Des gènes résistants aux antibiotiques trouvés dans les nuages
Alors que les bactéries résistantes aux antibiotiques sont de plus en plus nombreuses, on aurait pu penser que ces microbes potentiellement mortels se trouveraient principalement dans les endroits où les humains et les autres animaux se rassemblent : à savoir, la surface de la Terre. Or, des chercheurs canadiens et français les ont trouvées dans un endroit tout à fait étonnant.
Image d’entête : le sommet du puy de Dôme, un volcan endormi du Massif central en France. (Jodie Way/ Université Laval)
Les bactéries et les champignons résistants aux antimicrobiens sont responsables de la mort d’au moins 1,27 million de personnes dans le monde chaque année. La lutte contre ces superbactéries devient de plus en plus difficile, bien que les chercheurs travaillent sur de nouvelles méthodes pour en venir à bout.
Les microbes résistants aux antibiotiques constituant une menace importante pour la santé publique, il est essentiel d’en savoir le plus possible sur eux et sur la manière dont ils se déplacent sur notre planète. C’est ce que des chercheurs de l’Université Laval (Québec, Canada) et de l’Université Clermont Auvergne (France) ont entrepris de faire lorsqu’ils ont étudié les nuages flottant autour d’un volcan endormi dans la région du Massif central, en France. À partir d’une station météorologique située à 1 465 mètres d’altitude sur le sommet du Puy de Dôme, ils ont procédé à 12 échantillonnages de nuages sur une période de deux ans.
Les nuages au sommet du puy de Dôme. (Pierre Amato)
Ils ont non seulement constaté que les nuages contenaient environ 8 000 bactéries par millilitre d’eau, mais aussi qu’il y avait en moyenne 20 800 copies de gènes résistants aux antibiotiques dans le même volume. Ils ont également noté que les nuages qui étaient arrivés par des voies qui les avaient conduits au-dessus de l’océan contenaient des types de bactéries résistantes aux antibiotiques qui différaient de ceux qui étaient passés exclusivement au-dessus de la terre, ces derniers présentaient des taux plus élevés de bactéries résistantes aux antibiotiques utilisés pour le bétail.
Dans le cadre de cette étude, les scientifiques recueillent et analysent l’eau des nuages. (Pierre Amato)
Bien que l’atmosphère soit depuis longtemps considérée comme un point de transit pour les bactéries, les chercheurs ont été surpris de trouver les mêmes niveaux de gènes dans les nuages qu’à la surface de la planète.
Selon Florent Rossi, de l’Université Laval, premier auteur de l’étude :
C’est la première étude qui montre que les nuages abritent des gènes de résistance aux antibiotiques d’origine bactérienne à des concentrations comparables à celles d’autres environnements naturels . Ces bactéries vivent habituellement à la surface de la végétation ou du sol. Elles sont dispersées en aérosol par le vent ou par les activités humaines, et certaines d’entre elles s’élèvent dans l’atmosphère et participent à la formation des nuages.
Selon les auteurs de l’étude, les concentrations élevées de gènes résistants aux antibiotiques dans les nuages sont probablement dues en premier lieu à l’utilisation d’antibiotiques dans l’élevage. La recherche des sources de ces gènes dans de futures études pourrait permettre de mieux contenir les microbes et pourrait constituer une future source de recherche pour l’équipe.
Toujours selon Rossi :
Notre étude montre que les nuages constituent une voie importante pour la propagation des gènes de résistance aux antibiotiques sur de courtes et de longues distances. Idéalement, nous aimerions localiser les sources d’émission résultant des activités humaines afin de limiter la dispersion de ces gènes.
L’étude publiée dans Science of The Total Environment : Quantification of antibiotic resistance genes (ARGs) in clouds at a mountain site (puy de Dôme, central France) et présentée sur le site de l’Université Laval : Des gènes de résistance aux antibiotiques dans les nuages.