Des scientifiques créent des embryons humains synthétiques sans sperme ni ovule
Une équipe de scientifiques britanniques et américains a annoncé avoir créé des « embryons humains synthétiques », c’est-à-dire des embryons fabriqués à partir de cellules souches plutôt que d’ovules ou de spermatozoïdes humains.
Image d’entête : microscopie électronique à balayage d’un embryon humain au stade 4 de développement. (Dr. Yorgos Nikas/ SPL)
Cette recherche, qui n’a pas encore fait l’objet d’une évaluation par les pairs, a été présentée lors de la conférence annuelle de l’International Society for Stem Cell Research à Boston, aux Etats-Unis.
Cette avancée, qui a déjà été démontrée chez la souris, pourrait permettre aux scientifiques d’étudier le développement humain au cours d’une période où l’on sait relativement peu de choses sur la façon dont le fœtus se développe.
Actuellement, la réglementation de la plupart des pays stipule que les embryons et les structures ressemblant à des embryons ne peuvent être cultivés en laboratoire à des fins de recherche au-delà de 14 jours. Les embryons synthétiques de cellules souches ne sont pas concernés par cette interdiction et pourraient donc être utilisés pour contourner la règle et étudier le développement du fœtus au-delà de deux semaines.
Les chercheurs, qui travaillent à l’université de Cambridge et à l’Institut de technologie de Californie, ont cultivé leurs embryons synthétiques jusqu’à ce qu’ils atteignent l’équivalent de 14 jours de développement.
Embryons naturels (en haut) et synthétiques (en bas) côte à côte pour montrer une formation comparable du cerveau et du cœur. (Amadei et Handford/ Université de Cambridge)
Mais il n’est pas encore clair si ces embryons pourraient réellement se développer en humains, ou s’ils devraient être soumis aux mêmes règles que les autres structures ressemblant à des embryons.
Précisons que nous sommes encore loin de la création artificielle de bébés. Il s’agit de structures ressemblant à des embryons, sans cœur ni cerveau : Il s’agit plutôt de modèles d’embryons capables d’imiter certaines des caractéristiques d’un embryon normal, mais pas toutes.
Selon la biologiste Magdalena Żernicka-Goetz, de l’université de Cambridge au Royaume-Uni, qui a dirigé l’étude :
Il est important de souligner qu’il ne s’agit pas d’embryons synthétiques, mais de modèles d’embryons. Notre recherche ne vise pas à créer la vie, mais à la sauver.
L’une des façons dont cette recherche pourrait sauver des vies est d’aider à déterminer pourquoi de nombreuses grossesses échouent à peu près au stade où ces embryons artificiels se reproduisent. Si ces premiers moments peuvent être étudiés en laboratoire, nous devrions mieux les comprendre.
Nous pourrions également utiliser ces techniques pour en savoir plus sur la façon dont les maladies génétiques courantes se développent aux premiers stades de la vie. Une fois que nous saurons mieux comment ces maladies apparaissent, nous serons mieux à même d’y remédier.
Dans le même temps, la question de savoir où ce type de création d’embryons synthétiques pourrait conduire suscite des inquiétudes. Les scientifiques affirment qu’une réglementation stricte est nécessaire pour contrôler ce type de recherche, réglementation qui n’existe pas vraiment à l’heure actuelle.
Selon le biologiste Rodrigo Suarez, de l’université du Queensland, en Australie, qui n’a pas participé à la recherche :
Ces nouveaux essais in vitro ouvriront la voie à de futures études visant à élucider les mécanismes du développement humain, ainsi que les effets des anomalies environnementales et génétiques. Comme pour la plupart des technologies émergentes, la société devra mettre en balance les risques et les avantages de cette approche et mettre à jour la législation actuelle en conséquence.
Comme l’ont souligné des chercheurs, les scientifiques respectent aujourd’hui la « règle des 14 jours » qui limite l’utilisation d’embryons humains en laboratoire, exigeant que les embryons humains ne puissent être cultivés in vitro que pendant deux semaines au maximum. De telles règles, ainsi que les nouvelles qui pourraient être introduites au fur et à mesure que la recherche se poursuit, nous obligent à poser des questions fondamentales sur le moment où nous considérons que la « vie » commence dans l’existence d’un organisme et sur la proximité d’un embryon humain avec un embryon synthétique avant qu’il ne soit considéré comme essentiellement le même.
Selon les chercheurs :
Nous devons interroger les différents publics sur leur compréhension et leurs attentes à l’égard de ce type de recherche et, plus généralement, sur leurs opinions concernant le développement humain précoce. Ces processus biologiques sont profondément liés à nos valeurs et à ce que nous considérons comme une vie humaine.
Cette recherche, qui n’a pas encore fait l’objet d’une évaluation par les pairs, a été présentée lors de la conférence annuelle de l’International Society for Stem Cell Research à Boston, aux Etats-Unis et présentée sur le site de l’Université de Cambridge : ‘Synthetic’ embryo with brain and beating heart grown from stem cells by Cambridge scientists. La réaction d’experts dans Scimex : EXPERT REACTION: Potential synthetic human embryos created.