Comme nous, les pieuvres ont des bras préférés
Des chercheurs qui étudient les pieuvres afin d’améliorer leurs connaissances sur la construction de robots sous-marins ont fait une découverte surprenante : les céphalopodes ont une préférence pour certains de leurs bras.
Image d’entête : une pieuvre californienne à deux points chasse une crevette lors d’une expérience, en frappant avec son deuxième bras. (Laboratoire Wardill/ Université du Minnesota)
Les scientifiques de l’Université du Minnesota (Etats-Unis) ont observé des pieuvres pendant des heures et selon Trevor Wardill, un professeur adjoint de biologie qui étudie les pieuvres et autres céphalopodes :
Normalement, lorsque vous regardez une pieuvre pendant un court moment, rien n’est répétable. Elles se tortillent et ont juste l’air bizarre dans leurs mouvements exploratoires.
La nouvelle étude (lien plus bas) portait sur 10 pieuvres californiennes à deux points (Octopus bimaculoides), une créature jaune de la taille d’une balle de tennis qui vit environ deux ans.
Dans une arène d’observation équipée d’une fausse plante et d’une tanière, les pieuvres ont reçu des proies vivantes, soit des crevettes, soit des crabes violonistes, et 628 comportements prédateurs ont été enregistrés sur vidéo. Pour faciliter le suivi, les bras ont été numérotés de chaque côté du corps de la pieuvre.
A partir des essais pour cette étude. (Bidel et col./ Current Biology)
À partir de là, les chercheurs ont déterminé quels bras étaient utilisés le plus souvent, ainsi que la manière dont les autres étaient incorporés. Comme les crabes se déplacent lentement tandis que les crevettes peuvent agiter leur queue pour s’échapper rapidement, chaque type de proie nécessite potentiellement des tactiques de chasse différentes.
Les chercheurs ont découvert quelques surprises. Tout d’abord, les pieuvres avaient un bras préféré, quelle que soit la proie, elles semblent préférer utiliser leur deuxième bras à partir du milieu. Ils ont également découvert que les pieuvres utilisent normalement le bras du même côté que l’œil qui regarde la proie.
Enfin, pour éviter d’effrayer la proie, elles se servent de leur bras préféré et, après avoir établi le contact avec la crevette, elles utilisent les bras voisins un et trois pour s’assurer qu’elle ne s’échappe pas.
Selon l’équipe dans sa nouvelle étude :
Notre étude corrobore un précédent rapport selon lequel la préférence latérale pour l’utilisation des yeux et des bras est fortement corrélée. Nous avons constaté que la répartition du travail entre les huit bras lors d’une attaque suit une règle topologique simple où la proximité de la proie par rapport à l’œil qui regarde dicte si le recrutement des bras se fait du même côté du corps ou à l’opposé.
A partir de l’étude : Les bras adjacents sont préférentiellement mobilisés dans les frappes séquentielles et synchrones. (Bidel et col./ Current Biology)
Il est intéressant de noter que, contrairement aux mains humaines, les chercheurs suggèrent que, bien qu’il y ait un léger biais latéral, les huit bras d’une pieuvre sont pour la plupart en miroir, et sont « fonctionnellement équivalents » pour capturer les proies.
Selon les chercheurs :
Dans une certaine mesure, cette organisation peut être considérée comme celle des doigts des hominidés, où chaque doigt de la main gauche et de la main droite est le miroir de l’autre et permet des mouvements de doigts individuels.
Wardill et son équipe ne se contentent pas d’étudier cette question par intérêt. Ils suggèrent que le fait de comprendre comment cela se passe, jusqu’aux neurones, pourrait permettre de concevoir des robots plus performants, ils ajoutent :
Les pieuvres sont extrêmement fortes. Pour elles, saisir et ouvrir une porte est trivial, compte tenu de leur dextérité. Si nous pouvons tirer des enseignements des pieuvres, nous pouvons les appliquer à la fabrication d’un véhicule sous-marin ou d’un robot souple.
L’étude publiée dans Current Biology : Octopus bimaculoides’ arm recruitment and use during visually evoked prey capture et présentée sur le site de l’Université du Minnesota : Octopuses prefer certain arms when hunting and adjust tactics to prey.