Chez les patients qui ont réussi à vaincre le cancer, des scientifiques ont découvert de nouvelles cellules T "supérieures" capables de s’attaquer à plusieurs cibles cancéreuses
Le cancer fut à l’origine de près de 10 millions de décès en 2020, soit près d’un décès sur six. Bien que les progrès de la médecine aient considérablement amélioré son traitement et son diagnostic, les scientifiques ignorent encore beaucoup de choses sur la manière dont le système immunitaire lutte contre le cancer. Mais cela signifie aussi qu’il existe de nombreuses opportunités.
Image d’entête : micrographie de cellules de lymphocytes T (immunité cellulaire) se liant à une cellule cancéreuse de la prostate. (Steve Gschmeissner/Science Source)
Des scientifiques ont découvert un type de cellule immunitaire jusqu’alors inconnu qui se développe chez les personnes qui parviennent à vaincre le cancer. Contrairement aux autres cellules T (ou lymphocytes T) tueuses, celles-ci s’attaquent simultanément à plusieurs cibles associées au cancer, empêchant ainsi la formation de nouvelles tumeurs jusqu’à un an plus tard, ce qui pourrait déboucher sur des thérapies anticancéreuses plus efficaces.
Notre système immunitaire est notre première ligne de défense contre les agents pathogènes ou les maladies, y compris le cancer, mais il a parfois besoin d’aide. C’est la raison d’être d’un nouveau domaine de traitement appelé immunothérapie, qui consiste à prélever des cellules immunitaires sur un patient, à les renforcer et à les réintroduire dans l’organisme pour qu’elles s’attaquent au cancer avec une vigueur renouvelée.
Dans cette nouvelle étude, des chercheurs de l’université de Cardiff, au Royaume-Uni, ont examiné les différences biologiques qui pourraient exister entre les séries de traitement réussies et celles qui ont échoué chez différents patients. Pendant 10 ans, ils ont suivi un essai clinique de phase I et II portant sur ce que l’on appelle la thérapie par lymphocytes infiltrant la tumeur (TIL pour Tumor-infiltrating lymphocytes), qui se concentre sur les globules blancs déjà à l’œuvre dans la tumeur du patient.
Les chercheurs se sont concentrés sur les patients qui ont réussi à éliminer leur cancer après le traitement. Ils ont exposé des échantillons de sang des patients à des cellules tumorales prélevées précédemment sur le même patient et ils ont constaté que les lymphocytes T tueurs des survivants présentaient toujours des réponses très fortes, même un an après leur entrée en rémission.
Ils ont utilisé des algorithmes conçus pour prédire quelles cibles ces cellules T reconnaissaient, sur la base des différences entre les cellules saines et cancéreuses.
Selon le professeur Andy Sewell, chercheur principal de l’étude :
Une cellule T tueuse à multiples facettes provenant d’un survivant du cancer s’est révélée nettement plus apte à reconnaître le cancer qu’une cellule T tueuse anticancéreuse normale. En outre, la capacité de répondre simultanément à plusieurs protéines associées au cancer signifie que ces cellules T peuvent répondre à la plupart des types de cancer, car il suffit que les cancers expriment l’une des cibles aberrantes pour être identifiés comme dangereux et tués.
Il s’ensuit que l’équipe a trouvé un grand nombre de ces cellules T polyvalentes dans le sang des patients qui avaient réussi à se débarrasser de leur cancer, mais aucune chez les patients dont le cancer avait progressé.
L’équipe indique que de futurs travaux seront nécessaires pour confirmer définitivement le lien entre ces cellules T et l’élimination du cancer. Comprendre ce que ces cellules immunitaires ciblent devrait également permettre d’améliorer d’autres thérapies anticancéreuses.
Selon le Dr Garry Dolton, auteur principal de l’étude :
Nous avons maintenant constaté la présence de cellules T polyvalentes chez de nombreux survivants du cancer, de sorte que l’étape suivante consistera à examiner si ces cellules sont liées à un bon pronostic. Par ailleurs, nous pouvons modifier génétiquement ce type de lymphocytes T en laboratoire. Nous espérons donc étudier si les lymphocytes T à plusieurs voies peuvent être utilisés pour traiter un large éventail de cancers, de la même manière que les Cellules T CAR sont maintenant utilisées pour traiter certains types de leucémie. Il faudra encore quelques années pour mener à bien cette recherche, mais nous sommes encouragés par les résultats que nous avons obtenus jusqu’à présent.
L’étude publiée dans la revue Cell : Targeting of multiple tumor-associated antigens by individual T cell receptors during successful cancer immunotherapy et présentée sur le site de l’Université de Cardiff : Superior T-cell discovered in cancer survivors.