Peindre des yeux sur le postérieur des vaches peut les protéger des lions
Les agriculteurs du Botswana sont depuis longtemps habitués à ce que les lions et d’autres prédateurs attaquent leurs vaches de temps en temps. Mais il pourrait y avoir une solution simple à ce problème, selon une nouvelle étude. C’est un peu curieux et drôle, mais ça peut marcher.
Les chercheurs ont décrit une nouvelle méthode qui consiste à peindre des yeux sur le dos des vaches, sur leurs fesses, en gros. Cette méthode est une alternative humaine à l’utilisation d’un contrôle mortel et elle est également moins coûteuse et plus écologique que l’utilisation de clôtures pour séparer les vaches des prédateurs.
C’est simple, bon marché, indolore et étonnamment efficace, notent les chercheurs.
Selon le chercheur Neil Jordan :
Les lions sont des prédateurs en embuscade qui comptent sur la traque, et donc sur l’élément de surprise, de sorte qu’être vu par leur proie peut les amener à abandonner la chasse. Nous avons testé si nous pouvions pirater cette réponse pour réduire les pertes de bétail, protégeant potentiellement les lions et leurs moyens de subsistance.
Jordan s’est associé avec le Botswana Predator Conservation Trust (BPCT) et il a réalisé une étude pilote de 10 semaines avec un agriculteur local. Ils ont peint des yeux sur un tiers des 62 vaches et ils ont compté le bétail chaque nuit pour voir combien avaient survécu. Étonnamment, trois seulement ont été tuées pendant cette période, et aucune d’entre elles n’avait d’yeux peints. Les lions semblaient éviter les vaches avec des yeux sur le postérieur.
(Ben Yexley/ UNSW)
Les résultats ont encouragé Jordan à étendre ses recherches, en réalisant une étude de 4 ans. Avec son équipe, il a travaillé avec des agriculteurs de la région du delta de l’Okavango, en prélevant un échantillon de plus de 2 000 animaux sur 14 troupeaux.
Ils ont utilisé de la peinture acrylique, noire et blanche ou jaune, et l’ont appliquée avec des pochoirs en mousse en forme d’œil, bien visibles pour le prédateur.
(Bobby-Jo Photography)
Les chercheurs ont peint les motifs de l’œil sur un tiers du bétail, tandis qu’un autre tiers n’a reçu que des marques de croix et que le dernier tiers n’était pas marqué. Les bovins marqués de ces yeux avaient plus de chances de survivre que ceux du même troupeau qui n’avaient pas été marqués ou qui l’avaient été d’une croix. En fait, aucune vache qui avait été marquée avec des yeux n’a été tuée pendant les quatre années de l’étude, ce qui est en soi une remarquable réussite.
Toujours selon Jordan :
Les bovins marqués de simples croix avaient beaucoup plus de chances de survivre que les bovins non marqués du même troupeau. Bien que les bovins marqués des yeux aient eu plus de chances de survivre que les autres groupes, cet effet général de « visibilité » suggère que les nouvelles marques de croix étaient meilleures que l’absence totale de marques, ce qui était inattendu.
Outre la publication d’une étude présentant leurs conclusions, les chercheurs ont également réalisé des guides pratiques sur la technique de la « vache à œil » en anglais et en setswana. Ils espèrent que les agriculteurs adopteront cet outil simple, mais ils soulignent qu’il est important de comprendre les limites potentielles de son utilisation et de faire ses propres choix. Pour l’essentiel, la méthode n’est pas parfaite, mais elle peut effectivement aider.
(Bobby-Jo Photography)
Il y a encore quelques inconnues. Jordan explique que dans le cadre de la conception expérimentale, il y avait toujours des vaches non marquées dans le troupeau, ce qui signifie qu’il n’est pas certain que le dessin serait encore efficace si ces vaches n’étaient pas là.
Une autre chose à prendre en compte est l’accoutumance, car les prédateurs pourraient s’habituer à la dissuasion et finir par l’ignorer. Ce n’est pas parce qu’elle fonctionne maintenant, qu’elle fonctionnera dans dix ans…
La population de lions africains est en fait passée de 100 000 dans les années 1990 à entre 23 000 et 39 000 en 2016, les représailles des agriculteurs jouant un rôle important à cet égard. Il est compréhensible que les agriculteurs locaux souhaitent que leurs animaux soient en sécurité, mais les défenseurs de l’environnement cherchent depuis longtemps des moyens de réduire les conflits. Aujourd’hui, ils disposent enfin d’un outil qu’ils peuvent au moins essayer dans ces situations risquées.
L’étude publiée dans Communications Biology : Artificial eyespots on cattle reduce predation by large carnivores et les chercheurs décrivent leurs travaux dans un article publiée dans The Conversation : Lions are less likely to attack cattle with eyes painted on their backsides.
Est-ce qu’il y a une chance que la même stratégie fonctionne aussi contre le loup dans nos alpages ?
J ai souvenir d une technique similaire contre les attaques de tigres pour des humains, avec un masque avec des yeux porté à l arriere de la tete.
Me posais la question en lisant le titre de cet article : est ce que ça marche encore ?