La première image confirmée d’une planète en formation âgée “seulement” de 5 à 6 millions d’années
Des chercheurs dirigés par un groupe de l’Institut Max Plank pour l’astronomie à Heidelberg, en Allemagne, observent actuellement une très jeune planète. L’objet de leur attention est une planète encore en formation qui orbite autour de PDS 70, une jeune étoile naine. C’est la première fois que des images claires d’une planète en formation sont réalisées, ainsi que de ses voyages à travers le nuage de poussière qui entoure la jeune étoile.
Les images ont été capturées à l’aide de l’instrument SPHERE installé sur le Unit Telescope 3 de l’Observatoire européen austral (ESO), un réseau de très grands télescopes (VLT pour Very Large Telescope) au Chili. SPHERE, le Spectro-Polarimetric High-contraste Exoplanet REsearch instrument, est l’un des plus puissants outils de recherche de planètes dont les astronomes disposent aujourd’hui. Ce qui distingue SPHERE dans le domaine de l’exploration exoplanétaire, c’est que, contrairement à la majorité de ses concurrents, il s’appuie sur l’imagerie directe : SPHERE prend des photographies réelles de planètes situées à des millions ou des milliards de kilomètres de distance.
SPHERE dans le laboratoire d’assemblage de l’IPAG avec tous les instruments intégrés. Il est actuellement installé sur le Very Large Telescope. (ESO)
L’instrument s’appuie sur une technique connue sous le nom d’imagerie à contraste élevé pour produire ses étonnants clichés. L’appareil utilise des techniques d’observation complexes et de puissants algorithmes de traitement de données pour extraire les faibles traces de lumière provenant de planètes autour d’étoiles brillantes. Les astronomes puisent dans la rotation de la Terre pour les aider à mieux observer ces planètes. SPHERE prend continuellement des images de l’étoile sur une période de plusieurs heures, tout en maintenant l’instrument aussi stable que possible. Cela crée des images d’une planète spécifique prises sous des angles légèrement différents et à différents points du disque stellaire (ou disque circumstellaire), donnant l’impression qu’elle tourne ou se déplace lentement. Le halo stellaire, quant à lui, semble immobile. La dernière étape consiste à combiner toutes les images et à filtrer toutes les parties qui ne semblent pas bouger, en bloquant les signaux qui ne proviennent pas de la planète elle-même.
La nouvelle planète, baptisée PDS 70b, se détache très clairement dans les images SPHERE enregistrées. Elle apparaît comme un point lumineux à droite de cette tache noircie au milieu de l’image d’entête. Le cercle noir est un coronographe, un gabarit que les chercheurs appliquent directement sur l’étoile, de peur que sa lumière ne bloque tout le reste de l’image.
PDS 70b est une géante gazeuse avec une masse de plusieurs fois celle de Jupiter. Elle est aussi éloignée de son étoile qu’Uranus l’est du Soleil. Actuellement, PDS 70d est en train de se creuser un chemin à travers le matériau formant la planète qui entoure la jeune étoile, notent les chercheurs, ce qui lui permet de se démarquer instantanément.
Quelques exemples de la façon dont de telles images, sous différents angles, aident les astronomes à extraire la lumière provenant d’exoplanètes. (Müller et Col./Astronomy & Astrophysics)
Selon Miriam Keppler, qui dirige l’équipe à l’origine de la découverte de la planète encore en formation :
Ces disques autour des jeunes étoiles sont les lieux de naissance des planètes, mais jusqu’à présent, seule une poignée d’observations ont détecté des indices de bébés planètes en eux. Le problème, c’est que jusqu’à présent, la plupart de ces planètes candidates auraient pu n’être que des caractéristiques du disque.
PDS 70d attire déjà beaucoup d’attention des astronomes. Un deuxième document, auquel a également participé Miriam Keppler, a donné suite aux observations initiales avec quelques mois d’étude. Les données de SPHERE ont également permis à l’équipe de mesurer la luminosité de la planète dans différentes longueurs d’onde, sur la base desquelles ils ont estimé les propriétés de son atmosphère. La planète est couverte de nuages épais, a expliqué l’équipe, et sa surface tourne actuellement autour des 1000°C, ce qui est beaucoup plus chaud que n’importe quelle planète du système solaire.
Les résultats ont également aidé les chercheurs à mieux définir une structure connue sous le nom de disque de transition. Il s’agit d’une structure protoplanétaire en forme d’anneau (ce qui signifie qu’elle est impliquée dans la formation planétaire). Les disques de transition ont une zone dégagé au milieu (d’où les planètes tirent leur matière), entourée d’un anneau de poussière et de gaz. Bien que ces “zones dégagées “ soient connues depuis plusieurs décennies et supposées être produites par l’interaction entre les planètes en formation et le disque de l’étoile hôte, c’est la première fois que nous les voyons.
Ces objets représentent des disques dont les régions internes sont relativement dépourvues de matière dispersée, bien que les régions externes contiennent encore des quantités substantielles de poussière.
Toutes ces données aident à étoffer nos connaissances des premiers stades de l’évolution planétaire, qui sont assez complexes et, jusqu’à présent, « mal compris », selon André Müller, chef de la deuxième équipe chargée d’enquêter sur la jeune planète, qui précise :
Nous avions besoin d’observer une planète dans le disque d’une jeune étoile pour vraiment comprendre les processus derrière la formation de la planète.
Les résultats aident également à améliorer nos connaissances sur la formation des planètes. En déterminant les propriétés atmosphériques et physiques de PDS 70d, les astronomes disposent maintenant de données fiables à partir desquelles ils peuvent extrapoler, ce qui aidera à améliorer la précision des modèles de formation planétaire.
Présentation de la découverte par l’ESO :
Les deux études publiées cette semaine dans Astronomy & Astrophysics : Discovery of a planetary-mass companion within the gap of the transition disk around PDS 70 et Orbital and atmospheric characterization of the planet within the gap of the PDS 70 transition disk et présentées sur le site de l’ESO : Première image confirmée d’une protoplanète acquise par le VLT de l’ESO.