Un piège constitué d’ADN pour capturer les virus
Des chercheurs de l’Université technique de Munich (TUM) ont mis au point une nouvelle méthode pour traiter les infections virales en fabriquant des pièges. L’équipe a plié l’ADN en nanocapsules dotées de points de fixation spécialisés à l’intérieur, qui pourraient saisir les virus et les neutraliser.
Image d’entête : recouvertes à l’intérieur de molécules fixant les virus, les nano-coquilles constituées d’ADN retiennent fermement les virus et les rendent ainsi inoffensifs. (Elena-Marie Willner / DietzLab / TUM)
Ces dernières années, l’équipe a expérimenté la programmation de l’ADN pour qu’il se plie en « blocs » et en plaques qui s’assemblent ensuite en formes semblables à celles d’un origami. Pour leurs nouveaux travaux, les chercheurs ont décidé de voir s’ils pouvaient utiliser cette technologie pour fabriquer des corps creux ayant à peu près la taille d’un virus, qui pourraient ensuite s’y fixer et les empêcher d’infecter les cellules.
Pour ce faire, l’équipe est partie d’une forme appelée icosaèdre, qui est constituée de 20 surfaces triangulaires. En utilisant un origami d’ADN, ils ont créé une demi-coque de 180 sous-unités, et ils ont garni le centre de molécules qui se lient aux virus. Les surfaces extérieures sont ensuite irradiées par des rayons UV et traitées avec du polyéthylène glycol et de l’oligolysine, pour empêcher les pièges de se dégrader dans les fluides corporels.
Images au microscope cryo-électronique de demi-coques nanométriques fabriquées à partir d’ADN. (Christian Sigl / DietzLab / TUM)
L’équipe a testé les pièges dans des cultures cellulaires de laboratoire, contenant du sérum de souris, des cellules humaines et des virus. Les structures sont restées stables dans le sérum pendant 24 heures et ont réussi à capturer deux types de virus différents : l’hépatite B et les virus adéno-associés (AAV). Dans les deux cas, les pièges ont empêché les virus d’infecter les cellules humaines.
Selon Hendrik Dietz, auteur correspondant de l’étude :
Même une simple demi-coquille de la bonne taille montre une réduction mesurable de l’activité du virus. Si nous mettons cinq sites de liaison pour le virus à l’intérieur, par exemple des anticorps adaptés, nous pouvons déjà bloquer le virus de 80 %, si nous en incorporons davantage, nous atteignons un blocage complet.
Le concept de piège à virus semble un peu familier, mais adopte une approche différente. L’année dernière, une autre équipe de scientifiques allemands a conçu des bactériophages qui imitent les structures des cellules pulmonaires auxquelles le virus de la grippe se lie, ce qui réduit le nombre de virus qui vont ensuite infecter les vraies cellules.
(Christian Sigl / DietzLab / TUM)
Les chercheurs indiquent que la prochaine étape consistera à tester ces pièges sur des souris, et ils pensent qu’ils devraient être bien tolérés par le corps humain. La technique sous-jacente de construction de nanostructures à partir d’origami d’ADN pourrait également avoir d’autres applications.
Toujours selon Dietz :
En plus de l’application proposée comme piège à virus, notre système programmable crée également d’autres opportunités. Il serait également concevable de l’utiliser comme porteur d’antigènes multivalents pour les vaccinations, comme porteur d’ADN ou d’ARN pour la thérapie génique ou comme véhicule de transport pour les médicaments.
L’étude publiée dans Nature Materials : Programmable icosahedral shell system for virus trapping et présentée sur le site de l’Université technique de Munich : The virus trap.
Certains ne seront pas d’accord qu’on leur incorpore des nano-trucs indestructibles dans le corps…