Tel un dragon, une lointaine étoile a craché un flux de gaz brûlant à l’échelle planétaire
Si quelque chose d’infâme devait se produire dans l’univers, il semblerait que cela proviendrait d’une étoile nommée EK Draconis dans la constellation du Dragon. C’est exactement ce qui s’est produit à 111 années-lumière de la Terre l’année dernière, lorsque l’on a observé que cette lointaine étoile avait éjecté une explosion massive d’énergie, une super éruption stellaire chargeant des particules bien plus puissantes que ce que les scientifiques ont pu observer à partir d’une étoile semblable au Soleil.
Image d’entête : représentation artistique d’un filament supermassif libéré par une super éruptions stellaires sur EK Draconis s’approchant de jeunes planètes. (NAOJ)
Une étude menée par un groupe de recherche dirigé par Kosuke Namekata et Hiroyuki Maehara de l’Observatoire astronomique national du Japon (NAOJ) a observé la jeune étoile de type solaire à l’aide de plusieurs satellites et télescopes, dont le télescope Seimei de 3,8 mètres situé dans l’ouest du Japon et le Transiting Exoplanet Survey Satellite (TESS) de la NASA. Les chercheurs ont observé EK Draconis pendant 32 nuits au cours de l’hiver et du printemps 2020. Le 5 avril, l’équipe a eu de la chance en regardant l’étoile entrer en éruption.
Ils ont ainsi observé une super éruption dont la taille pourrait griller les planètes en orbite autour de notre propre Soleil si quelque chose de similaire se produisait actuellement dans le système solaire. Dans leur étude, les chercheurs ont trouvé des preuves d’une éjection de masse coronale, l’éruption d’un filament supermassif de gaz plasmatique si chaud qu’il se décompose en ions et en électrons. Ce filament était également de grande taille, 10 fois plus massif que toute éjection de masse jamais observée sur le Soleil. Cette monstrueuse éjection a été observée à une vitesse de 500 km/sec.
Selon Yuta Notsu, chercheur associé au Laboratoire de physique atmosphérique et spatiale de l’université du Colorado, à Boulder, et à l’Observatoire solaire national des États-Unis, qui a travaillé sur le projet :
Les éjections de masse coronale peuvent avoir un sérieux impact sur la Terre et la société humaine. Ce type d’éjection de masse importante pourrait, en théorie, également se produire sur notre soleil. Cette observation peut nous aider à mieux comprendre comment des événements similaires ont pu affecter la Terre et même Mars pendant des milliards d’années.
Les éjections de masse coronale se produisent souvent juste après qu’une étoile ait déclenché une éruption, c’est-à-dire un éclat soudain et intense de rayonnement qui peut s’étendre loin dans l’espace. Des recherches récentes ont suggéré que sur notre Soleil, cette séquence d’événements pourrait être relativement calme, du moins pour autant que les scientifiques l’aient observé. En 2019, par exemple, Notsu et ses collègues ont publié une étude montrant que les jeunes étoiles semblables au soleil autour de la galaxie semblent connaître de fréquentes super-éruptions, comme nos propres éruptions solaires mais des dizaines voire des centaines de fois plus puissantes. Techniquement, ce type de super-éruption pourrait se produire chez nous, mais ce n’est pas quelque chose qui devrait nous empêcher de dormir la nuit. Un tel événement pourrait se produire une fois tous les milliers d’années environ.
Les chercheurs pensent que ces filaments chauds et rapides se produisent très probablement dans les étoiles plus jeunes. En fait, si un tel phénomène s’est produit dans notre système solaire au cours de ses premières années, il pourrait avoir contribué à donner à la Terre et à Mars l’aspect qu’elles ont aujourd’hui.
Toujours selon Notsu :
L’atmosphère de la planète Mars actuelle est très fine par rapport à celle de la Terre. Dans le passé, nous pensons que Mars avait une atmosphère beaucoup plus épaisse. Les éjections de masse coronale peuvent nous aider à comprendre ce qui est arrivé à la planète pendant des milliards d’années.
L’étude publiée dans Nature Astronomy : Probable detection of an eruptive filament from a superflare on a solar-type star et présentée sur le site de l’Observatoire astronomique national du Japon : Fiery Dragon’s Breath May Scorch Young Planets.