Découverte d’un "bouchon oral" qui empêche les baleines de se noyer en mangeant
Les baleines sont célèbres pour se nourrir en engloutissant d’énormes quantités d’eau pour capturer de minuscules krills. Mais comment font-elles pour ne pas se noyer à chaque bouchée ? Des chercheurs ont découvert un « clapet oral » (oral plug) dans la gorge de certaines espèces qui bloque leurs voies respiratoires ou leur œsophage selon les besoins.
Le « lunge-feeding » (happer les poissons la bouche grande ouverte) est une stratégie spécifique utilisée par certaines baleines à fanons, comme les baleines à bosse et les baleines bleues. L’animal nage à grande vitesse vers un grand banc de proies et en récupère le plus possible dans sa gigantesque bouche. Bien entendu, cela implique de capter d’énormes quantités d’eau, que les baleines recrachent en la filtrant à travers leurs fanons, conservant leur nourriture, le krill.
Mais comment elles parviennent à réaliser cet exploit, sans inonder leurs poumons ou leurs intestins d’eau, reste un mystère. La science devrait déjà le savoir, mais l’anatomie des baleines est un sujet assez obscur, car les dissections sont rarement pratiquées.
Une baleine à bosse du sanctuaire marin national de Stellwagen Bank dans le Massachusetts. (Ari Friedlaender)
Dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont identifié un bulbe charnu qui agit comme un obturateur oral, à l’arrière de la bouche du rorqual commun. Lorsque l’animal respire, ce bouchon oral se trouve au fond derrière la langue, permettant à l’air de passer du conduit nasal aux voies respiratoires inférieures tout en empêchant tout ce qui se trouve dans la bouche de passer.
Lorsque la baleine veut avaler son repas, ce clapet se déplace vers le haut et l’arrière, bloquant les voies nasales et ouvrant un passage de la bouche à l’œsophage. Dans le même temps, une structure cartilagineuse bloque l’entrée du larynx et les voies respiratoires inférieures, empêchant la nourriture ou l’eau d’atteindre les poumons.
A partir de l’étude : positions des structures laryngées et pharyngées pendant la respiration et la déglutition chez un rorqual commun. (Kelsey N. Gi et col./ Current Biology)
Selon le Dr Kelsey Gil, auteur principal de l’étude :
Nous n’avons pas vu ce mécanisme de protection chez d’autres animaux, ni dans la littérature. Une grande partie de nos connaissances sur les baleines et les dauphins provient des baleines à dents, qui ont des voies respiratoires complètement séparées, donc des hypothèses similaires ont été faites sur les baleines qui se nourrissent à la longe.
L’équipe affirme que cette anatomie spécialisée était probablement la clé pour aider les baleines à devenir les plus grands animaux sur Terre.
Selon le Dr Robert Shadwick, auteur principal de l’étude :
L’alimentation par filtrage de masse sur des essaims de krills est très efficace et constitue le seul moyen de fournir la quantité considérable d’énergie nécessaire pour soutenir une telle taille corporelle. Cela ne serait pas possible sans les caractéristiques anatomiques particulières que nous avons décrites.
Les chercheurs prévoient de continuer à étudier ces caractéristiques anatomiques, afin de mieux comprendre ces animaux et l’impact que l’activité humaine peut avoir sur leurs habitudes alimentaires.
L’étude publiée dans Current Biology : Anatomical mechanism for protecting the airway in the largest animals on earth et présentée sur le site de l’Université de la Colombie-Britannique : Here’s why whales don’t drown when they gulp down food underwater.