Nouvelle source potentielle d’ondes gravitationnelles : Le "cocon" d’une étoile mourante
Jusqu’à présent, nous n’avons détecté que des ondes gravitationnelles provenant de systèmes binaires, c’est-à-dire de la fusion de trous noirs ou d’étoiles à neutrons. Mais des chercheurs de l’université Northwestern, aux Etats-Unis, pourraient avoir découvert une nouvelle source non binaire d’ondes gravitationnelles : le « cocon » de débris qui se forme autour d’une étoile massive mourante.
Image d’entête : représentation artistique de l’onde gravitationnelle produite par le « cocon » de débris d’une étoile en fin de vie. (Ore Gottlieb/ CIERA)
Les ondes gravitationnelles sont des ondulations invisibles, mais incroyablement rapides de l’espace-temps causées par certains des processus les plus violents et les plus énergétiques de l’espace. Se déplaçant à la vitesse de la lumière, les ondes gravitationnelles compriment et étirent tout ce qu’elles croisent.
Le Laser Interferometer Gravitational-Wave Observatory (LIGO), aux États-Unis, est spécialement conçu pour détecter les ondes gravitationnelles. Comme l’interféromètre Virgo en Italie et le détecteur d’ondes gravitationnelles Kamioka (KAGRA) au Japon, LIGO permet aux scientifiques d’utiliser les informations recueillies pour analyser notre univers. Jusqu’à présent, les ondes gravitationnelles ont été observées à partir de systèmes binaires, deux corps astronomiques, comme des trous noirs ou des étoiles à neutrons, suffisamment proches pour que leur attraction gravitationnelle les fasse orbiter l’un autour de l’autre.
Aujourd’hui, des chercheurs de l’université Northwestern (Illinois) affirment donc qu’il est possible de mesurer des ondes gravitationnelles provenant d’une source unique et non binaire : les « cocons » de débris entourant les étoiles massives mourantes.
Selon Ore Gottlieb, auteur principal de l’étude :
À ce jour, LIGO n’a détecté que des ondes gravitationnelles provenant de systèmes binaires, mais un jour, il détectera la première source non binaire d’ondes gravitationnelles. Les cocons sont l’un des premiers endroits où nous devrions chercher ce type de source.
Une supernova à effondrement de cœur est une étoile massive qui a subi un effondrement gravitationnel et qui se trouve dans les derniers stades de sa vie. Son effondrement est associé à des sursauts gamma de longue durée qui se manifestent sous la forme de jets énergétiques, lesquels provoquent la formation d’un cocon en forme de sablier par les matériaux stellaires lorsqu’ils sont expulsés de l’étoile.
Toujours selon Gottlieb :
Un jet prend naissance au plus profond de l’étoile et se fraye un chemin vers l’extérieur pour s’échapper. C’est comme lorsqu’on perce un trou dans un mur. Le foret en rotation frappe le mur et des débris s’en échappent. Le foret donne de l’énergie à ce matériau. De la même manière, le jet perfore l’étoile, ce qui a pour effet de chauffer la matière de l’étoile et de la faire jaillir. Ces débris forment les couches chaudes d’un cocon.
Les chercheurs ont utilisé des simulations pour modéliser l’effondrement d’une étoile massive, depuis le moment où celle-ci se transforme en trou noir jusqu’à celui où le jet s’échappe. Pour la première fois, ils ont démontré qu’un cocon pouvait émettre des ondes gravitationnelles détectables. Selon les chercheurs, c’est préférable à la recherche d’ondes gravitationnelles provenant de sursauts gamma ou de supernovae, qui se produisent à une fréquence que LIGO pourrait ne pas être en mesure de détecter.
Selon Gottlieb :
Les supernovae sont plutôt sphériques et symétriques, de sorte que les explosions sphériques ne modifient pas la distribution équilibrée de la masse dans l’étoile pour émettre des ondes gravitationnelles. Les sursauts gamma durent des dizaines de secondes, leur fréquence est donc très faible, inférieure à la bande de fréquence à laquelle LIGO est sensible.
En revanche, les cocons sont asymétriques et très énergétiques, ce qui, selon les chercheurs, devrait permettre à LIGO de les détecter. De plus, ils sont susceptibles de fournir des informations complémentaires.
Notre étude est un appel à l’action lancé à la communauté pour qu’elle considère les cocons comme une source d’ondes gravitationnelles. Nous savons également que les cocons émettent des radiations électromagnétiques, et qu’ils pourraient donc être des événements multi-messagers. En les étudiant, nous pourrions en apprendre davantage sur ce qui se passe dans la partie la plus interne des étoiles, sur les propriétés des jets et sur leur prévalence dans les explosions stellaires.
L’étude disponible en prépublication dans ArXiv : Jetted and Turbulent Stellar Deaths: New LVK-Detectable Gravitational Wave Sources et présentée sur le site de l’Université Northwestern : Dying stars’ cocoons could be new source of gravitational waves.