Des outils et des ossements vieux de 45 000 ans révèlent les plus anciennes traces de l’Homo Sapiens en Asie de l’Est
Un site situé dans le nord de la Chine met en lumière les anciennes migrations humaines vers l’Asie de l’Est il y a 45 000 ans et révèle une convergence unique de culture et de technologie. Cette découverte remet en question les idées reçues sur la manière dont l’Homo sapiens s’est dispersé dans le monde.
Image d’entête : les Homo sapiens se sont dispersés d’environnements en déclin en Afrique du Sud-Est vers des environnements plus favorables en Asie. (AO Hong/ Académie chinoise des sciences)
Une équipe internationale de chercheurs a examiné un ensemble d’anciens objets humains provenant du site de Shiyu, près de la ville de Shuozhou, à environ 350 km à l’ouest de Pékin. Les chercheurs ont utilisé des méthodes de datation au radiocarbone et par luminescence pour déterminer que les outils en pierre et en os du site ont 45 000 ans.
Il s’agit du site le plus à l’est et le plus ancien du genre. L’obsidienne a été transportée depuis des sources situées à des centaines de kilomètres pour fabriquer les outils. Cela indique que les anciens peuples avaient des stratégies avancées de collecte des ressources.
Vue d’ensemble de la section de Shiyu. L’auteur principal, Shixia Yang, prépare des échantillons pour la datation par luminescence. (Université Griffith)
Parmi les outils, on trouve un mélange de différentes technologies, telles que le débitage Levallois et le débitage laminaire. La méthode Levallois est une innovation associée au Paléolithique moyen, qui s’étend de 300 000 à 50 000 ans. Mais les autres techniques de débitage laminaire et les outils symboliques trouvés sur le site sont caractéristiques du Paléolithique supérieur, il y a environ 50 000 à 12 000 ans.
Objets initiaux du Paléolithique supérieur provenant de Shiyu, en Chine. Divers outils en pierre, dont des pointes de Levallois (en haut), des denticulés utilisés pour le sciage et un grattoir (en bas à gauche), et des outils à dents destinés à être accrochés à des poignées (en bas à droite). (IVPP/ Université Griffith)
D’autres objets de Shiyu reflètent la fabrication d’éclats à noyau que l’on trouve ailleurs en Chine et qui date d’environ 40 000 ans. Des objets uniques, tels qu’un disque de graphite façonné et des outils en os, ont également été découverts. Ce mélange de différentes technologies illustre un brassage et une adaptation culturels et selon l’auteur principal, le Dr Shi-Xia Yang, de l’Académie chinoise des sciences :
L’amalgame de divers traits culturels témoigne d’une adaptation complexe et innovante de nos ancêtres au cours de leur expansion.
Outil en os (en haut) et disque en graphite (en bas). (IVPP/ Université Griffith)
On sait que l’Homo sapiens a migré vers l’Asie orientale il y a au moins 45 000 ans. Une étude de 2015 suggère que les dents d’Homo sapiens trouvées dans la grotte de Fuyan, dans le sud de la Chine, remontent à 80 000-120 000 ans.
Mais le mystère reste entier quant à la date et à la manière dont ces humains ont migré vers l’Asie de l’Est. Le site de Shiyu suggère qu’il s’agit d’un processus complexe.
Selon le professeur Francesco D’Errico, de l’université de Bordeaux (France), coauteur de l’étude :
Le site reflète un processus de créolisation culturelle, le contact entre les sociétés et les peuples déplacés, mêlant des traits hérités à de nouvelles innovations, ce qui complique la compréhension traditionnelle de l’expansion mondiale de l’Homo sapiens.
L’étude publiée dans Nature Ecology and Evolution : Initial Upper Palaeolithic material culture by 45,000 years ago at Shiyu in northern China, présentée sur le site de l’Académie chinoise des sciences : Orbitally-induced Strong Monsoons Facilitated Early Human Dispersal to East Asia et de l’Université Griffith : Shiyu discovery reveals Eastern Asia’s early human migrations.