De la boue martienne desséchée révèle que la planète rouge a connu des cycles humides et secs semblables à ceux de la Terre
L’astromobile Curiosity a découvert des motifs hexagonaux dans de l’ancienne boue sur la planète rouge, ce qui suggère l’existence de cycles de périodes humides et sèches et renforce les chances que Mars ait accueilli la vie.
Image d’entête : des fissures dans la boue montrent qu’il a pu y avoir des cycles d’eau sur Mars. (NASA/ JPL-Caltech/ MSSS, LANL)
Les craquelures dans la boue sont si courantes sur Terre que nous n’y prêtons pas beaucoup d’attention. Mais sur Mars, elles sont très intéressantes. Lorsque la boue humide sèche, l’eau qui se trouve entre les particules se dissipe. Les particules de boue se rapprochent alors les unes des autres et la boue se contracte. Cette contraction, qui se répète plusieurs fois, provoque des tensions qui, à terme, peuvent provoquer des fissures. Le plus souvent, ce type de fissure est hexagonal. Par conséquent, si vous observez des fissures hexagonales dans la boue, vous pouvez les relier à un cycle humidité-sécheresse. C’est exactement ce que les nouvelles observations ont permis de faire.
A partir de l’étude : motifs dans le cratère Gale, sur Mars, interprétés comme étant la preuve de la fissuration de la boue lors de son séchage. (NASA/JPL-Caltech/MSSS/IRAP/Rapin et col./Nature)
Ces observations réalisées par Curiosity montrent que les cycles d’humidité et de sécheresse étaient fréquents dans les premiers environnements de la surface martienne. À en juger par la géométrie de ces fissures, la planète rouge a peut-être connu autrefois des cycles climatiques saisonniers, voire des crues soudaines. Cette recherche (lien plus bas) ajoute une nouvelle pièce à l’énigme de l’histoire aquatique de Mars.
Selon Nina Lanza, chercheuse principale de l’instrument ChemCam à bord de l’astromobile Curiosity :
Ces observations passionnantes de fissures de boue matures nous permettent de compléter une partie de l’histoire manquante de l’eau sur Mars. Comment est-elle passée d’une planète chaude et humide à la planète froide et sèche que nous connaissons aujourd’hui ? Ces fissures de boue nous montrent cette période de transition, lorsque l’eau liquide était moins abondante, mais toujours active à la surface de Mars.
Le coauteur de l’étude, Patrick Gasda, du service de télédétection spatiale et de science des données du laboratoire national de Los Alamos, a également insisté sur ce point :
L’un des principaux objectifs de la mission Curiosity, et l’une des principales raisons du choix du cratère Gale, est de comprendre la transition entre une ancienne Mars « chaude et humide » et la Mars « froide et sèche » que nous connaissons aujourd’hui.
De plus, l’astromobile a trouvé des preuves que ces craquelures dans la boue n’étaient profondes que de quelques centimètres, ce qui pourrait signifier que les cycles d’humidité et de sécheresse étaient saisonniers ou qu’ils pouvaient même se produire plus rapidement, comme dans le cas d’une inondation soudaine.
A partir de l’étude : modèle de crêtes polygonales identifiées dans le cratère Gale. (NASA/ JPL-Caltech/ MSSS/ IRAP/ Rapin et col./ Nature)
Toujours selon Gasda :
Ce qui est important dans ce phénomène, c’est qu’il s’agit de l’endroit idéal pour la formation des molécules polymères nécessaires à la vie, y compris les protéines et l’ARN, si les molécules organiques adéquates étaient présentes à cet endroit. Lorsque ces processus se répètent au même endroit, la probabilité que des molécules plus complexes s’y soient formées augmente.
L’affirmation de Gasda concernant le rôle potentiel de ces fissures de boue dans la formation de molécules organiques et de la vie ajoute une couche de complexité à ces caractéristiques de fissures de boue. Les conditions cycliques humides et sèches pourraient avoir fourni un environnement favorable à la création de molécules complexes essentielles à la vie.
Pour Lanza :
Ces caractéristiques indiquent l’existence d’environnements humides et secs qui, sur Terre, sont extrêmement propices au développement de molécules organiques et potentiellement de la vie. Dans l’ensemble, ces résultats nous donnent une image plus claire de Mars en tant que monde habitable.
Ce n’est pas la première fois que des chercheurs trouvent des indices d’inondation sur Mars. La plupart des deltas sur Mars ont probablement été créés par des inondations courtes et catastrophiques, et des inondations soudaines n’ètaient peut-être pas été si rares sur Mars.
L’étude publiée dans Nature : Sustained wet–dry cycling on early Mars et présentée sur le site du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) : Mars : nouvelles traces d’un environnement propice à l’apparition de la vie.