WASP-76b, la planète où il pleut du fer
Des astronomes ont peut-être découvert un monde assez exotique où il pleut du fer, selon une étude récemment publiée (lien plus bas). L’exoplanète massive est exposée à des milliers de fois le rayonnement que la Terre reçoit du Soleil, rendant la surface suffisamment chaude pour vaporiser les métaux qui tombent ensuite sous forme de pluie sur un côté de la planète baigné dans une nuit perpétuelle.
Image d’entête : cette illustration de style bande dessinée, du romancier graphique suisse Frederik Peeters, présente une vue rapprochée de la bordure nocturne de l’exoplanète WASP-76b. (Frederik Peeters)
De temps à autre, les astronomes trouvent une exoplanète qui vous fait prendre conscience de la chance d’avoir évolué sur Terre. Dans ce cas, il s’agit du monde extraterrestre lointain désigné WASP-76b. Cet orbe cauchemardesque abrite des conditions atmosphériques extrêmes qui seraient tout aussi appropriées dans un film de science-fiction que dans un document de recherche scientifique.
L’exoplanète a été observée par l’instrument ESPRESSO, qui est monté sur le Very Large Telescope (VLT) de l’Observatoire européen austral, en septembre 2018, lors de la première sortie scientifique de l’instrument. ESPRESSO est un puissant spectrographe capable de décomposer la lumière captée par les objets cosmiques lointains. Les scientifiques peuvent récupérer ces données et les analyser afin de déterminer certaines des plus importantes caractéristiques d’un monde lointain.
L’instrument a été créé pour traquer les planètes semblables à la Terre qui orbitent autour d’étoiles ayant des caractéristiques similaires à celles de notre Soleil. Cependant, les astronomes se sont vite rendu compte que le couple instrument/ télescope avait la souplesse nécessaire pour accomplir toute une série de tâches, notamment celle de sonder les atmosphères de mondes extrêmes et extraterrestres comme WASP-76b.
« Extrême » est le mot parfait pour décrire WAP-76b. Elle est étroitement liée à son étoile, ce qui signifie qu’il lui faut à peu près le même temps pour tourner sur son axe que pour accomplir l’un de ses cycles annuels. Pour cette raison, la planète ne présente que la même face de sa surface à son étoile, qui est baignée par la lumière constante du jour, tandis que le côté opposé est enveloppé par la nuit éternelle (rotation synchrone). Et ce, jusqu’à ce qu’un événement dramatique vienne perturber ce lent ballet orbital.
On estime que la face diurne de WASP-76b a une température supérieure à 2 400°C, assez chaude pour que les molécules se dissocient sous l’effet de la chaleur en atomes qui sont portés dans la haute atmosphère. Assez chaude pour vaporiser le métal. La face nocturne de la planète se situe à une température relativement gérable de 1 500 °C. Ces différences de température extrêmes pourraient créer un vent puissant capable de transférer les éléments atmosphériques du côté jour au côté nuit, et vice versa.
Cette illustration présente le côté nocturne de l’exoplanète WASP-76b. À gauche de l’image, on voit la bordure nocturne de l’exoplanète, où elle passe du jour à la nuit. ( ESO/ M. Kornmesser)
Les chercheurs ont examiné la signature lumineuse du monde extraterrestre recueillie par ESPRESSO, et ils ont identifié l’empreinte chimique du fer neutre présent dans l’atmosphère. Cette vapeur de fer a été détectée sur la face diurne de la planète et au terminateur (la limite entre la face ensoleillée et celle plongée dans une éternelle obscurité).
Cela suggère que la vapeur de fer est transférée du côté jour super chaud de l’exoplanète par de puissants vents atmosphériques vers le côté nuit. Dans cet environnement plus moins brulant, la vapeur se condense et tombe à la surface sous forme de pluie de fer, d’où l’absence de vapeur de fer au terminateur de l’aube.
Selon les auteurs de l’étude, c’est la première fois que l’on découvre une chimie distincte entre le côté jour et le côté nuit d’une planète géante gazeuse ultra chaude.
L’étude publiée dans Nature, et accessible sur le site de l’ESO : Nightside condensation of ironin anultra-hot giant exoplanet et présentée sur ce même site : ESO Telescope Observes Exoplanet Where It Rains Iron.