Cette ancien primate serait responsable de l’herpès chez l’humain
L‘herpès est une infection assez commune aujourd’hui. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que les deux tiers des adultes de moins de 50 ans sont infectés par le virus de l’herpès qui provoque une inflammation buccale. Un sur six souffre d’herpès génital.
Selon une équipe de virologistes et d’anthropologues, à la recherche des origines de l’herpès, nous l’aurions contracté lors d’une ancienne rencontre entre les premiers membres de notre genre et un parent plus éloigné, le Paranthropus boisei, un primat à grosse mâchoire, avec des dents si grandes qu’on lui a affublé le surnom de “Nutcracker Man” (l’homme Casse-Noisette). Leur travail de détective statistique, issu de l’analyse des données géographiques et fossiles, a été publié cette semaine.
Les virus de l’herpès sont aussi variés qu’ils sont vieux. Il en existe plus de 100 types différents. Huit infectent régulièrement les humains, engendrant des maladies comme la varicelle et la mononucléose. Ce que nous appelons communément herpès sont en fait deux types de virus de l’incurable Herpes simplex virus (HSV), HSV-1 et HSV-2. Les boutons de fièvre buccaux sont presque toujours causés par le HSV-1. HSV-2 est généralement transmis sexuellement. L’augmentation des infections génitales du HSV-1, attribués à une augmentation de la popularité du sexe oral… fellations, ont changé la distinction.
Nos parents vivants les plus proches, les gorilles et les chimpanzés, ont également des infections d’Herpes simplex et selon Charlotte Houldcroft, une virologiste de l’université de Cambridge en Angleterre :
Toutes les autres espèces de primates ont seulement une sorte de virus de l’herpès simplex.
Houldcroft et ses collègues suggèrent qu’une rencontre des deux primates il y a fort longtemps, lorsque le Paranthropus boisei a rencontré l’Homo erectus, explique pourquoi notre histoire est différente.
Les scientifiques avaient déjà analysé le génome de l’herpès et créé un arbre généalogique viral. L’herpès oral, HSV-1, existe depuis que les humains et les chimpanzés se sont séparés, il y a 6 millions d’années. Les chercheurs ont également découvert que le HSV-2 devait être passé des chimpanzés à la lignée humaine plus tard, il y a plus de 1,4 million d’années.
Houldcroft et ses collègues ont utilisé un modèle statistique, appelé réseau bayésien, pour relier les espèces de primates à d’éventuels réseaux de transmission. Les auteurs ont recensé une demi-douzaine de coupables possibles à partir de 30 espèces préhistoriques. L’ancien patient zéro devait partager l’époque et l’espace géographique avec un ancêtre humain. Les archéologues ont trouvé des fossiles de Paranthropus boisei dans le même paysage que les outils fabriqués par l’Homo erectus.
Dans le scénario le plus probable issue du modèle, un Paranthropus boisei a infecté un Homo erectus. La rencontre devait impliquer un échange de fluides corporels. Ensuite, toutes les théories sont possibles, mais pour Houldcroft, il y a de grandes chances que cela ce soit passé par de la violence.
Peut-être que notre ancêtre a tué et mangé un Paranthropus boisei. Peut-être qu’un Homo erectus s’est nourri du cadavre d’un Paranthropus boisei. Peut-être que l’Homme Casse-Noisette a mordu un Homo erectus pour attaquer ou se défendre.
Reconstruction faciale du Paranthropus boisei. (Wikimedia/ Cicero Moraes)
Selon les chercheurs :
L’idée qu’il aurait pu être transmis au cours d’une rencontre violente (dépecer et manger) est en fait très similaire à la façon dont les virus des chimpanzés modernes sont passés chez les humains.
Les personnes qui ont dépecé des carcasses de chimpanzés ont été les premières exposées à la souche pandémique du VIH.
D’autres chercheurs, bien que félicitant du travail accompli, ne sont pas entièrement convaincus que l’Homo erectus ait attrapé le HSV-2 d’un hominidé comme le Paranthropus. Si ce dernier avait pu attraper le virus d’un ancien chimpanzé, pourquoi n’en serait-il pas de même pour l’Homo erectus ?
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Il y a d’autres questions auxquelles cette recherche ne peut répondre, par exemple : pourquoi le HSV-2, s’il a été incubé dans le Paranthropus boisei avant de migrer vers le genre Homo, préfère-t-il les tissus génitaux ? Mais d’autres virologues sont sur le coup.
Les chercheurs précisent que les virus, encore aujourd’hui, passent régulièrement d’autres espèces (plus particulièrement les primates) vers les humains. De comprendre d’où proviennent ces anciens agents pathogènes et comment ils infectent les humains peut nous aider à comprendre où nos futures pandémies surgiront probablement.
L’étude publiée dans Virus Evolution : Network analysis of the hominin origin of Herpes Simplex virus 2 from fossil data.