SpaceX a envoyé dans l’espace 60 de ses 12 000 satellites prévus pour assombrir un peu plus le ciel des astronomes
La semaine dernière, la société SpaceX a lancé 60 satellites de télécommunications Starlink, le premier lancement majeur de son ambitieuse flotte de plus de 12 000 satellites, dans le but de créer à terme des services Internet ultrarapides pour le monde entier, jusqu’aux endroits les plus reculés (50% plus rapide que la fibre optique).
La fusée Falcon 9 sur la rampe de lancement avant la mission Starlink. ( SpaceX)
Les 60 satellites Starlink entassés dans le nez de la fusée Falcon 9 (SpaceX)
Le lancement des satellites de 227 kg s’est déroulé sans accroc, mais une vidéo spectaculaire du » train » de satellites au-dessus des Pays-Bas (GIF d’entête et vidéo ci-dessous), prise par l’astronome amateur Marco Langbroek, a suscité une discussion sur les problèmes potentiels que cette flotte Starlink pourrait engendrer dans le ciel nocturne.
La vidéo ci-dessous n’est pas celle à laquelle les satellites Starlink ressembleront lorsqu’ils auront été entièrement déployés, elle a été prise moins de 24 heures après le lancement. Les satellites ne sont pas assez brillants pour être visibles à l’œil nu, et une fois qu’ils se disperseront davantage, ils devraient à nouveau s’obscurcir légèrement.
Mais l’œil seul n’est pas tout quand il s’agit des besoins des astronomes. Les satellites existants sont déjà difficiles à gérer pour les télescopes terrestres, mais les astronomes ont mis au point des techniques astucieuses pour les faire disparaître. La plupart des grands télescopes optiques masquent automatiquement les images des satellites qui passent, tandis qu’avec les radiotélescopes, le ciel est balayé dans les écarts de fréquence entre les signaux de navigation par satellite (comme le GPS).
Selon les données actuelles du Bureau des affaires spatiales des Nations Unies, il y a actuellement 5 162 objets en orbite autour de la Terre, dont environ 2 000 sont opérationnels. Le déploiement d’un réseau de 12 000 satellites serait donc sans précédent. L’environnement dans lequel nous vivons est constamment rempli d’ondes radio, de WiFi, de tours téléphoniques et autres réseaux sans fil qui émettent tous beaucoup de bruit radio, mais les satellites sont bien pires pour les radiotélescopes que tout ce qui se trouve au sol.
Simulation du futur “maillage” des satellites Starlink. (Mark Handley/ University College London)
Ou via un Tweet de la société Space X :
Starlink will connect the globe with reliable and affordable high-speed broadband services pic.twitter.com/dWVvPwVWU4
— SpaceX (@SpaceX) 24 mai 2019
Pour les astronomes, une constellation complète de satellites Starlink pourrait probablement signifier la fin des radiotélescopes destinés à capter les hyperfréquences (Micro-onde) terrestres, qui balayent le ciel à la recherche d’objets radioélectriques de faible intensité. Les astronomes estiment que la flotte Starlink rendra cette interférence radioélectrique « inévitable », et certains suggère de « construire un radiotélescope de l’autre côté de la Lune », à l’abri du bruit radio ici sur la planète.
Il semble que SpaceX n’ait pas encore résolu tous les problèmes liés aux interférences radioastronomiques.
L’an dernier, l’astronome Harvey Liszt, de l’US National Radio Astronomy Observatory, a écrit à la Federal Communications Commission (FCC) des États-Unis pour lui faire part de ses préoccupations concernant ce projet. De plus, en 2015, des experts de l’industrie se sont demandé si des projets comme Starlink pouvaient même être rentables.
Mais malgré diverses préoccupations, et que ces 60 premiers satellites sont encore considérés comme des « satellites de test”, SpaceX a confirmé sur Twitter que jusqu’à six lancements sont prévus en 2019.
Avec autant de satellites, ce n’est pas seulement la pollution par radiofréquence qui pourrait devenir un problème. Il y a aussi les déchets spatiaux.
Placés en orbite terrestre basse, où se trouvent la plupart des débris, ces 12 000 satellites représenteront 40 % de plus d’objets en quelques années, par rapport aux 60 années qu’il a fallu pour accumuler la masse actuelle de débris spatiaux.
Pour être juste envers SpaceX, ils ont un plan de réduction des débris spatiaux qui a été déposé auprès de la FCC en 2017. Celui-ci indiquait comment les satellites se désorbiteraient à la fin de leur vie utile (d’environ 5 à 7 ans) à un rythme beaucoup plus rapide que ce qui est requis selon les normes internationales.
Mais il est peu probable que cela aide si un satellite est abimé. Et comme l’a souligné la récente alerte de la Station spatiale internationale, il suffit d’un petit trou pour être un gros problème. Même un petit débris peut endommager un satellite.
Ce genre d’impact, avec tant de satellites autour de nous, pourrait déclencher une cascade de collisions connue sous le nom de syndrome de Kessler. Le scénario, proposé par le scientifique de la NASA Donald Kessler en 1978, est le suivant : lorsque la quantité d’objets sur l’orbite terrestre devient suffisamment élevée, une collision pourrait créer un effet de cascade, créant plus de débris et augmentant la probabilité d’autres collisions.
On estime qu’au moins 40 % de toutes les missions n’ont pas suivi les directives de l’ONU et d’autres organismes pour réduire au minimum la quantité de nouveaux débris créés.
Pour Mark Handley, chercheur dans le domaine des réseaux informatiques à l’University College de Londres, qui a étudié le projet Starlink, ce projet pourrait affecter la vie de » potentiellement tout le monde » en apportant le haut débit et la large bande à la plupart des régions du monde.
Alors que le Guru terminait cet article Elon Musk, patron de SpaceX répondait :
Il y a déjà 4900 satellites en orbite, que les gens remarquent ~0% du temps. Starlink ne sera vu par personne à moins de regarder très attentivement et aura un impact de ~0% sur les progrès de l’astronomie. On doit mettre les télescopes en orbite de toute façon. L’atténuation atmosphérique est terrible.
There are already 4900 satellites in orbit, which people notice ~0% of the time. Starlink won’t be seen by anyone unless looking very carefully & will have ~0% impact on advancements in astronomy. We need to move telelscopes to orbit anyway. Atmospheric attenuation is terrible. pic.twitter.com/OuWYfNmw0D — Elon Musk (@elonmusk) 27 mai 2019
A partir du compte Twitter de SpaceX, du blog de l’astronome amateur Marco Langbroek : WOWOWOW!!!! A SPECTACULAR view of the SpaceX Starlink satellite train!, de l’étude de Mark Handley de l’University College de Londres : Delay is Not an Option: Low Latency Routing in Space et l’interview de l’astronome Harvey Liszt : Satellite constellations and radio astronomy.
Il semble qu’il manque une citation dans le 3e paragraphe 15e ligne:
« L’une des raisons pour lesquelles nous n’avons pas de plan complet de SpaceX concernant les 12 000 satellites pourrait être que c”. »
Encore merci pour votre travail monsieur Guru : )
Merci David ! C’était une phrase qui devait être supprimée du brouillon du Guru.