Des chercheurs percent le secret de la formation des fissures de Charon, la lune de Pluton
En 2015, un engin spatial de la taille d’une grosse voiture se trouvait à 5 milliards de kilomètres de là, lors de son approche la plus proche de la seule « ex-planète » de notre système solaire.
Image d’entête : la lune de Pluton, Charon et ses chasmas (fissures de grande taille). (NASA/ Johns Hopkins APL/ SwRI)
Il semble que même 8 ans plus tard, les scientifiques peuvent encore extraire des données du survol de la sonde New Horizons. De nouveaux modèles suggèrent que les grandes fissures sur Charon, la lune de Pluton, pourraient avoir été causées par la congélation et l’expansion d’océans internes, comme une bouteille d’eau pleine placée au congélateur.
Selon Alyssa Rhoden, astrogéophysicienne au Southwest Research Institute (États-Unis) :
Une combinaison d’interprétations géologiques et de modèles d’évolution thermo-orbitale implique que Charon possédait un océan liquide de subsurface qui a fini par geler. Lorsqu’un océan interne gèle, il se dilate, créant de grandes contraintes dans sa coquille glacée et pressurisant l’eau en dessous. Nous soupçonnions que c’était la source des grands canyons et des coulées cryovolcaniques de Charon.
Ces fissures de grande envergure sur d’autres mondes sont appelées « chasmas« , et les scientifiques avaient déjà une assez bonne idée que les océans à l’intérieur de la lune étaient causés par l’expansion de la glace.
Cependant, les nouvelles recherches suggèrent que les modèles actuels de la coquille glacée de Charon sont beaucoup trop épais pour être fissurés lorsqu’ils sont gelés. Et si la coquille glacée est trop fine, elle aurait fondu et n’aurait pas laissé ces chasmas à la surface.
Toujours selon Rhoden :
Soit la coquille de glace de Charon avait moins de 10 km d’épaisseur lorsque les coulées se sont produites, alors que l’épaisseur indiquée est de plus de 100 km, soit la surface n’était pas en communication directe avec l’océan dans le cadre du processus éruptif. Si la coquille de glace de Charon avait été suffisamment fine pour être entièrement fissurée, cela impliquerait une congélation de l’océan bien plus importante que ce qu’indiquent les canyons identifiés sur l’hémisphère de rencontre de Charon.
Avec un rayon de seulement 600 kilomètres, une coquille de glace de 100 kilomètres serait en effet incroyablement épaisse. Cependant, les modèles de la nouvelle étude suggèrent que la congélation de l’océan peut encore provoquer les profondes fissures observées sur les chasmas, mais sans geler les couches internes de l’océan.
L’équipe pense que c’est ce qui a pu se produire, ajoutant dans leur étude (lien plus bas) :
Ici, nous identifions les conditions dans lesquelles un océan gelé pourrait créer des fissures qui pénètrent entièrement sa coquille de glace, reliant la surface de Charon à son océan et facilitant le cryovolcanisme d’origine océanique.
Nous constatons également que la congélation de l’océan peut facilement générer de profondes fissures qui ne pénètrent pas entièrement dans l’océan, ce qui pourrait être la base des canyons de Charon.
Cependant, d’autres recherches sont nécessaires pour en être bien sûr. Rhoden suggère que si d’autres grandes caractéristiques, comme des cryovolcans, pouvaient être trouvées sur le côté non imagé de Charon, la recherche pourrait être confirmée.
Toutefois, la sonde New Horizons étant sur le point de quitter le système solaire et les plans d’envoi d’un autre vaisseau spatial étant encore assez vagues, cela pourrait prendre un certain temps.
L’étude publiée dans la revue Icarus : The challenges of driving Charon’s cryovolcanism from a freezing ocean et présentée sur le site du Southwest Research Institute : SwRI models explain canyons on Pluto moon.