Premières vidéos de cellules vivantes se déplaçant dans un organisme
Bien que nous sachions depuis des décennies comment les cellules se déplacent dans les organismes, cette vidéo est la première à dévoiler ce processus en 3 dimensions et à haute résolution.
Elle montre en temps réel des vues de l’intérieur du corps de cellules cancéreuses se déplaçant, du développement du circuit de la moelle épinière et des cellules immunitaires voyageant dans un poisson-zèbre (ci-dessous) :
Ces points bleus, avalés par les cellules immunitaires, sont des particules de dextrane, un polysaccharide sucré que l’on trouve dans de nombreuses substances, du vin aux médicaments pour le cœur en passant par la plaque dentaire.
Avec le fait d’être absolument fascinante, cette séquence est la première du genre, réalisée à l’aide d’un tout nouveau type de microscopie. Bien sûr, nous avons observé des cellules sous microscope pendant des centaines d’années. Mais lorsque nous essayons d’obtenir des images d’elles en mouvement, les résultats sont plutôt flous. Les images les plus claires proviennent toujours de groupes de cellules conservées sur des diapositives en verre.
Selon le chef d’équipe et physicien Eric Betzig, du Howard Hughes Medical Institute (HHMI) en Virginie (Etats-Unis) :
Cela entraine le doute tenace que nous ne voyons pas les cellules dans leur état d’origine, intégrées dans l’organisme dans lequel elles ont évolué.
Même lorsque nous essayons de voir une seule cellule à la fois, les cellules sont grillées sous la lumière intense et nos microscopes sont trop lents pour suivre toute l’action en 3D.
Selon Betzig :
Cela contribue également à notre crainte de ne pas voir les cellules dans leur forme naturelle et non stressée.
On dit souvent que voir c’est croire, mais quand il s’agit de biologie cellulaire, je pense que la question la plus appropriée est : » Quand pouvons-nous croire ce que nous voyons ? « .
Pour surmonter ce problème, Betzig et son équipe ont combiné deux technologies de microscopie : l’optique adaptative et la “lattice light sheet microscopy” (que votre Guru ne se risquera pas à traduire, mais qui est une version modifiée de la microscopie à nappe de lumière). L’optique adaptative est la technologie que les astronomes utilisent pour voir les objets célestes éloignés à travers l’atmosphère ondulante de la Terre.
Dans le cas de l’imagerie d’un organisme vivant, il s’agit de faire briller un laser sur tout ce que les chercheurs veulent photographier et de mesurer la quantité de lumière qui se déforme lorsqu’elle traverse les cellules et les tissus environnants. Ils contrecarrent ces interruptions/ déformations par des distorsions lumineuses égales, mais opposées, afin de permettre une meilleure visibilité de la zone ciblée. Cette méthode est similaire à celle des casques antibruit. Le résultat est une image totalement claire d’une cellule dans son environnement naturel.
La deuxième technique, “lattice light sheet microscopy”, permet aux chercheurs de capturer ces images très nettes en temps réel. Il s’agit de balayages rapides et répétés de couches ultrafines de lumière, ce qui crée une série d’images en 2D qui peuvent être intégrées dans une image 3D en mouvement à haute résolution, le tout sans faire griller la cellule ou interférer avec son activité. Le résultat est ce que veulent les scientifiques depuis des années, des images lumineuses, claires et vivantes de nos cellules en action sous le microscope. Même les structures à l’intérieur des cellules peuvent être vues à l’aide de cette technique.
Cette technique devrait mener à des découvertes et des percées que nous ne pouvons même pas imaginer pour l’instant. Par exemple, voici une cellule cancéreuse qui suit des appendices collants lorsqu’elle se déplace dans un vaisseau sanguin et tente de s’accrocher à la paroi :
Dynamique membranaire dans l’œil du poisson-zèbre :
Pour l’instant, cette microscopie est incroyablement chère et n’est pas particulièrement conviviale : le microscope que Betzig et son équipe utilisent s’étale sur une table de 3 mètres de long. Mais maintenant que nous avons une preuve de faisabilité, l’équipe prédit que ce n’est qu’une question de temps avant que cette technologie ne révolutionne notre compréhension de la biologie et des cellules humaines.
L’équipe travaille déjà à la miniaturisation et à abaisser les couts de la prochaine génération du microscope. Et ils partageront aussi les plans gratuitement, afin que d’autres laboratoires puissent contribuer à son amélioration.
L’étude publiée Science : Observing the cell in its native state: Imaging subcellular dynamics in multicellular organisms et présentée sur le site du Howard Hughes Medical Institute : New Microscope Captures Detailed 3-D Movies of Cells Deep Within Living Systems.