Fish Mix : une DJ pour comprendre les circuits cérébraux et l’audition chez les bébés poissons
Une DJ transformée en chercheuse a conçu un haut-parleur pour des larves de poisson-zèbre, leur faisant écouter toute une gamme de rythmes allant des sons qu’ils rencontreraient dans la nature au classique « U Can’t Touch This » de MC Hammer, qui a d’ailleurs apprécié cette étude.
Les résultats, publiés cette semaine (lien plus bas), révèlent que les larves entendent beaucoup mieux que ce que l’on pensait auparavant.
L’audition sous l’eau est cruciale pour la survie des poissons, car elle leur permet de détecter les prédateurs, de trouver de la nourriture et de communiquer. L’étude de leur processus auditif pourrait nous donner un aperçu de l’audition des mammifères.
Cette nouvelle étude, menée par Rebecca Poulsen du Queensland Brain Institute de l’Université du Queensland (UQ/ Australie), a combiné un haut-parleur de poisson avec l’imagerie de l’intégralité du cerveau, en suivant la façon dont les circuits neuronaux des poissons sont activés en réponse à différents sons.
Selon Poulsen :
Pendant de nombreuses années, ma carrière musicale s’est déroulée dans la production et le DJ-ing, j’ai trouvé que l’acoustique sous-marine était beaucoup plus compliquée que les fréquences aériennes. J’ai conçu le haut-parleur pour qu’il adhère à la chambre dans laquelle se trouvent les larves, de sorte que tout le son que je joue est reçu avec précision par les larves, sans aucune perte dans l’air.
Les larves de poisson-zèbre ont été utilisées comme modèle, car elles sont si minuscules que les chercheurs ont pu étudier l’intégralité de leur cerveau au microscope.
Leur système auditif est également suffisamment développé pour que nous puissions obtenir des informations significatives sur le traitement auditif. Parce que nous voyons le cerveau entier et l’activité de chaque cellule à l’intérieur, nous pouvons construire des modèles de traitement auditif d’une manière qui n’est possible dans aucun autre système modèle de vertébré.
Une variété de sons différents ont été testés, y compris l’eau courante, d’autres poissons qui nagent devant, des objets qui frappent la surface de l’eau et des prédateurs qui nagent au-dessus. Les chercheurs ont voulu vérifier si les poissons pouvaient faire la différence entre différentes fréquences, les bruits blancs, les sons à forte intensité ou les sons à crescendo progressif.
Toujours selon Poulsen :
Nous avons trouvé des profils neuronaux uniques pour chacune de ces différentes composantes du son. Cela ajoute à ce que nous savons sur l’audition des larves de poisson-zèbre et montre que le système auditif est plus sophistiqué qu’on ne le pensait auparavant.
Le coauteur, Ethan Scott, également de l’UQ, explique :
La pensée conventionnelle est que les larves de poissons ont une audition rudimentaire, et n’entendent que les sons de basse fréquence, mais nous avons montré qu’elles peuvent entendre des sons de fréquence relativement élevée et qu’elles répondent à plusieurs propriétés spécifiques de divers sons.
Leurs résultats montrent que les larves peuvent détecter des fréquences allant jusqu’à 4000 Hz (contrairement aux 600-800 Hz des études précédentes) et distinguer des fréquences allant jusqu’à 2500 Hz.
Poulsen de conclure :
Comme nous avons la possibilité d’observer l’ensemble du cerveau répondant au son dans le modèle de la larve de poisson-zèbre, nous pouvons potentiellement obtenir des informations sur le traitement auditif au niveau du cerveau entier, des régions et des cellules qui seront utiles à d’autres animaux, y compris les humains.
Imagerie de l’ensemble du cerveau des larves de poisson-zèbre, pendant qu’elles profitaient de la musique. (Rebecca Poulsen)
L’étude publiée dans la revue Current Biology : Broad frequency sensitivity and complex neural coding in the larval zebrafish auditory system et présentée sur le site de l’Université du Queensland : ‘Fish DJ’ tackles fish hearing.