sont probablement restés essentiels à son évolution – la recherche d’arbres producteurs de nourriture étant probablement un moteur de ce trait.
L’étude publiée dans Science Advances : Wild chimpanzee behavior suggests that a savanna-mosaic habitat did not support the emergence of hominin terrestrial bipedalism et présentée sur le site de l’University College de Londres : Early humans may have first walked upright in the trees.