Vénus est encore géologiquement active
Selon une nouvelle étude publiée cette semaine (lien plus bas), la surface de Vénus n’est pas une « lithosphère » unique et solide, comme on le pensait autrefois, mais un patchwork de plaques tectoniques dont l’activité est similaire, mais pas identique, à celle de la Terre.
Image d’entête : vue radar du plus grand bloc des basses terres de Vénus identifié par les chercheurs dans cette étude. Des ceintures complexes de structures tectoniques délimitent le bloc, mais l’intérieur est beaucoup moins déformé, abritant des coulées de lave et quelques cratères d’impact. (Paul Byrne/ NASA/ JPL)
L’étude montre que ces plaques tectoniques se bousculent et se heurtent les unes aux autres comme la banquise sur un lac gelé, ce qui suggère que Vénus est encore géologiquement active.
Selon Paul Byrne, professeur de science planétaire à l’université d’État de Caroline du Nord et auteur principal de l’étude :
Nous avons identifié un modèle de déformation tectonique inconnu jusqu’à présent sur Vénus, un modèle qui est alimenté par le mouvement intérieur, tout comme sur Terre. Bien que différent de la tectonique que nous observons actuellement sur Terre, il s’agit toujours d’une preuve de mouvement intérieur s’exprimant à la surface de la planète.
Byrne et une équipe internationale de chercheurs ont utilisé les images radar de la sonde Magellan de la NASA, qui a photographié toute la surface de Vénus avant de plonger dans l’atmosphère vénusienne au cours de l’été 1993 et de se désintégrer. En observant les vastes plaines vénusiennes, l’équipe a vu des zones où de grands blocs de lithosphère semblaient avoir bougé, certains se séparant, d’autres se rapprochant et d’autres glissant les uns sur les autres.
En créant un modèle informatique de cette déformation, l’équipe a découvert que le mouvement lent à l’intérieur de la planète explique l’activité tectonique plus tranquille qui se produit sur Vénus, par opposition aux mouvements tectoniques violents de la Terre, qui peuvent créer d’énormes chaînes de montagnes ou de vastes systèmes de subduction.
Cette découverte est importante, car on pensait autrefois que Vénus avait une surface solide et immobile, comme Mars ou la Lune, plutôt qu’une surface géologiquement active et en mouvement.
Toujours selon Byrne :
Nous savons qu’une grande partie de Vénus a fait l’objet d’une résurgence volcanique au fil du temps, de sorte que certaines parties de la planète pourraient être très jeunes, géologiquement parlant. Mais plusieurs des blocs bousculés se sont formés dans ces jeunes plaines de lave et les ont déformées, ce qui signifie que la lithosphère s’est fragmentée après la mise en place de ces plaines. Cela nous donne des raisons de penser que certains de ces blocs ont pu se déplacer géologiquement très récemment, peut-être même jusqu’à aujourd’hui.
Vue radar en fausses couleurs, d’une largeur de 1 100 km, de Lavinia Planitia, l’une des plaines de Vénus où la lithosphère s’est fragmentée en blocs (violet) délimités par des ceintures de structures tectoniques (jaune). (NC State University/ NASA/ JCL)
Le nouveau modèle de « banquise » identifié sur notre voisine ardente pourrait offrir des indices sur la déformation des plaques tectoniques sur les planètes en dehors du système solaire, ainsi que sur la formation géologique de la Terre à ses débuts.
L’épaisseur de la lithosphère d’une planète dépend principalement de sa température, tant à l’intérieur qu’à la surface. Le flux de chaleur provenant de l’intérieur de la jeune Terre était jusqu’à trois fois supérieur à ce qu’il est aujourd’hui, de sorte que sa lithosphère a pu être similaire à ce que nous voyons aujourd’hui sur Vénus : pas assez épaisse pour former des plaques qui se déforment, mais assez épaisse pour s’être fragmentée en blocs qui ont poussé, tirés et bousculés.
Cette nouvelle étude s’inscrit dans le cadre d’un regain d’intérêt pour notre planète voisine. La NASA et l’Agence spatiale européenne ont récemment approuvé trois nouvelles missions vers Vénus qui observeront la surface de la planète et détermineront si elle a déjà abrité des océans, et potentiellement de la vie.
Pour Byrne :
Je suis particulièrement enthousiaste à l’idée que ces missions permettront de vérifier notre principale conclusion, à savoir que les basses terres de la planète se sont fragmentées en blocs crustaux qui se bousculent.
L’étude publiée dans PNAS : A globally fragmented and mobile lithosphere on Venus et présentée sur le site de l’Université d’État de la Caroline du Nord : ‘Pack Ice’ Tectonics Reveal Venus’ Geological Secrets.