Et si les trous noirs étaient la source de la mystérieuse énergie noire
Des trous noirs massifs pourraient être à l’origine de l’énergie noire et de l’accélération de l’expansion de l’univers, selon des observations d’anciennes galaxies dormantes avec des trous noirs en leur centre.
Image d’entête : représentation artistique d’un trou noir supermassif. (Université d’Hawaï à Mānoa)
Les lois de la physique suggèrent que la gravité devrait entraîner une contraction de l’univers, mais une force mystérieuse, que les physiciens appellent l’énergie noire (ou énergie sombre), semble s’y opposer et faire en sorte que l’univers s’étende à un rythme accéléré.
L’une des explications possibles est que la source de cette énergie noire est constituée par les trous noirs, mais il n’existe pas de preuves expérimentales suffisantes pour étayer cette idée de manière concluante.
Chris Pearson, du Laboratoire Rutherford Appleton (RAL) de Harwell, au Royaume-Uni, et ses collègues ont comparé des groupes de galaxies avec des trous noirs en leur centre : un groupe jeune et éloigné et un groupe plus proche et plus ancien qui a cessé de croître. Ils ont calculé le taux de croissance des galaxies et ils ont constaté que leur masse était multipliée par 7 à 20, ce qui ne peut s’expliquer par des fusions régulières ou l’absorption de matière stellaire.
Au lieu de cela, Pearson et son équipe ont tenté d’expliquer cette croissance en proposant qu’elle soit liée à l’accélération de l’expansion de l’univers.
Selon Pearson :
Lorsque nous modélisons cela dans ce que nous voyons, nous pouvons réellement expliquer les observations. Nous pouvons voir qu’en plus de ces processus astrophysiques de croissance des trous noirs, nous pouvons expliquer cette divergence dans la croissance de la masse en ajoutant le fait qu’ils peuvent contenir de l’énergie sombre et qu’ils sont couplés à l’expansion de l’univers.
Une des galaxies étudiées, NGC524. (ESA/Hubble)
Le modèle qu’ils ont utilisé impliquait une interprétation de la théorie générale de la relativité d’Albert Einstein selon laquelle les trous noirs contiennent de l’énergie du vide, une sorte d’énergie qui existe partout dans l’espace en raison des particules quantiques qui apparaissent et disparaissent.
Toujours selon Pearson :
Lorsque nous avons fait les calculs, nous avons découvert que ces trous noirs pourraient en fait être en mesure d’expliquer la totalité de ce qui est nécessaire pour équilibrer l’univers avec cette énergie du vide.
Si les trous noirs sont réellement la source de l’énergie noire et de l’expansion de l’univers, cela résoudrait également une autre énigme cosmique persistante : ce qui se passe au centre des trous noirs, appelés singularités, où les lois de la physique s’effondrent.
Les trous noirs dotés d’un noyau d’énergie noire n’ont pas besoin de singularités, mais il n’existait aucun moyen facile de le vérifier.
Jusqu’à présent, il ne s’agissait que de théories. Aujourd’hui, nous disposons de preuves observationnelles qui confirment que les trous noirs ont des noyaux d’énergie noire.
Les chercheurs ont extrapolé à partir de l’échantillon de croissance des galaxies qu’ils avaient observé en utilisant les taux estimés de formation d’étoiles pour calculer la quantité d’énergie noire qui serait produite à l’échelle de l’univers. Ils ont constaté qu’elle expliquerait l’accélération de l’expansion de l’univers.
Une autre galaxie observée dans cette étude, NGC 1316 (également connue sous le nom de Fornax A) située à environ 60 millions d’années-lumière dans la constellation de Fornax. (NASA, ESA, and The Hubble Heritage Team (STScI/AURA))
Toutefois, ce résultat pourrait être incorrect si nos estimations du taux de formation d’étoiles sont erronées. En outre, les chercheurs ont estimé le taux de croissance des trous noirs en comparant des galaxies jeunes et très éloignées avec des galaxies anciennes et plus proches, et en supposant que c’est ainsi que les galaxies évoluent, mais il est possible que ce ne soit pas le cas.
Selon Pearson, cette explication pourrait être renforcée par d’autres observations de galaxies ou par l’étude des signatures du fond diffus cosmologique (CMB), un nuage de rayonnement produit peu après la formation de l’univers. Si leur idée est correcte, les trous noirs affecteraient l’expansion de l’univers et le CMB d’une manière distincte qui pourrait être détectée. D’autres preuves pourraient venir de la mesure de la vitesse à laquelle les trous noirs fusionnent, qui serait également affectée par leur nature d’énergie noire.
La carte ci-dessous présente la plus ancienne lumière dans notre univers, comme elle a été détectée avec la plus grande précision par la mission Planck. La lumière antique, appelée le fond diffus cosmologique, a été imprimée sur le ciel quand l’univers avait 370 000 ans. Elle montre les minuscules fluctuations de température qui correspondent aux régions aux densités légèrement différentes, représentant les graines de toute la future structure : les étoiles et les galaxies d’aujourd’hui. (ESA/ Planck Collaboration)
Pour Andy Taylor de l’université d’Édimbourg, au Royaume-Uni, il s’agit d’une explication solide et raisonnable des observations, mais l’interprétation de la théorie de la relativité d’Einstein qu’elle utilise pour expliquer la croissance des trous noirs n’a pas été largement étudiée.
Il ajoute :
Il y a là une belle discussion, mais nous devons être prudents car elle n’est pas construite sur des principes théoriques bien établis, mais sur des modèles plus spéculatifs.
Il est nécessaire de collecter davantage de données d’observation avant de pouvoir affirmer de manière concluante que les trous noirs sont la source de l’énergie sombre.
L’étude publiée dans The Astrophysical Journal : A Preferential Growth Channel for Supermassive Black Holes in Elliptical Galaxies at z ≲ 2 et présentée sur le site du RAL Space : Scientists find first evidence that black holes are the source of dark energy et sur le site de l’Imperial College de Londres : Scientists find first evidence that black holes are the source of dark energy.
Ca va trop vite