Une galaxie qui se dirige vers nous pourrait réveiller un trou noir et envoyer notre Voie lactée loin dans l’espace
Quand nous songeons aux menaces célestes qui pèsent sur notre planète, nous pensons habituellement aux gros astéroïdes et aux comètes, et peut-être aussi aux rayons gamma ou aux supernovae. Mais nous ne penserions probablement pas à une galaxie entière s’abattant sur nous, et d’après une nouvelle étude, c’est exactement ce qui se passe en ce moment. Le Grand Nuage de Magellan (LMC), une galaxie naine voisine, est en collision avec la Voie lactée, mais il n’y a pas lieu de s’inquiéter pour l’instant, la collision des étoiles ne va commencer que dans 2 milliards d’années plus tard environ.
Image d’entête : M51 ou la bien nommée galaxie du tourbillon et sa galaxie compagne (M51b). Elle représente la fusion de deux galaxies semblables en masse à la Voie lactée et au Grand Nuage de Magellan. (Martin Pugh)
Le Grand Nuage de Magellan est l’un de nos plus proches voisins cosmiques, orbitant autour de la Voie lactée à une distance d’environ 163 000 années-lumière. On a longtemps pensé que cette galaxie naine continuerait à faire le tour de la Voie lactée pendant des milliards d’années encore, ou qu’elle s’échapperait dans le cosmos par le biais de rapides mouvements.
Mais en y regardant de plus près, les astronomes se sont rendu compte qu’un troisième scénario serait plus probable. Des études récentes ont montré que le LMC est beaucoup plus massif qu’il n’y paraît, contenant presque deux fois plus de matière noire qu’on ne le pensait auparavant. Cela signifie qu’il perd rapidement de l’énergie, qu’il ralentit et qu’il est attiré vers la Voie lactée.
Pour prédire ce qui se passera ensuite, une équipe dirigée par des chercheurs de l’université de Durham (Royaume-Uni) a utilisé un supercalculateur appelé Evolution and Assembly of GaLaxies and their Environments (EAGLE). Cela leur permet de construire des modèles réalistes de galaxies comme la Voie lactée et le LMC, et de les faire se croiser pour voir ce qui se passe.
Ces types de collisions galactiques se produisent régulièrement, sur le plan cosmique, et dans ce cas, les deux se fonderaient en une seule galaxie. En gros, le LMC tel que nous le connaissons est fichu, mais ses étoiles et ses planètes survivraient dans une version plus gonflée de la Voie lactée.
Mais cela ne veut pas dire qu’il ne s’agira pas d’un processus chaotique. L’équipe affirme que les effets gravitationnels de la collision projetteraient de nombreuses étoiles hors du disque principal de la Voie lactée et dans le halo stellaire, une bulle peu peuplée qui entoure la galaxie. Il y a une petite chance que le Soleil soit l’une d’elles, mais les chercheurs disent que notre position dans la galaxie nous protégerait probablement de ce sort.
Les effets les plus dramatiques seront observés au centre de la galaxie, et plus particulièrement dans le trou noir supermassif qui s’y trouve. Il se régalera de tous les surplus de gaz et de matière que le LMC apporte, gonflant jusqu’à 10 fois sa taille actuelle. Cela pourrait transformer la Voie lactée en noyau actif de galaxie ou en quasar, mais heureusement les rayons gamma projetés ne devraient pas être assez puissants pour nuire à la Terre.
Selon Carlos Frenk, coauteur de cette étude :
Sauf en cas de catastrophe, comme une perturbation majeure du système solaire, nos descendants, s’il y en a, vont être gâtés : un éblouissant feu d’artifice cosmique pendant que le trou noir super massif nouvellement réveillé au centre de notre galaxie réagit en produisant des rayons extrêmement lumineux.
Fait intéressant, il semble que cette collision se fait attendre depuis longtemps. La Voie lactée est un peu bizarre, son halo stellaire et son trou noir central sont moins massifs que la plupart des autres galaxies de sa taille. Mais d’après les calculs de l’équipe, dévorer le LMC devrait la ramener à la moyenne.
Selon Alis Deason, coauteur de l’étude :
Nous pensons que jusqu’à présent, notre galaxie n’a connu que quelques fusions avec des galaxies de très faible masse. Cela représente des prises très minces par rapport aux galaxies voisines de la même taille que la Voie lactée. Par exemple, notre plus proche voisine, la galaxie d’Andromède, a dévoré des galaxies pesant près de 30 fois plus que celles consommées par la Voie lactée. Par conséquent, la collision avec le Grand Nuage de Magellan est attendue depuis longtemps et elle est nécessaire pour rendre notre galaxie typique.
Cette collision n’est pas la seule dans l’avenir de la Voie lactée. Andromède se précipite également vers nous à environ 109 km par seconde, avec un premier contact prévu dans environ quatre milliards d’années. Et vu la taille de cette galaxie, le choc sera bien plus catastrophique que celui du LMC.
L’étude publiée dans The Monthly Notices of the Royal Astronomical Society : The aftermath of the Great Collision between our Galaxy and the Large Magellanic Cloud et présentée sur le site de l’université de Durham : Milky Way heading for catastrophic collision.