Comme celui des humains, le cerveau des chiens perçoit les visages et les corps
Lire les expressions faciales ou la posture corporelle d’une personne est important pour comprendre sa personnalité, ses émotions, ses motivations ou ses intentions. Mais qu’en est-il des chiens ? Peuvent-ils tirer des informations des visages et des corps comme nous le faisons ? Une nouvelle étude apporte des éléments de réponse.
Image d’entête : Balian, un des chiens participant à cette étude, fait une petite pause sur le lit du scanner d’imagerie par résonance magnétique (IRM). Il peut interrompre la formation et la collecte de données à tout moment et quitter l’IRM par une rampe spécialement construite à cet effet. Le bandage sert de protection supplémentaire contre le bruit en combinaison avec des bouchons d’oreille. (Université de Vienne CCNU (ccnu.univie.ac.at))
De précédentes recherches ont montré qu’une zone de notre cerveau, le lobe temporal, est dédiée à la perception des autres et que des zones voisines sont spécialisées dans l’interprétation des visages et des corps. Il en va de même pour les primates. Cependant, les recherches sur la manière dont les autres animaux différencient les visages et les indices émotionnels qu’ils fournissent sont rares.
Des chercheurs de l’université de Vienne, en Autriche, ont étudié le compagnon de longue date de l’humanité, le chien, pour voir si l’évolution a permis à son cerveau de percevoir les visages et les corps comme nous le faisons.
Selon Magdalena Boch, principale auteure de l’étude (lien plus bas) :
Notre étude visait à déterminer si cette expertise comportementale se reflétait également dans le cerveau des chiens.
Quinze chiens de compagnie éveillés et non attachés et 40 participants humains ont subi des examens d’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) pendant qu’on leur montrait des images de visages humains et canins, de corps humains et canins, et d’objets inanimés de la vie quotidienne tels que des jouets ou des chaises. Pour améliorer la validité de l’étude, les images de visages et de corps présentaient une variété de postures (par exemple, sauter, regarder vers le haut), d’émotions neutres et positives (par exemple, dormir, sourire) et de perspectives différentes (par exemple, d’en haut, de côté). Des versions brouillées des images ont également été montrées aux participants, servant de contrôle visuel.
Au cours de deux sessions de 5 minutes, les participants humains et canins ont vu 180 images différentes. Les chiens avaient été longuement entraînés à rester immobiles pendant l’IRM, sans contention ni sédation, et ils pouvaient quitter le scanner à tout moment. Leur tête a été bandée pour fixer les bouchons d’oreille anti-bruit qu’ils portaient pendant la procédure.
La chienne Maeva est prête pour la collecte de données dans le scanner d’imagerie par résonance magnétique. Le bandage sert de protection supplémentaire contre le bruit en combinaison avec des bouchons d’oreille. (Université de Vienne CCNU (ccnu.univie.ac.at))
En analysant les images scannées pour voir comment le cerveau des chiens réagissait aux images qui leur étaient montrées, les chercheurs ont trouvé la première preuve que, comme les humains, les chiens possèdent une région du lobe temporal spécialisée dans la perception visuelle des postures corporelles. Ils ont également découvert trois autres régions du cerveau des chiens qui privilégient la perception des visages et des corps par rapport à celle des objets inanimés.
Tirée de l’étude : aperçu de l’approche expérimentale comparative et des zones de réponse visuelle dans les cortex occipito-temporaux des deux espèces. Quinze chiens et quarante humains ont regardé des images de corps humains et canins, de visages humains et canins, d’objets inanimés, ou des versions brouillées de ces images présentées en bloc. c) En utilisant les données de la première tâche (c.-à-d. l’ensemble des données du localisateur), les chercheurs ont identifié les zones visuellement réactives (c.-à-d. tous les stimuli > ligne de base) dans les cortex occipito-temporaux des deux espèces. (Magdalena Boch et col./ Communications Biology)
Selon Boch :
Nous, les humains, nous concentrons souvent sur le visage lorsque nous communiquons avec les autres. Nos résultats suggèrent que les visages sont également une source d’information importante pour les chiens. Cependant, les postures corporelles et la perception globale semblent jouer un rôle supérieur.
Cependant, au lieu d’affecter les régions du cerveau associées à la vision, comme c’est le cas chez les humains, les chercheurs ont constaté que lorsque les chiens regardent des visages et des corps, les parties de leur cerveau responsables du traitement des odeurs sont activées. Selon les chercheurs, cette découverte reflète la grande sensibilité des chiens à l’odorat et l’interaction entre l’odorat et la vision pour déduire des informations sociales et contextuelles.
Les régions cérébrales spécialisées observées dans le cerveau des chiens étaient également actives, qu’ils regardent des humains ou d’autres chiens. Selon les chercheurs, cela reflète la longue relation que nous entretenons avec nos amis à fourrure.
Selon Claus Lamm, l’un des coauteurs de l’étude :
Les chiens et les humains ne sont peut-être pas étroitement liés, mais ils sont des compagnons proches depuis des milliers d’années. C’est pourquoi la comparaison entre les chiens et les humains nous donne de nouvelles indications sur ce que l’on appelle l’évolution convergente des processus de perception sociale et de traitement de l’information.
L’évolution convergente est le processus par lequel des espèces non apparentées occupant un habitat similaire évoluent indépendamment pour présenter des traits physiques communs.
Les chercheurs affirment que leur étude constitue une première étape dans la comparaison de la manière dont les cerveaux humains et canins perçoivent les visages et les corps, et que d’autres recherches sont nécessaires pour mieux comprendre les mécanismes sous-jacents à cette perception.
L’étude publiée dans Communications Biology : Functionally analogous body- and animacy-responsive areas are present in the dog (Canis familiaris) and human occipito-temporal lobe et présentée sur le site de l’Université de Vienne : Like human, like dog.