La manipulation de la "lumière quantique" fait un pas de plus vers l’imagerie médicale et l’informatique quantique
Pour la première fois, des scientifiques ont pu identifier et manipuler des photons, des particules de lumière, qui interagissent entre eux. Cette avancée a des répercussions sur les technologies quantiques, notamment sur l’imagerie médicale et l’informatique quantique.
Image d’entête : représentation artistique de photons stimulant un point quantique. (Université de Bâle)
Les photons peuvent également être considérés comme des paquets d’énergie lumineuse, ou « quanta » de lumière. Il y a plus d’un siècle, les physiciens qui s’attaquaient au monde étrange de la mécanique quantique ont découvert la « dualité onde-particule« . Les photons, les électrons et d’autres particules subatomiques ne se comportaient ni comme des particules ni comme des ondes, mais présentaient des caractéristiques des deux formes.
Einstein a proposé pour la première fois en 1916 (publiée en 1917) que l’on puisse faire émettre des photons par les atomes en « excitant » les électrons dans les atomes avec de l’énergie. Ce type de diffusion des photons est observé quotidiennement dans les lasers (LASER = Light Amplification by Stimulated Emission of Radiation = amplification de la lumière par émission stimulée de radiation) qui contiennent un grand nombre de photons.
L’énergie de la lumière « excite » les électrons dans les atomes des matériaux optiques et ceux-ci se déplacent vers une orbite plus énergétique. Lorsque les électrons retournent spontanément à leur orbite normale ou lorsqu’ils sont « stimulés » par la lumière ou l’énergie, ils émettent des particules lumineuses appelées photons. (James Wickboldt/ Lawrence Livermore National Laboratory)
Mais cette nouvelle recherche montre l’émission stimulée pour des photons uniques.
Des scientifiques de l’université de Sydney, en Australie, et de l’université suisse de Bâle ont fait équipe pour observer pour la première fois l’émission stimulée de photons uniques. Les physiciens ont pu directement mesurer le délai entre un photon et une paire de photons diffusés par un seul point quantique.
Une boîte quantique est un type d’atome artificiel produit à l’aide d’une structure cristalline de taille nanométrique. Les boîtes quantiques peuvent convertir la lumière d’une longueur d’onde en un photon d’une autre longueur d’onde.
Selon le Dr Sahand Mahmoodian, de l’université de Sydney :
Cela ouvre la voie à la manipulation de ce que l’on peut appeler la « lumière quantique”. Cette science fondamentale ouvre la voie aux progrès des techniques de mesure quantique et de l’informatique quantique photonique.
Comprendre la nature de la lumière, c’est non seulement captiver l’imagination, mais c’est aussi la base d’une grande partie de la technologie moderne, notamment les téléphones portables, les réseaux de communication mondiaux, les ordinateurs, le GPS et l’imagerie médicale moderne. De nouvelles avancées dans notre connaissance du fonctionnement de la lumière promettent d’étayer de nouvelles innovations technologiques.
La lumière s’est déjà montrée prometteuse, par l’intermédiaire des fibres optiques, pour remplacer les réseaux électriques dans le cadre d’un transfert d’informations ultra-rapide et pratiquement sans distorsion. C’est lorsque nous voulons que la lumière interagisse que les choses se gâtent.
Par exemple, les interféromètres sont aujourd’hui des outils de mesure courants qui fonctionnent en fusionnant deux sources lumineuses ou plus pour créer une figure d’interférence. Les interféromètres sont utilisés en imagerie médicale et dans le cadre de certaines des expériences les plus avancées au monde, telles que le LIGO à la California Institute of Technology, qui a été le premier à détecter les ondes gravitationnelles en 2015.
La sensibilité des interféromètres est limitée par des effets quantiques qui rendent difficile la distinction entre les nombreux photons présents dans l’appareil.
Selon la Dr Natasha Tomm de l’université de Bâle :
Le dispositif que nous avons construit induit des interactions si fortes entre les photons que nous avons pu observer la différence entre un photon interagissant avec lui même et deux photons. Nous avons observé qu’un photon était retardé plus longtemps que deux photons. Avec cette interaction photon-photon très forte, les deux photons deviennent intriqués sous la forme de ce que l’on appelle un état lié à deux photons.
Ces dispositifs à « lumière quantique », par opposition aux interféromètres qui jusqu’à présent utilisaient la lumière laser classique, promettent d’avoir une résolution et une sensibilité beaucoup plus élevées.
Les chercheurs indiquent que ces dispositifs seront utiles dans des domaines tels que l’imagerie médicale, et que d’autres recherches viseront à manipuler la lumière quantique pour produire des ordinateurs quantiques tolérants aux erreurs.
Toujours selon Tomm :
Cette expérience est magnifique, non seulement parce qu’elle valide un effet fondamental, l’émission stimulée, à sa limite ultime, mais aussi parce qu’elle représente un énorme pas technologique vers des applications avancées. Nous pouvons appliquer les mêmes principes pour développer des dispositifs plus efficaces qui nous donnent des états liés aux photons. C’est très prometteur pour des applications dans un large éventail de domaines : de la biologie à la fabrication avancée et au traitement quantique de l’information.
L’étude publiée dans Nature Physics : Photon bound state dynamics from a single artificial atom et présentée sur le site de l’Université de Sydney : Scientists open door to manipulating ‘quantum light’.