Une analyse de coulées de lave vénusienne remet en cause l’hypothèse que Vénus fut autrefois humide
Une coulée de lave sur Vénus, que l’on croyait s’être formée un environnement humide au début de l’histoire de la planète, s’est formée dans des conditions sèches, selon des scientifiques.
Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y avait pas d’eau sur la Vénus d’antan. Mais cela signifie que cette coulée de lave, que l’on croyait autrefois être une preuve de la présence d’eau, ne l’est pas, selon Allan Treiman, géologue au Lunar and Planetary Institute à Houston, au Texas.
La coulée, appelée Ovda Fluctus, s’étend sur plusieurs milliers de kilomètres carrés près de l’équateur vénusien dans l’Ovda Regio. Elle a été découverte par la sonde Magellan de la NASA, qui a orbité autour de Vénus de 1990 à 1994 et elle a utilisé le radar pour cartographier la surface de la planète couverte de nuages à une résolution pouvant atteindre 75 mètres.
Localisation de l’Ovda Regio sur Vénus. (NASA/ JPL)
Selon Treiman :
Ce sont les meilleures données que nous ayons. Mais un nouvel examen suggère que l’Ovda Fluctus n’est pas constitué de lave granitique, comme on le croyait auparavant, mais plutôt de basalte.
C’est important parce que les laves granitiques, comme les rhyolites, qui sont courantes sur les volcans terrestres, indiquent que le magma qui les a formées était riche en eau.
Ce n’est pas le cas pour le basalte et Treiman de préciser :
C’est ce qu’on obtient s’il n’y a presque pas d’eau, ou très peu d’eau.
La cartographie radar ne peut pas directement préciser de quel type de roche une coulée de lave est constituée, mais elle peut montrer les détails de la forme de la coulée.
En particulier, elle permet de cartographier ses bords, permettant aux scientifiques de voir comment la lave s’est déplacée dans les derniers mètres avant de se solidifier.
Toujours selon Treiman :
Les bords des coulées de lave ressemblent à des courbes fractales. Les dimensions fractales du basalte sont différentes de celles de la rhyolite.
La rhyolite et les autres laves granitiques, sont épaisses, très visqueuses, suintant et s’étalant plus ou moins uniformément, comme de la pâte à pain.
Les laves basaltiques sont plus courantes, un peu comme de l’huile de moteur lourde. Elles ont tendance à faire des bords beaucoup plus complexes.
De précédentes études sur l’Ovda Fluctus avaient conclu que son profil d’écoulement ressemblait à celui d’une lave granitique riche en eau.
L’équipe de Treiman a réexaminé les bords mathématiquement et elle est parvenue à la conclusion inverse et selon Treiman :
Ils étaient compatibles avec de la lave basaltique et non avec de la lave granitique.
Cela ne prouve pas que la jeune Vénus n’avait pas d’eau. Après tout, la Terre a beaucoup d’eau et une grande partie de ses coulées de lave sont basaltiques.
Pour Michael Way, spécialiste de Vénus au Goddard Institute for Space Studies de la NASA à New York, qui ne faisait pas partie de l’équipe de recherche
C’est une excellente étude, mais je ne suis pas sûr de ses implications plus larges. Tout ce que cela montre, c’est que cette région particulière n’est pas d’origine granitique.
Treiman n’est pas contre. Très probablement, dit-il, Vénus a du granit, et donc une preuve d’eau. Ailleurs, très probablement dans un haut plateau tentaculaire appelé Ishtar Terra, de la taille de l’Australie.
Et si la Vénus primitive avait vraiment de l’eau, pour Treiman, elle aurait pu avoir de la vie, car il y a des milliards d’années, lorsque le Soleil était plus sombre et moins chaud, Vénus aurait pu être plus habitable que la Terre.
Il n’y a pas de raison évidente pour laquelle la vie n’aurait pas pu évoluer à l’époque.
Pour le savoir, dit-il, il faut retourner sur Vénus et envoyer un atterrisseur à Ishtar Terra, pour « nous dire si c’est du granit ou non ».
Mais, admet-il, ce n’est pas près d’arriver. Le terrain d’Ishtar Terra est très accidenté, et « les ingénieurs qui font les atterrissages [auraient] fait une crise cardiaque ».
L’étude publiée dans The Journal of Geophysical Research: Planets : Ovda Fluctus, the Festoon Lava Flow on Ovda Regio, Venus: Not Silica‐Rich et présentée sur le site de l’Universities Space Research Association : Was Venus once warm and wet? New study of Lava flow suggests not.