Le microphone de l’astromobile Perseverance enregistre le son d’un grand tourbillon de poussière sur Mars
Depuis les déserts froids et arides de Mars, les photos sont désormais régulières grâce aux astromobiles (rovers) et aux satellites qui ratissent la planète. Mais il est rare que nous puissions écouter les sons du monde martien.
Image d’entête : le 14 mars 2012, le puissant appareil photo, HiRISE de la sonde spatiale Mars reconnaissance Orbiter (MRO) de la NASA obtenait cette image d’un très grand tourbillon de poussière, qui n’est pas celui étudié ici. (NASA)
Une nouvelle étude (lien plus bas) a utilisé la SuperCam de l’astromobile Perseverance pour obtenir un très bref aperçu des sons martiens, avec le tout premier enregistrement sonore d’un tourbillon de poussière sur la planète rouge.
Selon le professeur Roger Wiens, spécialiste des sciences planétaires à l’université Purdue (États-Unis) et superviseur de la SuperCam :
Nous pouvons en apprendre beaucoup plus en utilisant le son qu’avec d’autres outils. Ils prennent des mesures à intervalles réguliers. Le microphone nous permet d’échantillonner, pas tout à fait à la vitesse du son, mais près de 100 000 fois par seconde. Cela nous aide à avoir une idée plus précise de ce à quoi ressemble Mars.
Les tourbillons de poussière sont de la poussière, du sable ou même du gravier emporté par le vent qui se produisent aussi bien sur Mars que sur Terre. Alors que ceux de la Terre peuvent atteindre 300 mètres de haut, sur Mars ils peuvent s’élever jusqu’à 8 kilomètres.
C’est surtout par chance que l’équipe a réussi à obtenir cet enregistrement, car le microphone de Perseverance n’enregistre qu’environ 3 minutes d’audio tous les quelques jours. L’équipe appelle cela « une rencontre fortuite ». Mais jusqu’à présent, l’équipe dispose de preuves de la présence de près de 100 tourbillons de poussière depuis l’atterrissage de l’astromobile en février 2021, c’était donc probablement une question de temps.
Perseverance enregistre des images beaucoup plus fréquemment, de sorte que l’équipe a pu voir et entendre le tourbillon de poussière simultanément.
Ces images ont été prises lors de la rencontre avec le tourbillon de poussière par la Navcam de l’astromobile. L’échelle de couleurs va de la plus faible teneur en poussière (bleu) à la plus forte teneur en poussière (jaune). (NASA/ JPL-Caltech/ Space Science Institute/ ISAE-SUPAERO)
Les sons enregistrés associés aux images ci-dessus. (NASA/ Nature Communications)
Selon l’équipe, dans sa nouvelle étude :
La rencontre avec le tourbillon de poussière a également été imagée en même temps par la caméra de navigation du rover Perseverance et observée par plusieurs capteurs de l’instrument Mars Environmental Dynamics Analyzer. En combinant ces données multi-sensorielles uniques avec la modélisation, nous montrons que le tourbillon de poussière faisait environ 25 mètres de large, au moins 118 mètres de haut, et qu’il est passé directement au-dessus du rover en se déplaçant à environ 5 mètres par seconde.
Le microphone de l’astromobile a également capté le son émis par un total de 308 grains de poussière. Les chercheurs ont ensuite calculé que la concentration maximale de poussière dans le vortex était de 27 particules par mètre, ce qui est peu. La zone de Mars où Perseverance se déplace ne semble pas être un endroit très venteux.
A partir de l’étude : le spectrogramme du niveau de pression acoustique du microphone montrant le bruit du vent, les impacts de grains et également l’harmonique de pompe du rover à 760 Hz, et l’écho acoustique à ~6 kHz dû aux réflexions sonores de la base du microphone. (N. Murdoch et col./ Nature Communications)
Nous pourrions observer la chute de pression, écouter le vent, puis avoir un peu de silence qui correspond à l’œil de la petite tempête, puis entendre à nouveau le vent et regarder la pression remonter.
Cette image présente la taille relative du tourbillon de poussière par rapport à l’astromobile Perseverance. Le diamètre du tourbillon de poussière (cercles blancs), déterminé à partir de la combinaison des données et de la modélisation, est de 25 m. La flèche en pointillés bleus indique la direction de la trajectoire du tourbillon de poussière. Le champ de vision de la caméra de navigation (Navcam) de l’astromobile est indiqué par un cône pâle. (N. Murdoch / ISAE-SUPAERO)
Le vent est rapide, environ 25 miles par heure (40 km/h), mais à peu près ce que vous verriez dans un tourbillon de poussière sur Terre. La différence est que la pression de l’air sur Mars est tellement plus faible que les vents, bien que tout aussi rapides, poussent avec environ 1 % de la pression qu’aurait un vent de même vitesse sur Terre. Ce n’est pas un vent puissant, mais clairement suffisant pour projeter des particules de sable dans l’air et créer un tourbillon de poussière.
Cela signifie que ces tourbillons de poussière sont peu susceptibles de renverser les équipements que les astronautes apportent sur Mars, mais il a été suggéré qu’il a contribué à emporter la poussière des panneaux solaires d’astromobiles comme Opportunity et Spirit.
Toujours selon Wiens :
Les équipes de ces rovers ont constaté une lente diminution de la puissance pendant plusieurs jours ou semaines, puis un sursaut. C’est alors que le vent a nettoyé les panneaux solaires.
L’étude publiée dans Nature Communications : The sound of a Martian dust devil.